Le 30 juillet 2021
- Réalisateur : Naomi Kawase
- Acteurs : Hiromi Nagasaku, Arata Iura, Aju Makita, Taketo Tanaka, Miyoko Asada
- Titre original : 朝が来る (Le matin arrive)
- Distributeur : Haut et Court
- Genre : Drame
- Nationalité : Japonais
- Date de sortie : 28 juillet 2021
- Durée : 2h19mn
- Titre original : 朝が来る (Le matin arrive)
- Festival : Festival de Cannes 2020, Toronto International Film Festival, Festival de San Sebastian 2020
Traitant un sujet difficile avec nuance et délicatesse, Naomi Kawase réalise avec True Mothers un drame sur la maternité à la fois personnel et sensible, mais qui, malheureusement, confine parfois au téléfilm.
Résumé : Satoko et son mari sont liés pour toujours à Hikari, la jeune fille de quatorze ans qui a donné naissance à Asato, leur fils adoptif. Aujourd’hui, Asato à six ans et la famille vit heureuse à Tokyo. Mais Hikari souhaite reprendre contact avec la famille, elle va alors provoquer une rencontre…
Critique : La thème de la famille recomposée au-delà des liens de sang travaille le cinéma japonais contemporain. A l’instar d’Hirokazu Kore-eda dans Tel père, tel fils (2013) ou de Kōji Fukada, Naomi Kawase, cinéaste inégale, interroge à son tour, dans son dixième long-métrage, ce sujet de société, en traitant des chemins tortueux de l’adoption.
- Copyright : Haut et Court
Elle nous raconte ainsi l’histoire romanesque d’un couple souffrant d’infertilité, qui a adopté un garçonnet et en voit débouler, six ans plus tard, la mère biologique : or, celle-ci prétend obtenir du couple, en échange de son silence, une compensation pécuniaire. Car, dans un Japon où les traditions sont encore fortes, l’adoption n’est pas totalement acceptée, et est même souvent cachée en dehors de la famille.
Même si True Mothers est long comme un parcours d’adoption et qu’on y retrouve les habituels plans de communion panthéiste dans une nature inondée de lumière, la poésie contemplative de Naomi Kawase est moins insistante et auteuriste que d’ordinaire : on y trouve même une âpreté rare dans son cinéma, habituellement plus enclin aux atmosphères éthérées.
- Copyright : Haut et Court
De fait, la réalisatrice narre, à parts égales, deux trajectoires de vie qui ont mené à une adoption, laissant la place, chez le spectateur, tant à la rêverie qu’à la réflexion. Néanmoins les plans, surprenants chez Kawase, de l’appartement moderne du couple, tournés dans la baie de Tokyo sur le site du futur village olympique, font naître d’emblée chez le spectateur le sentiment d’une asymétrie sociale entre les protagonistes.
Car les deux histoires n’en forment qu’une seule : d’un côté, un couple découvre sa stérilité, échoue à concevoir un enfant à l’aide de la procréation assistée et prend la difficile décision d’adopter, quand, de l’autre, les amours trop précoces d’une adolescente de quatorze ans l’amènent, après qu’elle a accouché loin de chez elle, à abandonner son nouveau-né sous la pression de sa famille. Or, le nourrisson sera recueilli par le couple stérile, de sorte qu’en apparence, une vie viendra d’être gâchée, une autre sauvée et une troisième comblée.
- Copyright : Haut et Court
Pourtant, plutôt que de réaliser un film à thèse, Naomi Kawase préfère questionner par ce dispositif, comme l’indique le pluriel du titre, deux rapports à la maternité, celui de la mère biologique qui, se retrouvant exclue de l’équation familiale, voit se prolonger le déni qui a entouré sa grossesse, et celui de la mère adoptive qui accède certes au bonheur, mais au prix d’un sentiment d’imposture.
Et pour ancrer davantage son propos dans le réel, la réalisatrice revient à la forme de ses débuts, comme dans son documentaire à la première personne Naissance et maternité sorti en 2006, en se plaçant régulièrement à la lisière entre la fiction et le reportage. Aussi s’immerge-t-elle notamment, sur l’île d’Hiroshima, dans un refuge pour « fille-mères » (qui sont en réalité parfois des prostituées) forcées de cacher leur grossesse et de destiner leur enfant à l’adoption : elle donne alors à voir des images prises sur le vif, dans lesquelles on l’entend s’entretenir directement avec ses personnages.
- Copyright : Haut et Court
Le film aurait été une totale réussite si la bande originale et certains dialogues ne l’orientaient pas parfois vers le mélodrame : de même, en s’efforçant d’éclairer et de dénouer le présent à la lumière du passé, le montage réalisé par la Française Tina Baz se perd dans un entrelacement quelque peu compliqué de flashback et de flashforwards qui alternent au gré des changements de points de vue.
On n’en retiendra pas moins quelques moments de grâce où la caméra saisit, gestes peu courants et donc précieux dans la société japonaise, des mains qui se joignent, s’étreignent ou se caressent. Car il faut bien reconnaître que ce nouveau long-métrage de Naomi Kawase, elle-même abandonnée, puis adoptée par son grand-oncle et sa grand-tante, est, par instants, profondément émouvant.
Caméra d’Or en 1997 pour Suzaku, Grand Prix en 2007 pour La forêt de Mogari, Naomi Kawase devait, avec True Mothers, concourir l’an dernier dans la compétition du Festival de Cannes : dans la mesure où ce dernier a été annulé en raison de la situation sanitaire, le film a reçu le label officiel Cannes 2020. Un parcours qui lui a permis d’être désignée comme la réalisatrice du documentaire officiel sur les Jeux Olympiques de Tokyo.
Galerie Photos
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.