Le 6 mars 2020
Un grand film initiatique dans la verve de ce qui fera l’un des thèmes de prédilection des œuvres de Téchiné, à travers une version restaurée, à la modernité incontestable.
- Réalisateur : André Téchiné
- Acteurs : Lambert Wilson, Jean-Louis Trintignant, Juliette Binoche, Wadeck Stanczak
- Genre : Drame
- Nationalité : Français
- Distributeur : UGC Distribution
- Editeur vidéo : Carlotta Films
- Durée : 1h30mn
- Date de sortie : 15 mai 1985
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Résumé : Paulot et Quentin accueillent dans leur appartement Nina, jeune comédienne. Fascinée par Quentin, être inquiétant et possessif, elle refuse l’amour que lui voue Paulot. Un événement tragique transformera cet attrait déchirant en véritable hantise.
Critique : André Téchiné a souvent évoqué dans ses œuvres cinématographiques l’arrivée d’un jeune provincial à Paris, sous couvert d’initiation aux relations homosexuelles. Dans ce grand film de 1985, le cinéaste donne la voix à Juliette Binoche qui interprète une jeune comédienne, venue tout droit du sud de la France, dans l’espoir de faire carrière. C’est une jeune femme espiègle, complexe, qui, faute de trouver une place stable dans la capitale, s’adonne à des relations sexuelles multiples. Autour d’elle, circulent Lambert Wilson qui incarne une sorte d’artiste maléfique, Wadeck Stanczak qui joue un agent immobilier, doux et impuissant, et Jean-Louis Trintignant, un metteur en scène sombre et écorché. D’autres comédiens, qui n’ont eu de cesse de sillonner les œuvres de Téchiné, comme Jacques Nolot ou Michèle Moretti, accompagnent ce récit fiévreux et moderne.
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Il fallait oser, en 1985, mettre en scène une femme volage et libre. Nina se vit comme un objet sexuel, réduisant l’homme à ses fantasmes libidineux, et cherchant à gagner une place qui soit celle d’une femme émancipée, aimable et promise à un avenir brillant. Pour autant, il s’agit d’un film éminemment romanesque dans la tradition des œuvres d’initiation. Les garçons s’opposent autour de cette figure féminine, sublime, alors qu’on pressent qu’ils sont étreints de solitude. L’amour est confondue à la jalousie et à la passion, jusque dans la mort. Ainsi, Téchiné qui a co-écrit son scénario avec Olivier Assayas, ne lésine jamais sur la crudité des mots ou la cruauté des situations, tout en ne cédant jamais à la provocation ou à la vulgarité. La capitale est filmée comme un espace de création à la fois étouffant et ouvert, avec pour point de mire, les scènes de théâtre, les cabarets fantasques, et les brasseries. Déjà, dans ce récit lumineux raconté comme une éducation sentimentale, on reconnaît J’embrasse pas, Les innocents, Les voleurs, ou plus récemment Les témoins ou Quand on a dix-sept ans où les héros, souvent jeunes, sont voués à exister ou à mourir.
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La ressortie du film dans une version remasterisée est une magnifique occasion pour les cinéphiles de revisiter toute l’œuvre d’André Téchiné. La musique élève le récit dans un souffle romanesque, puissant, dont la mise en scène, extrêmement soignée, rappelle la tradition française en faveur d’une littérature passionnée, emphatique et brûlante. André Téchiné choisit délibérément d’abstraire le politique de son récit. Seule compte la fulgurance du désir et de l’amour, dans une ville tentaculaire et propice à la création. La modernité du film tient à son caractère intemporel, à des dialogues très écrits, et à un attachement manifeste du réalisateur pour ses comédiens. On ressent la complicité des acteurs, l’engouement pour la fébrilité du scénario. On retient particulièrement Juliette Binoche, qui rejouera une autre fois pour Téchiné dans Alice et Martin et qui s’abandonne, sans concession, à la détresse et à la désinhibition sexuelle et psychologique de l’héroïne. La dernière séquence annonce la renaissance de Nina qui se libère de la paternité de son metteur en scène et de la morbidité du désir. En ce sens, André Téchiné rend hommage au métier de comédien, à la création en général qui doit faire la synthèse entre l’ivresse et la ténacité.
Notes sur le DVD
Téchiné confie au critique Jean-Marc Lalanne les racines d’un film qui s’inspire de la liberté artistique de jeunes comédiens dans une école de théâtre. L’entretien est très intéressant, et le cinéaste évoque le Paris bohème des années 80. Wilson offre une interview passionnante, où il laisse éclater sa fierté d’avoir participé au film.
Test DVD/Bluray
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