Le 28 février 2016
Un film de sabre parodique qui ouvre la voie au western-spaghetti.
- Réalisateur : Akira Kurosawa
- Acteurs : Toshirō Mifune, Isuzu Yamada, Yōko Tsukasa, Tatsuya Nakadai
- Genre : Drame, Action, Noir et blanc
- Nationalité : Japonais
- Reprise: 17 avril 2019
- Date de sortie : 2 janvier 1991
L'a vu
Veut le voir
Année de production : 1961
Résumé :
Un film de sabre parodique qui ouvre la voie au western-spaghetti.
L’argument : À la fin de l’ère Edo, un samouraï, Sanjuro, arrive dans un village écartelé entre deux bandes rivales, menées d’un côté par le bouilleur de saké, de l’autre par le courtier en soie. Les deux bandes veulent s’adjoindre les services de Sanjuro…
Notre avis : Un samouraï arrive dans une ville déchirée par la violence qui oppose deux bandes rivales ; quand il part, le bourg n’est plus qu’un champ de ruines. On reconnaît la trame minimale de nombre de films, de sabre ou western, qui met face à face la vertu d’un homme seul à des brigands assoiffés de sang. Sauf que les brigands en question sont des brutes stupides et couardes : l’un appelle sa mère, l’autre pleure, un troisième compte sur ses doigts. Ils tentent régulièrement de s’intimider, mais avant l’arrivée du héros, s’avèrent incapables de s’affronter véritablement.
- ©Toho Co., Ltd All Rights Reserved
Yojimbo, Le Garde du corps en Français, part de stéréotypes donnés comme tels pour construire une réflexion sur un genre épuisé : Kurosawa le « revisite » en faisant de son personnage principal un observateur goguenard pendant une partie du film ; il passe son temps à observer, que ce soit en hauteur ou derrière des fenêtres. Il est celui qui voit, celui qui sait, celui qui prévoit. La première partie se passe ainsi en manigances et roueries, et le cinéaste dilate le temps, refuse la violence pour étirer jusqu’à l’épuisement une situation-cliché. Cela s’accompagne de caricatures multiples : le monde est un théâtre dans lequel les hommes sont de pathétiques marionnettes ; la corruption, la lâcheté sont les caractéristiques principales de ces brutes. C’est que Kurosawa a pratiqué son Shakespeare et sait utiliser le grotesque pour porter un regard ironique et désabusé, celui de son double Toshiro Mifune.
- ©Toho Co., Ltd All Rights Reserved
Comme chez Leone, qui adaptera Yojimbo avec Pour une poignée de dollars, le héros est souvent mutique et l’action est ramassée en séquences brèves et fulgurantes. Mais Kurosawa joue aussi de l’ellipse qui s’oppose singulièrement à ces longs moments de dialogues ou de déplacements aussi nombreux que vains. C’est que, sans y toucher, le maître japonais décrit un monde, certes brutal et violent, mais également déterminé par le hasard (voir la première scène et son bâton jeté pour choisir une direction), absurde, livré au jeu et à la volonté de pouvoir, même dérisoire. Si sa caméra reste essentiellement à hauteur d’homme, on sent néanmoins un jugement hautain exercé sur ces pitoyables abrutis. Peu de personnages sont sauvés, en dehors de l’aubergiste et de la famille que Mifune parvient à réunir, seule trace explicite de sentiments qui lui vaut d’ailleurs d’être capturé et torturé : c’est bien sûr là encore une invitation au western spaghetti qui multipliera le masochisme des héros et de sadisme gratuit des méchants.
Comme dans tous ces films, Kurosawa montre une science du cadrage et du découpage qui éclate même dans des séquences anodines ; la scénographie joue sur la disposition des personnages mais aussi sur la profondeur de champ, ou le panoramique qui dévoile un élément inattendu. Mais ce qui frappe le plus, c’est l’abondance de portes et de fenêtres qui s’ouvrent ou se ferment, de planches et de couvercles qui se soulèvent, faisant de Yojimbo un film anti-spectaculaire qui repose davantage sur le sur-cadrage que sur le plan d’ensemble. Un monde réduit, fragmenté, qui a perdu son unité pour devenir une représentation perpétuelle destinée à un public impuissant.
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.