Vive Laldjérie !
Le 4 novembre 2017
Zemmouri filme une France qui a tendance à rejeter ses enfants beur blanc rouge. Délicieusement incorrect !
- Réalisateur : Mahmoud Zemmouri
- Acteurs : Julien Courbey, Yasmine Belmadi, Annie Savarin, Nozha Khouadra, Karim Belkhadra
- Genre : Comédie
- Nationalité : Français, Algérien
- Durée : 1h28mn
- Date de sortie : 17 mai 2006
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L’argument : Dans un Belleville coloré, Brahim erre de poteaux en poteaux attendant impatiemment le match de football historique : France/Algérie. Durant une semaine mouvementée, Brahim va aller de désillusion en désillusion jusqu’au ras-le-bol final.
Notre avis :
Brahim aime le foot. D’ailleurs, il est passionné par la vie sous toutes sous ses formes. Tchatcheur impénitent, il vit au jour le jour essayant tant bien que mal de se fondre dans la société. Le problème, c’est qu’il ne donne aucun sens à sa vie, ne dispose d’aucun revenu (il vit chez ses parents) et galère avec ses potes à la recherche du système D parfait. Et puis il y a ce match de foot capital, cette rencontre entre la France et l’Algérie. Sans le savoir, cette issue sportive lui sera fatale.
Zemmouri, cinéaste falgérien, revient sur nos écrans pour soulever un problème qui perdure dans la société française : l’identité. Depuis trop longtemps, la France rejette son passé colonialiste quitte à adopter une posture des plus problématiques. Un des exemples les plus frappants se trouve dans ces aspects invisibles et pernicieux de la discrimination dont souffrent les gens issus de l’immigration. Yamina Benguigui l’avait déjà souligné dans Les plafonds de verre, Zemmouri reprend le même canevas pour en tirer une fiction.
La filmographie de ce cinéaste/acteur algérien a toujours été placée sous le signe de la farce. L’objectif de Zemmouri est d’interpeller à sa manière le spectateur sur des questionnements importants qui hantent notre vie sociétale. Utilisant les caractéristiques grossières, bouffonnes et absurdes de la comédie, Zemmouri a eu le mérite de filmer un microcosme déglingué par l’intégrisme religieux (100% arabica), le regroupement familial (Prends 10 000 balles et casse-toi), les rapports France/Algérie (De Hollywood à Tamanrasset) et les débordements de la guerre d’Algérie (Les folles années du twist).
- Copyright D.R.
Dans Beur blanc rouge, Mahmoud Zemmouri narre les pérégrinations d’un Français d’origine algérienne qui se retrouve déséquilibré par une situation sociale qui défavorise depuis trop longtemps les enfants issus de l’immigration. L’auteur a la bonne idée de ne pas brouiller les pistes et de tout ramener à son personnage principal. Chaque situation découle de ce pivot central, approfondissant les nombreuses thématiques voulues par le cinéaste. Brahim tente de séduire une jeune beurette prénommée Wassila. Vivant seule dans son appartement parisien, cette dernière a coupé le cordon avec sa famille pour ne pas étouffer sous le poids d’un traditionalisme exacerbé car bon nombre de jeunes femmes d’origines maghrébines appliquent ce choix de vie pour sentir ce goût de l’indépendance. Autre exemple de la pertinence de Zemmouri : Mouloud, l’ami fidèle de Brahim, décide d’aller de l’avant en acceptant de ne plus tenir le lampadaire du quartier. Travailler dans la plomberie n’est certes pas reluisant mais cela lui permet de se projeter dans l’avenir, et vivre pleinement sa vie de Français. Au contraire de Brahim qui revendique à tout bout de champ ses origines algériennes, Mouloud se sert de cette double culture pour abattre les arbres de l’intolérance.
Par le biais de ses personnages secondaires, Zemmouri oriente son film vers les contradictions que subissent ces "enfants du pays". On est en droit de s’interroger sur l’attitude nonchalante de Brahim, sur le débordement des supporters de l’équipe d’Algérie (majoritairement des beurs) durant le match France/Algérie et sur la bêtise des parents de Brahim de vouloir emmener leur fils en Algérie pour qu’il apprenne la rigueur et l’honneur. Zemmouri nous rappelle (et il sait s’y prendre) que toutes ces contradictions sont le reflet d’un déséquilibre de l’administration française, d’une amnésie de la période coloniale qui enfonce le clou. Se voiler la face, faire l’amalgame entre une religion (l’islam) et son côté obscur (l’intégrisme), rejeter l’intelligence de ces jeunes Français/çaises et surtout les amener à quitter leur pays de naissance ne peut qu’engendrer un ras-le-bol dévastateur. Souvenez-vous d’octobre 2005 avec les émeutes des banlieues...
Zemmouri réussit habilement à marcher sur des œufs sans les briser. L’identité étant le thème universel par excellence, les nombreuses interrogations du cinéaste peuvent être perçues par n’importe quel spectateur quelle que soit son origine. Une vraie comédie sociale qui a le mérite de remettre les pendules à l’heure !
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