A cœur ouvert
Le 4 septembre 2014
A la croisée des genres, oscillant entre romance et film noir, Tonnerre révèle surtout un vrai talent de réalisateur.
- Réalisateur : Guillaume Brac
- Acteurs : Bernard Menez, Vincent Macaigne, Solène Rigot
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Français
- Editeur vidéo : Wild Side Video
- Durée : 1h40mn
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Sortie DVD : 3 septembre 2014
Après Un monde sans femme, Guillaume Brac nous livre une fable sur la passion amoureuse et la reconstruction par l’Autre entre humour et pathos, le tout nimbé d’une douce mélancolie. Simple et beau, Tonnerre, loin de gronder, traverse doucement les affres de l’hiver entre violence et tendresse.
L’argument : Un rockeur trop sentimental, une jeune femme indécise, un vieux père fantasque. Dans la petite ville de Tonnerre, les joies de l’amour ne durent qu’un temps. Une disparition aussi soudaine qu’inexpliquée et voici que la passion cède place à l’obsession.
Le film : Tourné dans la petite ville de Tonnerre non loin d’Auxerre, qui a donné son nom au film, ce premier long de Guillaume Brac est tout entier habité par la poésie de ce lieu entre deux mondes et entre deux âges où la neige tombant sur les protagonistes nous plonge dans un état de douce mélancolie. On pourrait presque parler de film naturaliste, même si le terme est un peu réducteur, où ces paysages de Bourgogne, cette forêt secrète, cette vie de "village" sont opposés à un hors-champ parisien que le héros a fuit pour retrouver le calme et l’inspiration. Tonnerre coule pendant 1h40 dans une sorte de flottement contemplatif grâce à son sens aigu du rythme et du phrasé de ses personnages sur fond de rencontre amoureuse et de conflit larvé entre père et fils. Extrêmement épurée, l’oeuvre semble se chercher, et se découvre, tout comme les personnages, tout au long du film, sans chercher à tout prix une résolution. Brac ne dicte pas une façon de voir le monde, il la partage et laisse le spectateur très libre dans son interprétation. Vincent Macaigne (La bataille de Solferino) livre une composition toute en nuances et glisse progressivement vers l’obsession pour cette jeune femme qu’il rêve comme une muse innocente incarnée par l’intuitive Solène Rigot (Lulu femme nue). Sous le verni du rockeur et du boute-en-train se cache l’homme rongé par la solitude qui ne demande qu’à aimer d’un amour inconditionnel. La femme, elle, très jeune et donc en pleine constitution de son identité, s’abandonne mais résiste, et amènera paradoxalement à la résolution du conflit interne du héros. Brac filme des êtres qui se rencontrent dans un temps de leur existence où cela semble encore possible, mais insiste justement sur la fugacité du bonheur et de l’état amoureux, ce qui offre au film une véritable complexité. A la fois beau et déchirant, Tonnerre trouve son apogée lorsque le couple, isolé et ébranlé après une phase de "non retour", se retrouve justement et s’embrasse dans la neige, entouré d’arbres. Rien d’autre autour que le silence et la forêt, comme si la passion devenait secrète, à la frontière du monde des hommes. L’espace d’un instant, on croirait voir Adam et Ève, le premier homme et la première femme, dans un jardin d’Eden blanc les lavant de toute trace de péché. Faire table rase du passé, réparer les fêlures et entrevoir un nouvel horizon : le film nous enseigne, entre autre, l’espoir et la compassion. Fragile et bouleversant, tout simplement.
La critique : ICI
Les suppléments :
*"Conversation un soir d’été sur un film d’hiver" (25 mn) : L’équipe du film revient sur son travail avec la grande place accordée à la photographie et au montage en la présence de jeunes réalisateurs. On aurait aimé que ces derniers soient un peu plus actif. Après l’évocation de la collaboration fructueuse en terme d’échange d’idées entre Macaigne et Brac, la conversation tourne vite autour de l’objet cinéma et de la manière de le concevoir. La part belle est accordée au rythme, à la musicalité des dialogues, à la poésie du réel et à l’accident... Intéressant mais un brin trop intello. Peut-être est-ce parce qu’il manque une étoile et un doyen : Solène Rigot et Bernard Menez, non présents lors de la captation.
*10 scènes coupées (avec ou sans commentaires du réalisateur et du monteur) qui nous informent sur la vision du film dans son ensemble, le processus créatif, le rythme, la difficulté de couper, en bref à comment arriver à un film épuré mais substantiel sans ennuyer le spectateur. On comprend pourquoi le montage aura été si long et pris autant d’énergie.
*Insolite, quelques bouts d’essai de Solène Rigot donnant la réplique à Macaigne, qui semblait d’emblée être faite pour jouer le rôle de Mélodie.
*le scénario original sur votre écran de télé, intéressant pour comprendre le découpage.
L’image :
Format 16/9eme compatible 4/3. Bon rendu global et un bon contraste qui met en relief l’opposition entre aspects sombres et lumineux du film. On peut également noter une belle profondeur de champ et une qualité nickel chrome (image pleine et lumineuse qui permet d’apprécier à sa juste valeur la beauté des décors naturels) lors des scènes en extérieur dans la neige. On regrettera juste un léger scintillement au niveau des noirs (le pull du père prend des allures surréalistes) et un certain manque de luminosité lors des scènes en intérieur et extérieur nuit.
Le son :
Le moins qu’on puisse dire est qu’il ne faut pas être dur de la feuille et posséder un téléviseur correct avec le son poussé au maximum afin de comprendre les dialogues. Ces derniers pèchent en terme de puissance et ne sont pas toujours d’une grande clarté, surtout en 2.0. Bien que cela accentue d’une certaine manière le charme feutré du film, très intérieur, où tous les dialogues ne sont pas nécessairement destinés à être hyper audibles pour le spectateur tant ils semblent concerner l’intimité des personnages, il y a là un vrai manque et c’est bien dommage. Cependant, le mixage entre musique et son reste très correct et l’on peut profiter sans modération de l’extraordinaire B.O du film.
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