Le 1er avril 2022
Un documentaire classique, mais intéressant, sur le mythique champion de F1, mort accidentellement en 1994 sur le circuit d’Imola. Dommage que le film soit plombé par un parti pris manichéen et capitalise sur la rivalité entre le "méchant" Prost et le "divin" Senna.
- Réalisateur : Asif Kapadia
- Acteurs : Ayrton Senna, Alain Prost
- Genre : Documentaire, Biopic, Film de sport
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Océan Films
- Durée : 1h44mn
- Date télé : 14 avril 2024 22:15
- Chaîne : OCS Pulp
- Date de sortie : 25 mai 2011
- Plus d'informations : http://www.ocean-films.com/
L'a vu
Veut le voir
Résumé : Le destin exceptionnel d’Ayrton Senna, ses réalisations sur et en dehors de la piste, sa quête de perfection et son statut mythique constituent le sujet de ce documentaire. Le film relate ses années légendaires de pilote de F1, de la saison 1984 à sa mort dix ans plus tard. Plus qu’un documentaire destiné aux fans de courses automobiles, {Senna} s’affranchit des conventions du genre pour privilégier une approche cinématographique. Le film recourt abondamment à des images pour la plupart inédites, extraites des archives de la Formule 1.
Critique : Bien des pilotes de Formule 1 ont payé de leur vie une passion indéfectible de la vitesse : mais avec Senna, c’était évidemment différent. La trajectoire brisée de ce sportif s’apparente à une sorte de tragédie mystique qui, plus de vingt-cinq ans après sa mort, en fait une légende bien au-delà de son sport. Alors oui, ce portrait semblera hagiographique à certains, sûrement parce que le pilote se prenait lui-même souvent pour un saint, ne cachait pas sa profonde piété et fracassait la concurrence par un mélange d’arrogance, de bienveillance et de talent, si persuadé de lui-même qu’il flirtait avec les limites du danger et de la légalité. Sans manquer de respect à tous ceux qui ont suivi, sans se complaire dans un passéisme rance, on peut tout de même l’avouer : depuis le 1er mai 1994, on n’a jamais retrouvé un pilote aussi charismatique, suscitant des sentiments aussi mêlés - où l’agacement et la fascination se combinent -, en comparaison desquels les titres de Michael Schumacher ne font pas le poids, parce qu’il lui a toujours manqué cette grâce si formidablement incarnée, qui transcende les simples victoires.
Le documentaire, classique dans la forme chronologique qu’il privilégie, alterne interviews, apparitions télé, archives familiales et bien sûr exploits sur la piste qui ressuscitent une formidable époque : la légende de Senna débute en 1984, sur le circuit de Monaco, où sous la pluie qu’il aimait tant le Brésilien parvient à tirer le meilleur de sa modeste Toleman Hart pour menacer Alain Prost, à qui il est sur le point de ravir la première place, lorsque la course est interrompue en raison des conditions météorologiques dangereuses. Les deux se retrouveront évidemment quelques années plus tard chez McLaren, pour y vivre l’un des plus formidables combats que le sport ait jamais connu : le documentaire s’attarde évidemment sur ce duo inséparable, qui divisa l’opinion. On était pour Senna ou Prost, comme on était pour les Beatles ou les Stones, bien au-delà d’un art ou d’un sport, afin d’élire une manière d’être, de se tenir, une attitude face à l’existence. A l’époque, les uns louaient la posture du Français qu’on surnommait le Professeur pour ses qualités stratégiques, les autres préféraient la folie de Senna, son art des dépassements borderline, sa volonté d’y laisser quasiment sa peau (on pense évidemment à l’extraordinaire Grand Prix du Brésil 1991, que le pilote remporta épuisé, avec une boîte de vitesse bloquée sur la sixième dans les derniers tours). L’eau et le feu, le yin et yang : la formule a toujours été payante.
C’est aussi la raison pour laquelle, prenant évidemment parti pour le champion sud-américain, le documentaire est piégé par l’opposition manichéenne, qui est finalement un non-sens : le méchant Prost, soutenu par le président de la FIA Jean-Marie Balestre, contre le gentil Senna, soutenu par la force de son bon droit, lorsqu’il défend sa manœuvre dans la chicane de Suzuka, en 1989, par exemple. Certes, la réalité de ce duel sans pitié est pleine de mesquineries, mais aussi et surtout d’une admiration réciproque à laquelle il aurait fallu laisser la place qu’elle mérite. Le 1er mai 1994, quelques heures avant de mourir, le pilote offre une dédicace devenue légendaire à son rival qui vient de se retirer des pistes : "Tu me manques, Alain". Ces mots qui serrent le cœur, l’ultime dialogue à deux avant de rejoindre la piste fatale d’Imola, l’analyse rétrospective de Prost qui expliqua dans bien des interviews que leur relation avait profondément changé entre la fin du championnat 93 et l’orée du championnat 94 : tout cela est absent du triste épilogue, où le réalisateur égrène le compte à rebours depuis les derniers hectomètres accomplis, à bord de la caméra embarquée dans la Williams Renault. Avant le crash du virage de Tamburello, le choc, le deuil de toute une nation.
Or, plus que des records, Senna voulait battre Prost. Depuis longtemps. Et pour l’éternité. Schumacher, Hill, Hakkinen et les autres ne l’intéressaient pas. C’est à cette relation unique entre deux champions qu’il faudrait maintenant consacrer un autre documentaire, qui transcenderait évidemment la simple analyse sportive.
Galerie photos
Le choix du rédacteur
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.