Le 19 mai 2024
Si la question des violences entre enfants à l’école demeure absolument passionnante, le traitement du film s’égare dans des tourments familiaux à la Festen et une mise en scène chorégraphique qui se traînent en longueur. Un film sans doute trop ambitieux pour une première œuvre.
- Réalisateur : Halfdan Ullmann Tøndel
- Acteurs : Ellen Dorrit Petersen, Renate Reinsve, Thea Lambrechts Vaulen, Endre Hellestveit, Øystein Røger
- Genre : Drame
- Nationalité : Allemand, Suédois, Norvégien, Néerlandais
- Distributeur : Tandem
- Durée : 1h56mn
- Titre original : Armand
- Date de sortie : 5 mars 2025
- Festival : Festival de Cannes 2024
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– Festival de Cannes 2024 : Sélection officielle, Un Certain Regard
– Cannes 2024 : Caméra d’or
Résumé : Lorsqu’un incident se produit à l’école, les parents des jeunes Armand et Jon sont convoqués par la direction. Mais tout le monde a du mal à expliquer ce qu’il s’est réellement passé. Les récits des enfants s’opposent, les points de vue s’affrontent, jusqu’à faire trembler les certitudes des adultes…
Critique : Force est de constater que l’école que fréquentent Armand et Jon n’est pas à l’aise pour traiter le conflit qui a opposé les deux enfants, faisant craindre une tentative d’abus sexuel. L’institutrice qui va recevoir les parents est briefée par le directeur et son adjointe, laquelle, submergée par le stress, ne cesse de couler du sang par le nez. On peut comprendre que la rencontre va être difficile dans la mesure où les évènements résultent de paroles rapportées, et parce que la mère d’Armand est une comédienne a priori reconnue. Paradoxalement, les deux enfants sont absents du film, tout se jouant dans la confrontation des vérités entre la mère d’Armand et les deux parents de Jon. On apprend d’ailleurs très vite que ces personnes sont très proches, ayant été aussi scolarisées dans l’école, et issues de la même famille.
- Copyright Eye Eye Pictures 2024
Armand est un premier film assez maîtrisé dans sa texture formelle. Il faut dire que Halfdan Ullmann Tøndel a de quoi trouver son inspiration avec son grand-père Ingmar Bergman et sa grand-mère Liv Ullmann. Il a ainsi grandi dans un univers cinématographique vertueux, lui conférant dès ses premiers travaux une reconnaissance de la profession. Le réalisateur s’attaque donc au problème sensible des rapports de violence des enfants à l’école. En réalité, le conflit entre les deux enfants est surtout une opportunité pour le cinéaste d’explorer les tensions entre les parents qui remontent au passé et qu’ils n’ont pas résolues. La toxicité des comportements et des relations qu’ils entretiennent prend alors toute la place du récit, devant des professionnels de l’école désabusés et perdus.
La mise en scène choisit l’unité de temps et de lieu, à savoir l’école où sont convoqués les parents. Les instituteurs invitent les parties prenantes afin d’obtenir une médiation et de mettre en place un plan de remédiation. Ce type d’expérience interroge toujours si le format cinématographique est le plus pertinent, par rapport au théâtre par exemple. Du coup, Halfdan Ullmann Tøndel agrémente son propos de scènes assez surréalistes où les personnages s’adonnent à d’étranges chorégraphies ou encore échangent dans une classe où l’instituteur a laissé allumé un projecteur. On pressent alors la maladresse d’une première œuvre qui tente de faire du cinéma par la surenchère des effets stylistiques. On regrette aussi un format beaucoup trop long, trop intellectuel et une difficulté de la production à couper certaines scènes qui se traînent en longueur sans rien apporter de plus au récit et à la compréhension des personnages. La fin par exemple est interminable, alors même que le spectateur a déjà tout saisi de ce qui se trame entre les parents.
- Copyright Eye Eye Pictures 2024
Armand révèle un réalisateur qui devrait faire entendre parler de lui dans les années qui viennent. Il s’entoure de deux comédiennes assez extraordinaires, Renate Reinsve qui avait émerveillé la Croisette en 2021 avec Julie (en 12 chapitres) et Ellen Dorrit Petersen qui interprète la mère de Jon. Elles tiennent le pavé avec brio, dans une joute psychologique assez perverse. Jusqu’au bout, elles sèment le doute dans leurs intentions profondes en instrumentalisant le conflit de leurs enfants.
Armand apparaît comme un film assez maladroit dans le parti pris en matière de conduite d’acteurs. Le plus grand défaut du récit provient de l’absence des enfants qui aurait permis au conflit de prendre une dimension supérieure. On ne comprend pas toujours tout. Le long métrage aurait gagné à plus de nuance, une mise en scène plus épurée et surtout un format plus court. Mais que Halfdan Ullmann Tøndel soit rassuré, toutes les bases sont posées pour devenir demain un cinéaste qui compte.
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