L’enfer vert
Le 30 janvier 2021
En gardant tout son génie intact, James Gray se réapproprie un genre tombé en désuétude pour nous offrir le magistral portrait d’un explorateur porté par sa soif d’aventure.
- Réalisateur : James Gray
- Acteurs : Sienna Miller, Charlie Hunnam, Robert Pattinson, Tom Holland, Angus Macfadyen, Alan Napier, Edward Ashley (2)
- Genre : Aventures
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Universal - StudioCanal
- Durée : 2h20mn
- Date télé : 12 novembre 2024 22:25
- Chaîne : Ciné+ Premier
- Date de sortie : 15 mars 2017
- Festival : Luxembourg City Film Festival
Résumé : L’histoire vraie de Percival Harrison Fawcett, un des plus grands explorateurs du XXe siècle. Percy Fawcett est un colonel britannique reconnu et un mari aimant. En 1906, alors qu’il s’apprête à devenir père, la Société géographique royale d’Angleterre lui propose de partir en Amazonie afin de cartographier les frontières entre le Brésil et la Bolivie. Sur place, l’homme se prend de passion pour l’exploration et découvre des traces de ce qu’il pense être une cité perdue très ancienne. De retour en Angleterre, Fawcett n’a de cesse de penser à cette mystérieuse civilisation, tiraillé entre son amour pour sa famille et sa soif d’exploration et de gloire…
Critique : Pour sa sixième réalisation, et c’est une première, le cinéaste James Gray délaisse le cadre de sa chère et tendre ville de New York pour s’orienter vers l’Angleterre du tout début du 20e siècle. Celà afin de mettre en scène cette adaptation cinématographique du roman La cité perdue de Z écrit par David Grann. En ces pages, on suivait les aventures de Percy Fawcett, célèbre explorateur britannique, militaire de métier, disparu mystérieusement au fin fond de la jungle sud-américaine. Dans l’héritage de chefs-d’œuvre intemporels de la trempe d’Apocalypse Now et Aguirre, la colère de Dieu, le dernier long-métrage de James Gray se pare d’un scénario foisonnant construit autour des allers-retours de Percy Fawcett (Charlie Hunnam) entre son foyer et le cœur de la jungle amazonienne (sans compter une parenthèse dans les tranchées de la Somme).
- Copyright StudioCanal
À la fois film d’aventure à l’ancienne de par les choix de mise en scène (chez James Gray, la réalisation, bien que de tradition classique, demeure toujours aussi impressionnante de maîtrise), quête obsédante d’une civilisation perdue et introspection profonde d’un homme qui court derrière la reconnaissance, The Lost City of Z abrite une expérience vaste, d’une ampleur incomparable (quel travail de dramaturgie !). L’une des premières scènes, parfaitement établie, présentant une chasse à courre, va ainsi conditionner tout le reste du film. Elle symbolise la quête dans laquelle est sur le point de se lancer le personnage de Percy Fawcett, focalisé sur ce qu’on lui demande d’atteindre. Ce dernier aspire à s’élever socialement dans le but de laver l’honneur de son nom, autrefois sali par un père joueur et alcoolique. Lorsqu’on lui propose de partir cartographier une zone nébuleuse de la jungle bolivienne, il y voit une occasion parfaite pour établir le nom de Fawcett au sein de la société anglaise. Joué par un Charlie Hunnam qui se livre corps et âme dans le rôle (confirmant au passage tout son potentiel), l’explorateur sait qu’il sera jugé sur ses résultats, ce qui l’entraîne à dédoubler sa soif d’aventure (au risque de l’aveugler). De fait, enjeux, motivations et dilemmes apparaissent parfaitement cernées, ce qui favorise encore un peu plus l’immersion.
- Copyright StudioCanal
Alors que chaque scène absorbe toujours un peu plus le spectateur, les séquences de jungle se distinguent, elles, par leur côté éprouvant. L’expédition devra en effet faire face à de violentes attaques d’autochtones (parfois cannibales !) quand ce ne sont pas pas les serpents, les piranhas, le manque de vivres ou autres cours d’eau instables qui causent du tort. Sans compter qu’autour de cela, l’épuisement et la folie guettent. Heureusement, Charlie Hunnam a la chance d’être épaulé par un Robert Pattinson d’une loyauté à toute épreuve (l’ancien jeune premier de Twilight continue de nous éblouir après des prestations déjà plus que saisissantes dans The Rover, Maps to the stars, Cosmopolis et Life). L’inconfort des personnages en ces lieux inhospitaliers réussit à générer un impact puissant sur le spectateur. Sans parvenir à toucher à ce qu’il croit devenir son but, Fawcett ne voit pas pour autant ses convictions s’ébranler par le retour au pays. Convaincu par l’existence d’une mythique citée perdue qu’il nommera lui-même « Z », il n’hésitera pas à repartir au fin fond de la jungle afin de prouver ses dires quoi qu’il en coûte.
- Copyright StudioCanal
Il est intéressant de constater qu’en parallèle, Fawcett a aussi d’autres obligations, et se doit d’assurer son rôle de mari et père de famille (sa femme au grand sens du sacrifice est interprétée par l’actrice Sienna Miller). Lorsqu’il revient dans son foyer, après plusieurs années de voyage, il a du mal à communiquer avec ses enfants qu’il n’a pas vu grandir. Son statut d’homme viril mais absent et pas très causant l’entraînera vers des rapport conflictuels avec l’aîné. Rapports qui glisseront néanmoins vers un rapprochement vecteur d’émotions dans un dernier acte tâtonnant vers une dimension aux accents quasi fantastiques.
Grand film plein d’esprit traitant des rêves et désillusions d’un homme, The Lost City of Z est appelé à figurer dans le top de la filmographie de James Gray. Le réalisteur new-yorkais, toujours à la hauteur de sa réputation, est bien l’un des cinéastes les plus doués et passionnants de sa génération.
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evy.1883 28 mars 2017
The Lost City of Z - James Gray - critique
Belle critique à laquelle je souscris complètement. La quête et le vertige de l’échec, intrinsèquement liés, sont l’écrin idéal au génie de James Gray.
Il ilustre ainsi un thème intemporel : peu importe que l’on atteigne son Idéal, l’essentiel réside dans le cheminement intérieur effectué lors de la recherche de ce dernier...