Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’ersatz
Le 6 avril 2014
L’une des plus grandes comédies romantiques américaines, tout court.
- Réalisateur : Rob Reiner
- Acteurs : Meg Ryan, Billy Crystal, Carrie Fisher, Bruno Kirby, Steven Ford
- Genre : Comédie, Romance, Comédie romantique
- Nationalité : Américain
- Distributeur : 20th Century Fox
- Editeur vidéo : MGM
- Durée : 1h36mn
- Box-office : 1.851.694 entrées (France)
- Titre original : When Harry Met Sally
- Date de sortie : 15 novembre 1989
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Résumé : Lorsqu’ils se rencontrent pour la première fois dans les années 70, Harry et Sally ne s’apprécient pas, mais alors pas du tout. Ils se quittent, jurant de ne plus se revoir. Cinq ans plus tard, ils se retrouvent mais rien n’a changé : leurs avis sur les relations hommes-femmes divergent du tout au tout. Cinq autres années passent et Harry rencontre Sally de nouveau. Ils se racontent leurs expériences, leurs déceptions et se rendent compte que leur vie amoureuse est un désastre...
Critique : New York, le jazz et un héros angoissé et cynique au débit de mitraillette, s’interrogeant sur le sexe et l’amour... Non, contrairement aux apparences, il ne s’agit pas d’un film de Woody Allen mais bel et bien de Quand Harry rencontre Sally, véritable bijou de la comédie romantique américaine.
Écrit par l’une des papesses du genre, Nora Ephron, dont c’était là le premier succès, la comédie romantique possède son lot de scènes culte, dont la plus mémorable est sans doute celle où Sally (Meg Ryan) simule un orgasme en plein restaurant pour prouver à Harry (Billy Crystal) que les femmes peuvent tricher au lit sans que leurs partenaires ne s’en rendent compte. L’originalité du film est de se situer d’un bout à l’autre entre le cynisme de Woody Allen (incarné par Harry) et le romantisme fleur bleue propre aux romances hollywoodiennes. Un mélange détonant qui lui permet d’éviter de tomber dans la guimauve alors même que la structure propre au genre (deux personnages que tout oppose finiront ensemble) est non seulement respectée, mais mise en avant dès le départ. En effet, plusieurs petites séquences avec de vieux couples racontant leur histoire servent de transition, marquant l’évolution de la relation des héros au fil des années. Le happy end ainsi annoncé comme inéluctable (d’ailleurs, le film s’ouvre sur la chanson It Had to Be You par Sinatra), le sentiment d’artificialité du scénario se trouve paradoxalement désamorcé et c’est avec un plaisir jouissif que l’on suit les péripéties des protagonistes.
Comme dans toute comédie romantique, l’enjeu est donc de savoir comment le destin va pouvoir réunir les amoureux et l’intrigue joue beaucoup sur les coïncidences. Cependant, Nora Ephron réussit à rendre celles-ci crédibles, d’autant plus que l’histoire s’étale sur douze ans, là où son autre grand succès, Nuits Blanches à Seattle (1993), également avec Meg Ryan, s’apparentera plus à un conte de fées.
Au-delà de la finalité de l’intrigue, Quand Harry rencontre Sally se distingue surtout par la qualité de son écriture, aussi incisive que ciselée. Si les dialogues sont tous très écrits, ils ne sonnent jamais faux et deviennent de véritables pépites dans la bouche des acteurs. Billy Crystal fait ainsi preuve d’un sens du rythme étonnant et rend confondantes de naturel ses tirades dépressives. La première scène, où il se dispute avec Sally pour lui prouver qu’il est plus torturé qu’elle, installe le personnage et nous le rend d’emblée aussi attachant qu’horripilant. La même chose pourrait être dite de Sally, jeune et romantique certes, mais surtout enquiquineuse de première donnant des sueurs froides aux serveurs au moment de passer une commande. Et c’est en partie ce qui rend le film si plaisant : le ton n’est jamais niais et, dès que la romance prend le dessus, la scénariste excelle dans la rupture de ton pour nous donner du fil à retordre.
Par ailleurs, même si elles sont débitées sur un mode comique, le film regorge d’observations mine de rien très fines sur la vie de couple. Les personnages secondaires de Marie (Carrie Fisher) et Jess (Bruno Kirby), apparaissent ainsi comme le pendant symétrique du couple en devenir Harry/Sally : leur histoire est aussi simple et évidente que celle de leurs amis compliquée.
Il faut ajouter à cela la réalisation tout en finesse de Rob Reiner, artisan caméléon (Stand By Me, Princess Bride, Misery, La rumeur court...) qui sait se mettre au service de l’intrigue. Tout en restant discret, il parvient à donner une personnalité certaine au film, là où de nombreuses comédies romantiques bénéficient d’une mise en images transparente et anonyme. Ici, les idées les plus simples se révèlent les plus ingénieuses, comme la remarquable scène de split screen montrant Harry et Sally en train de regarder Casablanca depuis leur lit tout en se parlant au téléphone, le cadre donnant l’illusion d’une seule et même pièce. Le reste est en cohérence avec ce parti pris de simplicité : les cartons noirs qui structurent le film, la bande originale choisie avec goût (Gershwin, Sinatra, Louis Armstrong, The Allman Brothers)...
Difficile donc de trouver le moindre reproche à faire à cette comédie aussi grinçante que sincèrement émouvante qui tient toujours la comparaison avec ses successeurs. On en vient à regretter que Nora Ephron ait depuis plus ou moins sombré dans la guimauve (Raccroche, Ma sorcière bien-aimée) et que Meg Ryan, à l’exception de l’étonnant In the Cut (2003), ait été reléguée au rang des romances et divertissements de seconde zone.
– Sortie Blu-ray : 25 mai 2011
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