Le 2 février 2021
Adapté du roman éponyme de Ian McEwan, Sur La Plage de Chesil est un drame psychologique d’une violence sourde sur la déliquescence d’un couple victime du puritanisme de l’Angleterre élisabéthaine. Saoirse Ronan est saisissante d’humanité.
- Réalisateur : Dominic Cooke
- Acteurs : Emily Watson, Anne-Marie Duff, Saoirse Ronan, Samuel West, Billy Howle, Adrian Scarborough
- Nationalité : Britannique
- Distributeur : Mars Distribution
- Durée : 1h50mn
- Titre original : On Chesil Beach
- Date de sortie : 15 août 2018
Résumé : 1962. Dans une Angleterre encore corsetée par des conventions sociales étouffantes, Florence et Edward, la petite vingtaine, viennent de se marier. Aussi inexpérimentés l’un que l’autre, ils passent leur première nuit ensemble dans un hôtel guindé sous l’œil un rien moqueur du personnel. Totalement tétanisés à l’idée de faire le moindre faux-pas, ils se souviennent, chacun, de leur rencontre. Florence, brillante violoniste élevée dans une famille fortunée et conservatrice, était tombée sous le charme d’Edward, aspirant écrivain issu d’un milieu plus modeste…
- (C) Robert Viglasky
Critique : Sur La Plage de Chesil pourrait se substituer à un flot d’émotions aussi antinomiques que subsidiaires, semblable à ce que le sentiment amoureux peut évoquer au plus profond de notre être. Adapté du roman éponyme de Ian McEwan, le film se concentre uniquement sur une rencontre idyllique, presque utopique, d’Edward Mayhew, un étudiant en histoire ayant évolué dans un milieu modeste, et Florence Ponting, une violoniste issue d’une famille bourgeoise, au sein d’un environnement marqué par la discrimination sociale et le puritanisme.
- (C) Robert Viglasky
L’originalité de la narration est d’assister, impuissant, à la déliquescence de ce couple que l’on croyait en totale harmonie en une seule journée seulement, qui plus est celle précédant la nuit de noces. Dans une Angleterre encore étriquée par un ordre social conservateur et insidieusement fascisant, toute une jeunesse britannique, obstruée quant à la sexualité et l’impact de celle-ci sur l’éveil spirituel de chacun, se retrouve victime d’un déterminisme culturel fascisant. Ce couple, d’abord enclin à la compréhension mutuelle, va peu à peu s’adonner à une forme d’autodestruction officieusement exutoire. Les deux s’envient, refoulent leurs désirs, tentent une approche pour mieux s’éloigner ensuite. Cette lune de miel, on l’aura compris, va connaître une altérité salutaire, entre une scène de préliminaires assez démonstrative du malaise ambiant et l’irruption de souvenirs passés, surtout présents pour désenclencher de façon exponentielle une liaison qui avait si bien débuté. Il se dégage de cette nuit de noces une sensation assez étrange, un savant mélange entre une cruauté sourde et une élégance propre au romanesque, comme rarement un long métrage a osé y mettre des mots.
Il en résulte une histoire teintée de frustration, mais aussi de méditation, sur ce que le non-dit, la peur dissimulée, l’inhibition intériorisée, peuvent contenir de plus dévastateur. En somme, Sur La Plage de Chesil est une œuvre sensible, imposante et d’une clairvoyance stupéfiante quant à l’incompatibilité entre le corps social et l’épanouissement individuel. Voilà une histoire d’amour des plus passionnantes, porte-étendard d’un commentaire social sous-jacent, fondé sur une maîtrise thématique inviolable, que le cinéaste Dominic Cooke compose tel un maelström de sensations uniques et profondément spirituelles.
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.
ceciloule 27 août 2018
Sur la plage de Chesil - Dominic Cooke - critique
Une beauté picturale et sentimentale, je suis bien d’accord. En ce qui concerne les sauts dans le temps, je les trouve au contraire bien dosés et ils confèrent à ce film un rythme que l’on apprend à aimer. La maladresse de la nuit de noces en est d’autant plus frappante, ainsi entrecoupée.
Les maquillages sont, certes, décevant, mais c’est pour moi l’une des rares fausses notes de la mise en scène. Les non-dits et les suggestions, par contre, sont peut-être justement trop implicites pour un spectateur n’ayant pas lu le roman de McEwan... Un très bon et beau film malgré tout !
Pour en savoir plus sur mon avis : https://pamolico.wordpress.com/2018/08/27/lamour-nest-pas-simple-sur-la-plage-de-chesil-dominic-cooke/