Le 22 octobre 2019
- Acteurs : Lise Laffont, Maroussia Henrich, David Olivier Fischer, Samuel Debure
Cette adaptation théâtrale réussie fait d’Anna Karénine une œuvre encore plus intemporelle, criante de modernité.
Résumé : Dans cette adaptation de Laetitia Gonzalbes, Anna Karénine, issue de la “bonne” société et mariée à un haut fonctionnaire, trompe son mari avec Varinka. Femme sincère en quête d’absolu, elle sacrifie tout à sa liaison avec sa maîtresse : son existence de femme, d’épouse, de mère et sa réputation. Vivant en marge de la société moraliste, Anna supporte difficilement les effets cette liaison. En proie aux plus vifs tourments, et prise dans un engrenage dont elle ne peut se délivrer, elle met fin à sa vie en se jetant sous un train.
Copyright Fabienne Rappeneau
Notre avis : Lorsque l’on descend l’étage et demi qui nous sépare de la scène, quelle n’est pas notre surprise de nous voir scrutés, dès notre arrivée, par cet étrange personnage affublé d’un drôle de costume noir, qui le fait ressembler à un oiseau de mauvais augure. Comme si, à peine jouée, la pièce était déjà scellée. Comme si, à l’image du trajet d’Anna, nous allions nous-mêmes aux Enfers. L’issue sera funeste ou ne sera pas.
Et pour cause : dans cette adaptation du chef-d’oeuvre de Tolstoï, Anna Karénine, l’héroïne éponyme voit petit à petit sa vie sombrer. Alors que tout la destinait à un bonheur conjugal sans failles, Anna va pourtant tomber amoureuse de Varinka, envoyer valser mariage et convenances. Si dans le roman la liaison adultère est hétérosexuelle, dans la pièce, Laetitia Gonzalbes décide que Varinka sera une femme.
Un tel choix peut, de prime abord, surprendre et pourrait n’être perçu que comme une simple volonté de se démarquer du roman de Tolstoï. Il n’en est rien. Laetitia Gonzalbes fait du spectacle une réelle tribune féministe, mais avec subtilité. De nombreuses répliques mettent en avant la condition des femmes trop souvent bafouées, ce qu’illustrent, notamment, la scène de la nuit de noces entre Anna et son nouvel époux, et celle où Varinka discute avec l’étrange personnage de la condition des femmes, leur éducation et leur émancipation.
Copyright Fabienne Rappeneau
Concernant le reste de la pièce, Laetitia Gonzalbes prend le parti de rester assez fidèle au roman. On retrouve ainsi le fameux épisode du train, la séquence du théâtre où Anna est humiliée, ainsi que son désespoir d’être séparée de Serge.
Pour en revenir à l’intrigue amoureuse, le parti pris de la metteuse en scène est plus de parler d’amour selon une intention universelle que d’évoquer une relation lesbienne. La force des passions est déclamée avec fougue par les personnages, l’amour est impétueux, à l’image de leur première étreinte qui prend la forme d’une danse sensuelle.
Ce thème de la danse a d’ailleurs une place importante dans la mise en scène : ainsi, de nombreux passages sont chorégraphiés, pour souligner l’idée que leur vie est une valse, dans laquelle les partenaires changent et surviennent, comme un écho aux grands bals qui étaient donnés en Russie, à l’époque. Si la dramaturgie est globalement sobre, elle est accentuée par un quatuor d’acteurs absolument remarquable, qui donnent vie à ces personnages originellement de papier.
Bref, il s’agit d’une pièce qui ravira les amoureux du roman. Ils y reconnaîtront les moments clés du récit de Tolstoï. Mais les néophytes se retrouveront aussi embarqués dans cette valse théâtrale.
Anna Karénine mise en scène de Laetitia Gonzalbes, avec Lise Laffont, Maroussia Henrich, David Olivier Fischer, Samuel Debure.
Du 20 octobre au 23 décembre, au théâtre de la Contrescarpe.
Galerie Photos
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