Le 18 mars 2018
Trop orgueilleux pour se rendre compte de ses failles scénaristiques importantes, Annihilation n’en reste pas moins une expérience marquante par son esthétique fascinante.
- Réalisateur : Alex Garland
- Acteurs : Jennifer Jason Leigh, Natalie Portman, Oscar Isaac, Tessa Thompson
- Genre : Science-fiction, Thriller
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Netflix
- Durée : 1h55mn
- Date télé : 10 juillet 2024 21:00
- Chaîne : MCM
- Box-office : 28.386.743 $ (USA)
- Date de sortie : 12 mars 2018
Résumé : Lena, biologiste et ancienne militaire, participe à une mission destinée à comprendre ce qui est arrivé à son mari dans une zone où un mystérieux et sinistre phénomène se propage le long des côtes américaines. Une fois sur place, les membres de l’expédition découvrent que paysages et créatures ont subi des mutations, et malgré la beauté des lieux, le danger règne et menace leur vie, mais aussi leur intégrité mentale.
Critique : Étrange objet que cet Annihilation. Lâché par Paramount pour sa diffusion, le second film de Alex Garland s’est vu offert une chance d’exister à une large échelle par son rachat par le géant Netflix, véritable vorace de contenu peu regardant sur la qualité. Car si l’argument avancé par Paramount met en avant le caractère trop "intellectuel" du film, on pense surtout aux nombreux échecs artistiques essuyés par la firme de streaming, qui n’a, jusqu’ici, rien proposé de véritablement mémorable en terme de long-métrages (la plupart sont même mauvais). Annihilation n’avait que pour lui le nom de son réalisateur et scénariste, ainsi que son joli casting pour contrer l’aura puante qui se dégageait d’un tel parcours de production et de diffusion.
- Copyright : Netflix
Si point positif il y a, c’est la liberté laissée par Netflix au metteur en scène du glacial Ex Machina sur la version finale, ici director’s cut. Pour le meilleur comme pour le pire, Annihilation s’extirpe sans conteste de la production SF actuelle par cette dimension carte blanche. Alex Garland est un auteur, et sans généraliser sur cette catégorie de personnes, il a l’ego et la mégalomanie artistique qui vont avec. D’un côté, cette assurance dans son talent permet au film de proposer exactement ce que le réalisateur voulait, sans entrave ; de l’autre, ce manque de limites et de regard extérieur empêche à l’œuvre de ne pas flirter avec la prétention mal placée alors que l’écriture du scénario ne manque pas de failles attaquables facilement.
- Copyright : Netflix
En cela, Annihilation se déploie de manière assez étrange et finalement paradoxale avec l’idée que l’on se fait de la liberté artistique pour un auteur à Hollywood. Dans sa première partie introductive et sa deuxième dans une moindre mesure, cette adaptation très libre du roman éponyme bazarde ses personnages au travers de traits de personnalités écrits tel un blockbuster moyen et insipide, annihilant toute portée émotionnelle au drame qui se joue devant nos yeux. Ici, chacun se caractérise par un point factuel élémentaire supposé déterminer l’entièreté de la psychologie de ces cinq scientifiques et les raisons pour lesquelles elles décident d’aller faire une virée dans un monde sous LSD. Alex Garland, bien qu’il prétende au contraire par la relation entre Lena et Kane, se contrefout de ses personnages en tant qu’entité humaine mais cherche à accéder avec eux à la quintessence d’un propos gorgé par une orgie d’influences (trop) fièrement étalées. Si bien que s’entrechoque un foutoir d’auteurs et de réalisateurs hautement recommandables (s’agit d’être pris au sérieux quand même) à mesure que le film s’enfonce dans sa dimension cauchemardesque, avec la subtilité d’une référence japonaise dans un freestyle de Django (ce rapprochement avec Stalker... Et je dis ça alors que j’ai même pas vu le film, c’est dire si ça se flaire à des kilomètres). Alex Garland s’embrouille et à force d’ouvrir les portes à toutes les interprétations et influences, il finit par se perdre totalement dans son trip nébuleux. Annihilation ressemble au premier film d’un jeune réalisateur, avec une envie de bien faire et d’étaler sa culture, ses obsessions, quitte à en dire tellement trop dans son propos qu’il finit par ne plus dire grand-chose (coucou Grave).
