Wolf and Sheep - la critique du film

Notre avis : Ceci est l’histoire d’une vie hors des sociétés. Ou plutôt, un peuple d’Afghanistan vivant dans une société parallèle. Loin des villes. Loin du confort moderne. Loin des conflits. Vivant avec toute la simplicité et toute la modestie possible. Wolf and Sheep est un titre équivoque. Tout le film se déroule dans un village reculé, au milieu d’un désert aride et de montagnes imposantes. A travers le quotidien de ces petites gens oubliées, filmées au plus proche de la réalité, Shahrbanoo Sadat, jeune cinéaste prodige d’à peine vingt-six printemps, se lance dans une recherche audacieuse : celle de la vérité de notre humanité – dans tous les sens du terme.

© Droits réservés

Lorsque cela commence, le soleil semble avoir dérobé à l’herbe toute sa belle chlorophylle, qu’il n’en reste que teinte jaune paille et desséchée. De petites côtes que la nature a surélevées, comme un terrain de golf. A ceci près que les hommes et les femmes qui habitent ce milieu, que les Occidentaux jugeraient hostile, ne sont pas là pour jouer mais bel et bien pour vivre. Quelques cabanes sommaires, avec du crottin de mouton en guise de ciment, servent d’asiles contre la chaleur. Et l’existence se résume à des rituels : élever les troupeaux, manger, dormir, se laver… tous les jours les mêmes gestes, jusqu’à s’en aller ailleurs lorsque l’environnement ne permet plus de rester. Ainsi va le quotidien de ce petit peuple de villageois.

© Droits réservés

L’on aurait pu penser que la réalisatrice, avide de reconnaissance, céderait volontiers à la tentation d’une mise en scène conventionnelle, pour séduire plus aisément les publics européen et américain. C’est pourtant tout le contraire. Le dispositif, empruntant largement au documentaire, est très simple : Sadat fuit l’artifice comme la peste, laisse ses acteurs s’exprimer librement, improvise des scènes sans que le scénario ne soit jamais complètement arrêté. Elle semble ne rien vouloir contrôler, fait confiance à la nature qui lui sert de décor et aux personnages qui y évoluent. Son film, grand jeu d’enfants cherchant l’authenticité, est comme la contingence du monde : toujours en mouvement et en perpétuel changement.

© Droits réservés

Humble et très touchant, esquivant les discours et les engagements politiques, Wolf and Sheep remet nos pendules occidentales à l’heure, nous qui avons tendance à oublier qu’hôtels, appartements, maisons et autres boutiques de vêtements, ne poussent pas dans la nature, tels des plantes sauvages, et que la nourriture de nos supermarchés est aussi précieuse que la carcasse d’un mouton.

L’interview de la réalisatrice