Jean-Marie Gourio aura passé plus de dix ans à écumer les cafés pour rassembler ce qu’il a baptisé les "brèves de comptoir". Faut dire qu’ils s’en donnent à coeur joie tous ces piliers de bistrots ! Les vannes fusent entre commerçants et cafetiers, travailleurs ou chômeurs... Une faune attendrissante, causant dans des boui-bouis un peu crasseux sans se soucier des autres. Le bistrot comme reflet des quartiers populaires, dans lequel se forme au fil des jours une véritable famille. Gourio s’est posé dans ces endroits où l’on hésite parfois à entrer, dont les vitres sont sales ou embuées, et où résonnent toujours ces fameuses brèves.

Des brèves aussi spontanées qu’irrésistibles, parfois poétiques, parfois absurdes... Treize années sont définitivement compilées dans ces deux tomes. Faites vous-même le compte... Plus de deux mille pages, au moins dix brèves par page, de quoi se détendre l’esprit durant un bon moment. L’actualité décortiquée à la sauce beaujolais, la météo analysée par les amateurs de calva, les réflexions existentielles assénées par les écluseurs de Ricard.

Pour entrer dans cette ultime sélection, une brève doit percuter, évoquer, se distinguer... Et ici, la mise en page en laisse deviner le ton. De gros caractères pour les forts en gueule, des petits pour les timides planqués au bout du comptoir. Proverbes ? Aphorismes ? Impossible à définir. Ce sont juste des "brèves", et c’est très bien comme ça. Un petit exemple ?
"- Je vous reconnais ! Vous êtes le monsieur qui écoute les conneries dans les cafés ?
- Un demi s’il vous plaît...
- Ici vous risquez pas d’en entendre beaucoup."
Un genre à part entière !