Evil Cult vs Wu Tang
Le 24 décembre 2019
Un wu xia pian fantasy emblématique, tant par ses qualités que dans ses excès, de l’âge d’or du cinéma hong-kongais et qui, sans être incontournable, réjouira les amateurs du genre.


- Réalisateur : Ronny Yu
- Acteurs : Leslie Cheung, Brigitte Lin Ching-hsia, Francis Ng, Elaine Lui
- Genre : Fantastique, Action
- Distributeur : Splendor Films
- Durée : 1h32mn
- Titre original : 白髮魔女傳
- Date de sortie : 25 décembre 2019

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Résumé : Lian a été élevée par des loups. C’est aujourd’hui une sorcière redoutée. Lorsqu’elle se retrouve face à un jeune guerrier membre du clan ennemi, c’est le coup de foudre.
Notre avis : Il aura fallu attendre vingt-six ans pour voir enfin sur les écrans français ce film aujourd’hui devenu culte. Pourtant, lorsque Raymond Wong, le directeur de la compagnie Mandarin Films, décida de produire une nouvelle adaptation du roman La Fiancée aux cheveux blancs de Liang Yusheng, son ambition était de briser l’image de production locale dont souffrait le cinéma de Hong Kong en Occident et de mettre l’accent sur les productions values : il ne lésina pas, ainsi, sur les décors baroques, les costumes fastueux et le scope afin de calibrer son film pour le marché et les festivals étrangers.
- Copyright : Splendor Films
C’est pourquoi il conçut, afin d’introduire une filiation avec Histoire de fantômes chinois, un film en costumes mâtiné d’heroic fantasy et, tout en réduisant les scènes d’action très en vogue à l’époque, fit le choix d’un récit chinois qui puisse, afin de rendre le film plus accessible, entrer en résonance avec des références européennes, en l’occurrence Roméo et Juliette. Pourtant, malgré un Grand prix au Festival de Gérardmer, le film ne s’imposera pas comme une référence en Occident, mais sera aussi et surtout noyé, à Hong Kong, dans la vague des néo-wu xia pian.
- Copyright : Splendor Films
L’intrigue est, de fait, très classique : comme l’indique le titre international alternatif du film, Jiang-Hu, qui signifie littéralement « Rivières et lacs », les personnages appartiennent à la société parallèle des arts martiaux. Dans le film, s’affrontent plus précisément les taoïstes du Wu Tang et les membres d’un culte païen dirigé par de terribles siamois, diaboliquement interprétés par Francis Ng et Elaine Lui : les deux personnages principaux, qui appartiennent chacun à l’un de deux clans, vont s’aimer, malgré la haine qui oppose ces derniers. Comme c’est la mode à l’époque, les combats sont virevoltants et défient les lois de l’apesanteur, les dialogues sont quelque peu verbeux et les effets spéciaux reposent sur un jusqu’au-boutisme décomplexé qui fait cohabiter le kitsch et de véritables trouvailles esthétiques : et l’ensemble est bien entendu intégralement filmé dans des studios, où les canons à fumées et les projecteurs, diffusant des lumières rouges et bleues très contrastées, ont donné à tous les films de cette époque leur inimitable cachet.
- Copyright : Splendor Films
Même le casting est d’ailleurs à l’image de l’industrie du cinéma de l’archipel au début des années 90, puisqu’il réunit Lin Ching-hsia et Leslie Cheung, les deux acteurs les plus iconiques de l’époque. Ronny Yu, qui n’était jusqu’au Maître d’armes que l’homme de ce seul et unique film, semble, de même, avoir été choisi par la production comme un artisan efficace et malléable. Il réussit pourtant le tour de force de conférer à son film une dimension, pour ainsi dire, métapoétique.