Thomas Gunzig est belge. Pour ceux qui l’ignorent encore, la lecture de Royaumes se chargera de leur mettre les points sur les i. Et il ne fait pas bon être immigré clandestin au Royaume de Belgique. Si certains en doutent, demandez donc à l’auteur pourquoi il a dédié son ouvrage à... ses papiers d’identité !

Dans les royaumes de Gunzig, borgnes et aveugles sont rois ou petits princes. Enfin, petits princes... Rien à voir avec celui qui veut qu’on lui dessine des moutons. Ce petit prince-là cherche à faire des passes avec les fonctionnaires européens de passage à Bruxelles. Ils sont légions les bureaucrates en quête d’un moment de détente à la nuit tombée. Et celui sur lequel tombe le petit prince n’allume pas les réverbères mais flanque des gifles et vénère les menottes, sous l’oeil attentif d’une caméra.

Gunzig s’interroge sur l’image que son pays renvoie, en Afrique notamment, à tous ces malheureux choisissant de s’entasser dans un camion afin d’atteindre l’El Dorado que d’autres ont pu leur promettre. Largués en pleine zone industrielle, des enseignes bien connues à perte de vue, de la pub partout, de la pub, encore et toujours de la pub pour ces produits inutiles dont raffole ce plat pays de consommation. Des rêves, encore et toujours, affichés en 4 par 3. Des rêves bien évidemment inaccessibles...

Tout ça se déroule en Belgique. Mais pourrait fort bien se passer ailleurs, dans les pays riches qui font de l’oeil à tout le sud miséreux. La réflexion est amère, désespérée, mais toujours foncièrement drôle. De l’ironie à chaque page, mais aussi une impuissance latente à lutter contre la grande marche du progrès. Ce que nous avons construit ressemble à ça, semble nous murmurer l’auteur... Malheureusement, ces Royaumes n’ont rien de glorieux...