L’enfer, c’est les autres
Le 4 octobre 2007
Un monument indépassable de la série télé, à ranger à coté de La maison des bois de Pialat.
- Réalisateur : Rainer Werner Fassbinder
- Acteurs : Hanna Schygulla, Margit Carstensen, Udo Kier, Volker Spengler, Gottfried John, Karin Baal, Günter Lamprecht, Barbara Valentin, Adrian Hoven, Brigitte Mira, Harry Baer, Marquard Bohm, Irm Hermann, Vitus Zeplichal, Hark Bohm, Günther Kaufmann, Katrin Schaake, Barbara Sukowa, Ivan Desny, Elisabeth Trissenaar, Helen Vita, Karl Scheydt
- Genre : Drame
- Nationalité : Allemand
- Editeur vidéo : Carlotta Films
- Durée : 15h30mn
- Date télé : 28 avril 2022 20:40
- Chaîne : OCS City
- Date de sortie : 6 octobre 2007
L'a vu
Veut le voir
– Année de production : 1980
Résumé : Franz Biberkopf vient de sortir de la prison de Berlin-Tegel où il avait été emprisonné pour le meurtre de son amie Ida. Il commence alors une nouvelle vie, se jure de rester honnête. Il retrouve quelques amis et cherche un soutien auprès de ses différentes maîtresses...
Critique : Incroyable ! Au cours de sa fulgurante carrière (une quarantaine de films en 15 ans), Fassbinder aura trouvé le temps de tourner une série télévisée. Plus de 15 heures d’images, passionnantes et inspirées. Celui qui n’avait de cesse d’observer les mutations et les contradictions de l’Allemagne d’après-guerre réalise, avec ce Berlin Alexanderplatz, son chef-d’œuvre. Une déambulation hallucinée dans les recoins les plus sombres de la république de Weimar qui égale ses meilleurs films (sur un même sujet, Bergman avait signé un intriguant L’Œuf du serpent). Premier plan : Franz Biberkopf, anti-héro trop corpulent et pas assez conscient de sa force, est libéré de la prison où il a passé quatre ans. Le voilà catapulté dans une société qu’il ne reconnaît plus, entre spectre du chômage et montée du nationalisme. Si Fassbinder raconte en creux la naissance du nazisme, il se garde bien de toute démonstration trop évidente et son film n’a rien d’une leçon d’Histoire. On retrouve, le long de ces 14 épisodes, la plupart des thèmes qui ont agités le cinéaste : l’attirance pour la marge, l’amour envisagé comme un rapport de force, la lutte pour survive.
La jolie photographie de Xaver Schwarzenberger joue à la perfection des éclairages expressionnistes et des possibilités de l’espace pour transmettre au spectateur une sensation claustrophobie. Pour Biberkopf, tout juste libéré de prison, l’impression d’enfermement n’a sans doute jamais été aussi forte que dans les rues et les bars de Berlin. À travers son parcours se dresse le portrait inquiet d’une Allemagne au bord du gouffre. 13 épisodes d’une densité sidérante qui, à eux seuls, auraient suffi à imposer Berlin Alexanderplatz comme l’une des plus grandes réussites (sinon la plus grande) du patrimoine audiovisuel. C’était sans compter sur l’épilogue, deux heures d’hallucinations métaphoriques qui semblent tout droit sorties d’un film de Jodorowsky. Un dérèglement total qui achève le spectateur dans une succession de visions funestes. De quoi clore magistralement ce monument d’ambition maîtrisée.
Le DVD
Pour ceux qui n’auront pas la chance de voir le film au cinéma (il sera projeté au Grand Rex, du 6 au 7 octobre, avant d’entamer une tournée dans toute la France), où pour ceux qui auront envie de le revoir, un coffret DVD permet de découvrir l’intégralité de la série télé Berlin Alexanderplatz, le chef d’œuvre de Fassbinder. En voici notre critique.
Les suppléments :
Un DVD est consacré exclusivement aux suppléments avec, en premier lieu, un making-of d’époque de 44 minutes, intitulé « Regards sur le tournage ». Ce document revient sur le tournage de certaines scènes (dans la rue, sur une barque) et a pour principal intérêt de montrer Fassbinder au travail, sa manière de diriger ses acteurs. Un autre documentaire, de plus d’une heure, revient sur la genèse du film et donne la parole aux principaux concernés (producteurs, acteurs, techniciens) à travers des interviews entrecoupées d’images d’archive. Exhaustif, il permet de se rendre compte comment cette œuvre extrêmement ambitieuse a pu voir le jour. Enfin, un documentaire est également consacré au travail de restauration du film. Assez long (près d’une demi-heure), il revient sur toutes les étapes du processus. Un bonus original qui ravira tout les passionnés de technique. Sont aussi inclus : une galerie de photo, une bande-annonce et les résumés des épisodes II à XIII (de quelques secondes, ils étaient diffusés avant chaque épisode lors du passage télé). Bref, un travail éditorial de qualité.
Image & son :
Comme en témoigne un documentaire présent dans le DVD bonus, Berlin Alexanderplatz a bénéficié d’un travail de restauration exemplaire, la copie ayant été totalement nettoyée. Surtout, l’étalonnage a été entièrement retravaillé pour donner aux images un lustre qu’elles n’ont probablement jamais eu. Le tout a été supervisé par le chef opérateur du film, Xaver Schwarzenberger. C’est tout juste si certains plans laissent apparaître un grain assez envahissant. Niveau son, rien à redire : la piste mono est claire et permet d’apprécier au mieux les délicates mélodies du compositeur attitré de Fassbinder, Peer Raben. Carlotta nous livre donc un DVD d’une grande qualité technique qui nous permet de découvrir ce film, longtemps invisible, dans des conditions parfaites.
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.