Le 1er décembre 2019
Aussi tarte que l’expression "vivre ensemble", dont elle est l’illustration, cette comédie des inénarrables Toledano et Nakache est le prototype même du cinéma bourgeois.
- Réalisateurs : Éric Toledano - Olivier Nakache
- Acteurs : Vincent Elbaz, Isabelle Carré, Jean Benguigui, Lionel Abelanski, Omar Sy, Audrey Dana, François-Xavier Demaison, Joséphine de Meaux , Catherine Hosmalin, Renée Le Calm, Wahid Bouzidi
- Nationalité : Français
- Distributeur : Mars Distribution
- Durée : 1h42mn
- VOD : Amazon Video, Apple iTunes
- Date télé : 26 juillet 2024 23:10
- Chaîne : Arte
- Date de sortie : 17 juin 2009
Critique : Quand on cartographiera le territoire de la comédie bourgeoise des années 2000 et 2010, on se souviendra que Toledano et Nakache, solidement arrimés à leur morale familialiste et à leur bien-pensance sociétale, en ont été les figures de proue et continuent de l’être.
Apôtres du « vivrensemble », les deux réalisateurs ne cessent de le rappeler : ce qui nous unit étant tellement plus fort que ce qui nous sépare, les grandes déclarations sont promptes à tout résoudre, comme les petits gestes de la vie courante. En d’autres termes, ainsi que le chantait France Gall - sans doute une influence -, « on est trop faibles pour se détester ». A cette aune, les aveux métaphoriques de Roxane à Bruno, dont la connotation apicole ne mériterait pas une mention, si elle ne s’accommodait du grotesque le plus achevé, rappellent à quel point les abeilles peuvent autant piquer que faire du miel. Petites abeilles que nous sommes, nous ferions donc bien de choisir le chemin des fleurs. Amen.
La comédie est alignée sur ses répliques, que pourrait revendiquer n’importe quel bréviaire de développement personnel, prolongeant ses séquences d’abord lourdingues, puis franchement tartes, à mesure que le sirop des hyménoptères se répand. Le film semble si sûr de sa bonne conscience qu’il convole avec ses comédiens, dans un entre-soi qui sent la tartuferie à plein nez. Tout ce petit monde est réuni autour des mêmes intentions, privilégiant de semblables réactions outrées (exemplairement dans l’interminable scène du repas familial). Demaison, Elbaz, Sy et compagnie font partie de ces acteurs qu’un tel film rend interchangeables : un divertissement franchouillard comme Le prénom aurait aussi bien pu les accueillir, avec les mêmes caricatures, les clichés les plus gras, des quiproquos boulevardiers, et une moraline alignée sur un global ethos petit-bourgeois, qui s’incarne notamment dans le personnage de Jean-Pierre. Avocat au service des pauvres, bientôt au service de quelques relégués de la banlieue, il toise des jeunes évidemment réduits à des stéréotypes, souvent capables de s’énerver, moins de comprendre ce qu’on leur explique autour d’une table de ping-pong. Les enjeux sociaux étant ignorés selon l’évidence de notre humanité tout entière, riches, pauvres, Blancs, Noirs sont invités à fraterniser d’après leur humaine condition. Il suffit simplement que chacun, chacune y mette de la bonne volonté.
Ce pensum, qui démarre lourdement sur un parking et s’achève en stand-up sur une scène, saisit l’air du temps, imprégné de ces injonctions sociétales qui éludent les rapports de domination : chez Toledano et Nakache, comme dans Pretty Woman, tout devient possible. Ainsi, une ouvrière de la grande distribution pourra séduire un interne en médecine, lui demander de lui faire un enfant, profiter évidemment d’une coupure d’électricité pour l’embrasser. Les deux Pangloss de la caméra peuvent bien croire que le monde est ainsi envisageable et anesthésier le public à coups de seringues hypodermiques, aucun spectateur, aucune spectatrice lucide ne pourra accorder un quelconque crédit à ce qu’ils racontent, ni un quelconque accessit à leurs gags pesants.
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roger w 20 juin 2009
Tellement proches - la critique du film
Après une bonne heure franchement hilarante, les deux cinéastes ont le malheur de ne pas assumer le caractère rageur de leur comédie et finissent leur métrage comme bon nombre de films américains : avec des happy-ends à répétition qui gachent l’intégralité du spectacle. Avec son final ridicule, "tellement proches" devient un hymne à la beaufitude, plutôt exaspérant. On n’est pas loin de quitter la salle. Quel dommage, tant le début était savoureux !