Le territoire de l’impossible
Le 18 février 2014
Important succès critique et public en Israël, Bethléem offre une vision sans concession du conflit israélo-palestinien.
- Réalisateur : Yuval Adler
- Acteurs : Tsahi Halevi, Shadi Marei
- Genre : Drame, Thriller
- Nationalité : Israélien
- Durée : 1h39mn
- Date de sortie : 19 février 2014
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Important succès critique et public en Israël, Bethléem offre une vision sans concession du conflit israélo-palestinien.
L’argument : 2005. Bethlehem sud de Jérusalem. Sanfur, un jeune palestinien vit dans l’ombre de son frère Ibrahim un terroriste à la tête d’un réseau influent. Razi, un agent des services secrets israëliens qui recrute des informateurs dans les territoires occupés s’en fait un allié, lui offrant ce qui manque à sa vie, l’estime et la bienveillance d’un père. Tentant d’assurer son rôle tout en restant loyal envers son frère, Sanfur navigue comme il peut d’un camp à un autre, commettant des impairs. Les services secrets découvrent qu’il participe aux activités de son frère, plongeant Razi dans un profond dilemme : doit-il donner une seconde chance à son indic ou obéir aux ordres ?
Notre avis : Bethléem est un film à polémiques. Certains l’accusent d’être pro-israélien, puisqu’il présenterait une vision caricaturale des palestiniens, qui se verraient endosser le costume des « méchants », comme souvent dans les productions cinématographiques. Pour Yuval Adler, qui réalise ici son premier long-métrage, il n’en est rien. Pour preuve : le scénario a été écrit par Ali Waked, ancien reporter palestinien, qui a longtemps couvert le conflit israélo-palestinien pour de grands médias israéliens. Waked affirme ainsi que l’expérience du terrain a été son unique source d’inspiration. « Nous avons passé des mois à interviewer les palestiniens pour les besoins du scénario. C’est un reflet très précis de la réalité », insiste ce polyglotte parlant arabe, hébreux, français et anglais.
Si les auteurs du film se défendent de privilégier tel ou tel point de vue sur le conflit qu’ils mettent en scène, difficile de nier que résonne en Bethléem un subtile message politique : dans cette ville aux multiples fractures, le conflit est partout, chacun des habitants se devant de choisir un camp. Le personnage de Sanfur, jeune informateur palestinien, cristallise alors cette problématique, lui qui vit dans l’ombre de son grand frère, dirigeant d’un réseau considéré comme terroriste. Pour Razi, agent des services secrets israéliens, il délivre des informations capitales sur les projets de son frère. La famille, la justice : le choix de l’absurde s’imposera alors à lui, matérialisé par une terrible séquence finale.
Bethléem opte pour un récit où le spectateur est omniscient, puisque tous les points de vue sont représentés : le spectateur voit en effet se développer en parallèle les stratagèmes des différentes parties prenantes. Ce schéma narratif impose au spectateur un certain effort, tant les acteurs sont nombreux – Hamas, El Aqsa, autorité palestinienne – et leurs connexions complexes. Cette manière d’étayer avec une certaine sobriété les multiples enjeux du conflit offre alors au film l’intensité des plus grands thrillers politiques, ceux qui parviennent à jongler sans cesse entre deux registres, à savoir celui du documentaire, et celui de la fiction. On pense notamment à Zero Dark Thirty, de l’américaine Kathryn Bigelow, certaines séquences lui faisait directement écho dans leur construction et leur mise en scène – notamment celle de l’assaut d’une villa en territoire ennemi.
Candidat malheureux aux Oscars, Bethléem est un film qui marque autant par sa puissance narrative que par le fatalisme de son propos ; à Bethléem, l’intime est toujours lié au politique : ce conflit sans fin déchire des familles, des amitiés, des nations. Surtout, il déchire des individus, au plus profond de leur être.
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