Le 11 août 2021
Brûlant d’amour, d’une dureté éblouissante, ce premier roman est un coup de poing, porté par une voix douce, celle d’un enfant qui aime sa mère plus que tout.


- Auteur : Douglas Stuart
- Editeur : Éditions Globe
- Genre : Roman
- Nationalité : Ecossaise
- Traducteur : Charles Bonnot
- Date de sortie : 18 août 2021
- Plus d'informations : Le site de l’éditeur

L'a lu
Veut le lire
Résumé : Glasgow, années 1980, sous le règne de fer de Margaret Thatcher. Agnes Bain rêvait d’une belle maison bien à elle, d’un jardin et d’un homme qui l’aime. À la place, son dernier mari la lâche dans un quartier délabré de la ville où règnent le chômage et la pauvreté. Pour fuir l’avenir bouché, les factures qui s’empilent, la vie quotidienne en vrac, Agnes va chercher du réconfort dans l’alcool, et, l’un après l’autre, parents, amants, grands enfants, tous les siens l’abandonnent pour se sauver eux-mêmes. Un seul s’est juré de rester, coûte que coûte, de toute la force d’âme de ses huit ans. C’est Shuggie, son dernier fils.
Critique : Shuggie naît à Sighthill, en Ecosse, à la fin des années 1970 – comme Douglas Stuart. Sa mère s’est remariée à un protestant, entraînant avec elle deux enfants catholiques – Catherine et Leek. Shuggie est le petit dernier, celui qui a besoin d’être couvé, rassuré, protégé. Il est souvent dédaigné par ses deux aînés qui préfèrent s’échapper du foyer familial étouffant, ayant compris, des années avant lui, que rien de bon, de doux, de chaud ne pouvait s’en échapper, qu’Agnes Bain n’est qu’une alcoolique et ne sera jamais rien d’autre – pas même leur mère, pas vraiment. De sa précédente maison à l’appartement de ses parents, de celui-ci à une triste maison à Pithead, quartier minier, Agnes traîne, comme un boulet trop lourd mais aussi réconfortant, son addiction et ses Special Brew – La bière et son goût amer tapissent son palais à toute heure du jour et de la nuit.
Shuggie grandit peu à peu, apprend lui aussi à ruser, à cacher la monnaie nécessaire aux courses, mais il est indulgent, toujours, gentillesse incarnée, délicatesse trop délicate pour ces quartiers miséreux encore plus misérables alors que Margaret Thatcher sévit. Cette douce tendresse qui l’habite et qu’il tente de réprimer, malmené par ses jeunes voisins, par ses camarades, à coup de résultats footballistiques et d’entraînements pour avoir une démarche digne de ce nom, en fait un héros infiniment touchant. Il devient le focalisateur principal, après quelques allers et retours entre Catherine, Leek, Shug et Agnes. Sa perception du monde, si différente de celle des garçons de son âge, transforme le récit et le traverse parfois de quelques moments presque lumineux – des paillettes de beurre sucrées, de jolies figurines à la peinture passée, les pinups des cannettes maternelles, avec lesquelles il jouait, enfant, une étreinte fraternelle. Le récit d’apprentissage est encadré d’un léger bond dans le temps, Shuggie, seize ans, vivant désormais seul comme le signalent déjà les premiers paragraphes.
Shuggie Bain est un livre sombre, de la noirceur des terrils de charbon, mais c’est aussi un roman plein d’humanité, bouleversant. L’authenticité qui se dégage de ces pages transperce, comme attestant d’un quotidien vécu et relaté. L’espoir est toujours là, rampant, plus destructeur encore que la brûlure de la vodka et celle, plus insidieuse, de la bière.
Douglas Stuart - Shuggie Bain
Editions Globe
15 × 22,5 cm
496 pages
23,90 €