Le 26 novembre 2018
Toutes les intentions de Naomi Kawase, son mysticisme qui accompagne une redécouverte de la nature, cette quête de soi et du lien en résistance à la vie moderne, échouent sur un sentimentalisme naïf, ainsi que sur un manque d’incarnation d’idées qui n’accouchent que d’images de carte postale.
- Réalisateur : Naomi Kawase
- Acteurs : Juliette Binoche, Masatoshi Nagase, Min Tanaka
- Genre : Drame
- Nationalité : Français, Japonais
- Distributeur : Haut et Court
- Durée : 1h49mn
- Titre original : Vision
- Date de sortie : 28 novembre 2018
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Notre avis : Voyage à Yoshino est un film qui, plus que les précédents de Naomi Kawase, laisse une sensation étrange, ambiguë. Il y a une quête spirituelle, l’envie d’un retour à la nature et d’y explorer ses mystères, à rebours d’un mode de vie moderne urbanisé qui court à sa perte, qui donne l’envie de s’exalter. Mais, à la fois, une maladresse incompréhensible, qui fait naître par ses personnages un sentimentalisme parfois dérisoire ; à l’image de Juliette Binoche, inhalant, le nez en l’air, les yeux fermés, qui se remémore son amour passé qu’elle rencontra vingt ans plus tôt dans cette même forêt ; qui crispe les nerfs et détache progressivement l’attention du film.
Ici Naomi Kawase filme sa région natale, près de Nara au Japon. Elle emmène avec elle Juliette Binoche, en écrivaine française venue chercher, à part les traces d’un bonheur passé, une plante médicinale rare. Elle rencontre alors un garde-forestier reclus, incarné par Masatoshi Nagase, dont c’est la troisième collaboration avec la cinéaste, qui va la laisser s’installer chez lui le temps de pouvoir accomplir ses recherches.
- © 2018 LDH JAPAN, SLOT MACHINE, KUMIE INC.
La forêt est filmée comme un écrin, une bulle dans laquelle le temps même se dilate et devient une boucle puisque Jeanne est ramenée, lors de flashback éthérés, vingt ans en arrière. Après Les Délices de Tokyo et Vers la lumière, la cinéaste délaisse l’environnement urbain pour la nature mystique, et fait une passerelle avec un autre de ses films, La Forêt de Mogari, Grand Prix du Festival de Cannes en 2007, dans lequel il s’agissait déjà de se perdre en forêt pour retrouver la sensation d’être vivant.
Dans Voyage à Yoshino, c’est donc par les yeux d’une étrangère, la Française Juliette Binoche, que se découvrent ces paysages verts percés des rayons d’or du soleil, parfois le tout filmé au drone. Mais ainsi, plutôt que d’y être immergé, la sensation d’une carte postale filmée ou d’un film commandé par l’Office du tourisme local s’impose peu à peu au spectateur, et désamorce totalement la quête spirituelle de personnages vivant leurs traumatismes comme un poids dont il faut se libérer, mais qui ne sont que théoriques, comme restés coincés dans les pages du scénario.
Alors, quand Naomi Kawase se laisse aller à devenir encore plus mystique, ou bien sentimentale, l’équilibre déjà bien précaire du film s’effondre, bien que l’on aurait voulu s’y perdre, dans cette forêt.
- © 2018 LDH JAPAN, SLOT MACHINE, KUMIE INC.
De ce film qui bien vite après la projection s’évapore, ne restent que quelques images d’une nature à protéger, dont l’on voudrait se faire un abri pour le reste de nos jours, et l’on se prend alors à maudire ce rendez-vous manqué avec une artiste que l’on avait connu plus inspirée.
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