Le 10 juillet 2024
André Téchiné arrive toujours à nous toucher en alliant narration fluide et mise en scène élégante, dans un récit fidèle à son univers, avec une Isabelle Huppert une fois de plus impériale.
- Réalisateur : André Téchiné
- Acteurs : Isabelle Huppert, Stéphane Rideau, Hafsia Herzi, Nahuel Pérez Biscayart, Moustapha Mbengue, Romane Meunier
- Genre : Drame
- Nationalité : Français
- Distributeur : Jour2fête
- Durée : 1h25mn
- Date de sortie : 10 juillet 2024
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Résumé : Lucie est une agente de la police technique et scientifique. Son quotidien solitaire est troublé par l’arrivée dans sa zone pavillonnaire d’un jeune couple, parents d’une petite fille. Alors qu’elle se prend d’affection pour ses nouveaux voisins, elle découvre que Yann, le père, est un activiste anti-flic au lourd casier judiciaire. Le conflit moral de Lucie entre sa conscience professionnelle et son amitié naissante pour cette famille fera vaciller ses certitudes…
Critique : Coécrit avec Régis de Martrin-Donos, Les gens d’à côté marque les retrouvailles d’André Téchiné avec Isabelle Huppert, quarante-cinq ans après Les sœurs Brontë. L’actrice y a pour partenaire Hafsia Herzi, avec laquelle elle partage également l’affiche dans La prisonnière de Bordeaux. Après Les âmes sœurs, sur le thème de l’inceste, qui avait divisé la critique et dérouté le public, le réalisateur poursuit son exploration des tourments de l’âme humaine. Lucie (Huppert), une policière en fin de carrière, se lie d’amitié avec un couple de voisins, parents d’une petite fille. La mère, Julia (Herzi), est une jeune enseignante engagée, quand son compagnon, Yann (Nahuel Pérez Biscayart), s’avère être un activiste black block, sous contrôle judiciaire. Impliquée dans son métier mais sincèrement attachée à cette famille, Lucie pourra-t-elle gérer les sentiments contradictoires qui la minent ? Téchiné s’est souvent frotté à des thématiques sociétales et des faits divers, qu’il s’agisse de l’emballement médiatique (La fille du RER), l’affaire des casinos niçois (L’homme qu’on aimait trop) ou la montée du djihadisme (L’adieu à la nuit). Pour autant, on ne saurait le ranger dans la catégorie des réalisateurs de films à thèse. Cet ancrage social n’est certes pas un simple prétexte pour le cinéaste, qui parvient ici à mettre en exergue les difficultés de communication entre la police et certains citoyens ou le manque de moyens des services publics, qu’il s’agisse du ministère de l’Intérieur ou de celui de l’Éducation nationale.
- Isabelle Huppert
- © 2024 Les Films du Worso. Tous droits réservés.
Et ce avec un sens appréciable de la nuance, Lucie peinant à assurer le deuil de son compagnon d’origine africaine, policier ayant mis fin à ses jours, et Yann attirant l’attention des galeristes amateurs de dessin, les jours où il ne cherche pas à casser du flic… Mais l’essentiel est ailleurs, dans les relations entre des personnages que tout oppose, ou presque, mais liés par une attirance réciproque. L’incursion de la trame romanesque, davantage relative à l’amitié que la passion amoureuse, est ce qui semble motiver davantage Téchiné, qui tient à préciser dans le dossier de presse : « Je n’ai pas de marque de fabrique. C’est le domaine affectif qui m’intéresse avant tout. Mais la sphère citoyenne est également présente. Ce qui m’a particulièrement captivé ici, c’est le conflit entre ce qui est intime et ce qui est citoyen. Ce qui se joue pour Lucie, c’est l’articulation entre le métier et les affects. Mon souci était que ce soit le plus concret possible, au plus près des émotions. Le thème du voisinage peut sembler futile, superficiel, mais j’ai justement essayé de le creuser en profondeur avec les nouveaux venus, les voisins de Lucie, qui n’ont pas les mêmes croyances, les mêmes idées qu’elle. Ils n’ont pas le même âge. Ils forment une famille aux antipodes de Lucie, célibataire et sans enfant. »
- Nahuel Pérez Biscayart, Hafsia Herzi
- © 2024 Les Films du Worso. Tous droits réservés.
Le personnage de Lucie est ainsi l’un des plus forts de l’œuvre de Téchiné, et convoque le souvenir d’autres héroïnes : on songe aux errements de Catherine Deneuve dans Le lieu du crime, transgressant les règles sociales et faisant éclater son vernis de respectabilité pour assumer ses souhaits. On appréciera également une touche discrètement onirique, à travers une présence fantomatique, certes moins explicite que dans Barocco. Fantôme avec lequel devait également cohabiter Isabelle Huppert dans le récent Sidonie au Japon. Précisons que l’actrice, très présente sur les écrans, est loin d’user son image et réussit encore à impressionner, après une multitude de rôles majeurs depuis l’époque de La dentellière et Violette Nozière. Les gens d’à côté est donc une réussite indéniable, à la narration fluide et à la mise en scène élégante, et que nous ne saurons que recommander.
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