Super témoin - La critique + Le test DVD

Une comédie un peu bancale qui vaut surtout par ses interprètes, Ugo Tognazzi et Monica Vitti.

L’argument : Quand une prostituée dont il est le souteneur est assassinée, c’est tout naturellement que Marino Bottechia dit "Mocassino" est suspecté. Accusé par Isolina Pantò, témoin du crime, il est condamné à 20 ans de prison. Derrière les barreaux, il reçoit régulièrement la visite d’Isolina, qui non contente de l’épouser, va tout mettre en oeuvre pour le faire libérer...


Notre avis : Ecrit par de grosses pointures de la comédie italienne (Tonino Guerra et Ruggero Maccari, assistés par Luisa Montagnana) La supertestimone est un film curieux et quelque peu décousu qui parodie plusieurs genres (policier, film sur la prostitution, film de prison) et dont le scénario assez lâche ménage quelques retournements de situation inattendus (ou trop attendus).

Les dialogues sont souvent savoureux (Isolina, vantant les mérites de la vie carcérale qui laisse temps et disponibilité pour les études trouve que pour obtenir un diplôme d’ingénieur quatre ans de prison c’est trop court) et quelques formules, répétées à l’envie, font mouche (Il corpo può aspettare - Le corps peut attendre pour inciter Marino à l’abstinence) mais le ton général est assez indécis et passe aisément de la farce un peu lourde à une certaine gravité (la description crue de l’univers carcéral, la pirouette finale). 

Le film appartient à la période comédie du cinéaste triestin Franco Giraldi qui avait débuté dans le western spaghetti sous le pseudo de Frank Garfield et se spécialisera bientôt dans les adaptations littéraires (Soldati, Quarantotti Gambini, Stuparich) au cinéma et à la télévision. Sa mise en scène est soignée mais passe-partout et ne réussit pas à donner un style à l’ensemble ni à éviter toujours la vulgarité. Mais l’entreprise visait bien sur avant tout à réunir les noms de deux stars indiscutables du genre qui s’amusent (et nous avec) à composer des personnages hauts en couleur.

Tognazzi est à son meilleur en maquereau jaloux surnommé Mocassino parce qu’il collectionne les chaussures, mais qui sous ses dehors de matou inoffensif et souvent ridicule révèle plus d’une fois une face cachée fort inquiétante. Quant à la Vitti, elle réunit plusieurs rôles en un seul, le film lui fournissant le prétexte à plusieurs métamorphoses spectaculaires. On ne peut qu’être admiratif face au génie comique d’une actrice qui sait en faire des tonnes sans avoir l’air d’y toucher et rendre gracieuses et émouvantes les figures les plus caricaturales. Son Isolina Pantò, aussi irrésistiblement drôle en vieille fille hystérique qu’en amoureuse transie, ne dépare pas la brillante galerie de rôles qui, de La Tosca (Luigi Magni) à Ninì Tirabusciò la donna che inventò la mossa (Marcello Fondato) et tant d’autres, ont fait d’elle la seule véritable protagoniste féminine de la commedia all’italiana.
La supertestimone - Franco Giraldi

Le DVD

La supertestimone - Franco Giraldi

Paru le 17 août 2011, le DVD de Super-témoin - La supertestimone fait partie de la sixième vague des Maîtres italiens publiée par M6video.

Les suppléments

Le seul véritable complément, mais de choix, est un documentaire intitulé 1001 Monica dans lequel Sandro Lai et Daniele Piccioni dressent un portrait attachant de l’actrice qui chez Antonioni, Monicelli, Losey et tant d’autres a su allier un métier sûr (solide formation théâtrale) à une sensibilité à fleur de peau et à un véritable génie comique : la grande classe en somme. Le film est riche en précieux documents audiovisuels (par exemple un reportage fait pendant le tournage et lors de la présentation cannoise de l’Avventura ou une interview mise-en-scène, très drôle, au moment de la sortie de Modesty Blaise) et en témoignages (De Sica, Eduardo de De Filppo...). Il s’appuie surtout sur de nombreuses et passionnantes interventions de l’actrice. Celle-ci explique notamment, à propos de la perruque mise à l’envers de La ragazza con la pistola, comment les personnages arrivent d’eux-mêmes.

Image

La copie a été à l’évidence bien restaurée (belle colorimétrie) et l’encodage ne présente pas de défauts notables. On peut donc apprécier dans d’excellentes conditions l’admirable travail du chef opérateur Carlo di Palma.

Son

Certes Monica Vitti a toujours su jouer de sa voix légèrement éraillée mais ici elle semble avoir un chat dans la gorge et les stridences de la musique de Luis Bacalov sont dues à l’évidence à un problème technique (mauvais défilement de la bande ?) dont on s’étonne qu’il n’ait pas pu être résolu. Quant à la version française, elle nous transpose dans une série télé des années 70 et enlève beaucoup de son sel à la comédie.