Le 30 novembre 2021
Chrstophe Brault signe avec ROCK’N’ROLL un ouvrage dense sur ce genre musical connu, qui mérite de l’être encore davantage. La plume de l’auteur est riche de contrastes : encyclopédique mais vulgarisatrice, simple mais agréable.
- Auteur : Christophe Brault
- Editeur : Le Mot et le Reste
- Genre : Musique
- Nationalité : Française
- Date de sortie : 25 novembre 2021
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Résumé : Lorsque Bill Haley devient n° 1 des ventes de disques aux États-Unis le 9 juillet 1955 avec « Rock Around The Clock », il ouvre une nouvelle ère pour la musique populaire, celle du rock’n’roll. S’il circule largement depuis une dizaine d’années sous l’intitulé rhythm’n’blues, l’apport des musiciens blancs jouant du honky-tonk ou du hillbilly, à l’écoute de leurs collègues afro-américains, achève sa mutation. C’est le premier style musical destiné aux jeunes, porté par des artistes de leur âge, dans une société américaine rigide et frileuse quant à leurs revendications. Grâce à des stars tels Elvis Presley, Little Richard ou Buddy Holly, le rock’n’roll révolutionne la musique, bouscule les parents et crée un nouvel art de vivre. Et même si les décès, scandales, trahisons, retraites et l’apparition d’autres genres musicaux ont raison de sa vitalité dès 1960, il revient peu à peu à la fin des sixties, puis au milieu des seventies sous l’appellation rockabilly, poursuivant sa route depuis, sous forme de revival.
Critique : L’essai prolifique ROCK’N’ROLL de Christophe Brault s’ouvre sur une vaste introduction, encyclopédique mais loin d’être poussiéreuse, s’articulant en grandes thématiques, dans un ordre chronologique. Cette configuration nous permet de mieux saisir les nuances, comme les fulgurances, de ce genre musical inspiré tout autant qu’inspirant, respirant souvent fortement et parfois plus faiblement.
De 1945 à 1955, Christophe Brault nous propose de découvrir les pionniers d’un style alors en train d’émerger. L’auteur écrit : "Le rock’n’roll est le fruit d’une rencontre, celle a prori impossible, en tout cas vulgaire, quand elle n’est pas interdite comme dans les Etats du sud des États-Unis, des cultures musicales blanches (country) et noires (blues)." Les majors qui ont flairé le bon business, tout comme les labels indépendants, sont évoqués. Deux berceaux mythiques du rock’n’roll (Nashville et La Nouvelle-Orléans) sont mis en avant. Notons que l’ouvrage est également riche de photos en noir et blanc qui nous permettent de voir quels étaient les moyens d’enregistrement et d’écoute de cette décennie. Enfin, les médias (au premier rang desquels, la radio et sa réactivité) attestent de l’intérêt d’une audience croissante. A cette période, le cinéma est jugé comme beaucoup trop frileux.
Aux yeux de l’auteur, l’âge d’or du rock’n’roll se situe de 1955 à 1958. Nous avons parlé du détonateur "Rock Around The Clock" de Bill Haley. Christophe Brault écrit : "Les signes du changement musical sont là et sont essentiellement de trois ordres. D’abord, le rock’n’rolll pratiqué par les musiciens blancs est celui qu’on appelle le rockabillly. Les racines blues forment le deuxième style et prend le nom de rythm’n’blues, ou plutôt de rock’n’roll, afin d’éviter la confusion. Enfin, issu du chant d’église, le gospel, celui qui grandit de l’extérieur, au coin des rues, le doo-wop ou famille des groupes vocaux (vocal r’n’b)." Le rockabilly est indissociable de la figure du "king" Elvis Presley. Johnny Cash et Eddie Cochran méritent aussi d’être cités. Concernant le rythm’n’blues, Chuck Berry et Little Richard s’avèrent incontournables. Le cinéma et la télévision s’emparent, enfin pour de bon, du "bankable" rock’n’roll.
Ensuite, s’amorce une période de déclin (1959-1962) émaillée de disparitions brutales (Buddy Holly, Eddie Cochran), de scandales (Chuck Berry condamné par la justice), d’indisponibilités (Elvis Presley et ses deux ans d’armée). D’autres styles musicaux, plus corrects pour l’Amérique puritaine, en tirent bénéfice. On mentionnera le twist qui est moins corps-à-corps que le rock’n’roll. Des groupes exclusivement instrumentaux s’affirment également. Le rock’n’roll anglais prend forme et ne démérite pas sur le plan qualitatif. Et après ? "1963-1967 : Le désert" est un titre de chapitre laconique, mais qui annonce clairement la donne. Les Britanniques (Beatles, Rolling Stones, Animals, etc.) ne renient pas les racines du rock’n’roll, alors que l’Amérique semble avoir définitivement tourné la page : Johnny Cash, un des gardiens du temple, n’a plus du tout le feu sacré, et surprend en optant pour la country.
Mais le genre, qualifié de "revival", reprend des couleurs, de 1968 à 1973. Le rock progressif pourrait paraître comme une rupture, mais il se nourrit du rock-n’roll comme de beaucoup d’autres sources. Un regain d’intérêt pour les sons des fifties est manifeste : la jeune avant-garde (Beatles), des rééditions de hits, et le come-back de monstres sacrés comme Chuck Berry, en sont l’illustration. C’est l’âge d’or des festivals démesurés (Woodstock est gravé dans toutes les mémoires) ; d’autres sont plus ciblés, comme le très réussi "Rock’n’Roll Revival Show" (Wembley, 1972) avec cinq têtes d’affiche de légende. Christophe Brault écrit : "Le cinéma, autant que les festivals, est un élément crucial dans le retour du rock’n’roll." Retenons l’adaptation de Grease pour les salles obscures, le film American Graffiti, la série Happy Days (Fonzie incarne le rocker parfait avec sa banane, sa veste en cuir noir, et sa moto).
Le rock’n’roll n’en finit pas de s’auto-renouveler et semble fonctionner par cycles. Les trois derniers chapitres de l’introduction (une cinquantaine de pages captivantes) le confirment. Nous passons ainsi du revival rockabilly (1969-1984) à un grand passage à vide (1985-2000). Pour conclure, Christophe Brault s’interroge sur le rock’n’roll aujourd’hui. L’introduction cède alors sa place à des chapitres nous présentant des musiciens phares du genre : chaque artiste de la sélection exhaustive a droit à une biographie souvent riche d’anecdotes. Sa discographie développée invite à une écoute synonyme de découverte emballante. Des photos de pochettes d’albums agrémentent le tout. En bref, ROCK’N’ROLL est une bible fiable et pratique : embrasser l’histoire de ce style musical devient accessible pour les néophytes. Les amateurs éclairés se laisseront également tenter.
312 pages - broché
14.8 x 21 cm
22 euros
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