- Copyright : Netflix
Pourtant, et c’est la raison pour laquelle le film divise autant et peut s’inscrire durablement dans le cinéma de science-fiction, Annihilation sait prendre son envol de son écriture sommaire par l’excellence de son atmosphère onirique et cauchemardesque. S’il y a bien une chose que le long-métrage maîtrise, c’est bien sa tonalité taiseuse et dépressive qui transforme la banalité des personnages en réflexion sur la nature auto-destructrice de l’être humain. D’abord dialogué à outrance et maladroitement, Annihilation avance avec brio aux confins du désespoir et de l’angoisse intériorisée à mesure que le genre du survival est exploré. À ce titre, si tant est que l’on soit réceptif à l’expérience, le film d’Alex Garland propose des visions horrifiques plus saisissantes que ce que les dernières propositions du genre ont pu offrir. Déstabilisant dans la perversion de son environnement rêveur, presque féerique, Annihilation emprunte à The Last of Us sa sécheresse et son nihilisme (retranscrit par son ambiance musicale notamment) en même temps qu’il sert au spectateur des sources d’émerveillements. La cohabitation des deux s’opère avec fluidité et aisance par une mise en scène maîtrisant parfaitement l’ambivalence de cet environnement à la beauté sauvage et dangereuse. On pourra reprocher le caractère souvent poseur de la réalisation (à lier à la prétention globale du projet), mais ce serait faire preuve de mauvaise foi de nier son importance dans l’envoûtement provoqué par ce voyage psychédélique. On y trouve pas forcément un sens structuré et précis, mais Annihilation passionne par sa vision sereine, sans armes, ni haine, ni violence, de ce qui pourrait être la fin de notre espèce.
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breizh29 18 mars 2018
Annihilation - Alex Garland - critique
Encore un film fascinant et passionnant à plusieurs niveaux de lecture qui passe à la trappe à cause de ces abrutis d’Américains ! Rappelez-vous le sublime Mother !...Bravo Netflix qui ne cesse d’étonner et d’épater. Annihilation est une oeuvre fascinante. Touchante (le sous-contexte traumatique sous différentes formes), vsuellement splendide, parfois déroutante (quelques fulgurantes gores). Un melting pot surprenant et réussi, jamais ennuyeux, de sf, de quête initiatique et introspective et d’aventures . Un chef d’œuvre !
MYTHOMANIAC 16 mai 2019
Annihilation - Alex Garland - critique
Alex Garland signe un film diffusée par netflix après des sorties cinéma dans d’autres pays. Il s’agit d’une allégorie métaphysique sur l’homme et l’âme dans un film de fantastique aux inspirations kybrickiennes (notamment).
Un objet inconnu est tombée sur terre créant une zone qui se développe et produit des perturbations multiples, le miroitement.
Il est difficile de résumer le film sans en dévoiler trop sur l’intrigue.
Une équipe de femmes scientifique est envoyée pour une expédition après que plusieurs autres équipes ne soient pas revenues.
Natalie Portman, scientifique et ex militaire, est mariée à un homme qui a disparu lors d’une mission, celui-ci revient un an après presque comme si de rien n’était. Il souffre de grave traumatisme interne qui vont la conduire à découvrir la vérité sur sa dernière mission. Oscar Isaac est le seul à être revenu de la zone, elle décide de s’y rendre pour comprendre de quoi il s’agit.
L’idée principale du film est intéressante et permet de traiter le sujet extraterrestre d’une manière peu utilisée. L’univers visuel est efficace quand il s’agit des décors et de la végétation, les effets visuels des animaux est assez faibles, malgré une idée forte sur une séquence. La scène de résolution finale et la scène de clôture n’offrent pas de réponse et surtout peine à trouver une réelle justification.
Malgré des envies de jouer avec des codes du cinéma philosophique, le film peine à assurer un scénario clair, des personnages forts et un accompagnement du spectateur.
Le film avance sans nous perdre mais sans vraiment nous tendre la main, cet entre-monde n’est jamais net, les personnages dépeints trop rapidement nous laissent froid et la fin tout en mysticisme numérique et métaphysique nous laisse face à des interrogations sans nous donner de clés.
Un film intriguant qui aurait nécessité d’être plus abouti pour en faire une référence.