L’envol du Phoenix
Le 24 février 2023
1987. Le film de Rob Reiner, adapté d’une nouvelle de Stephen King, remet au goût du jour la chanson de Ben E. King, et propulse River Phoenix au rang de star montante.
- Réalisateur : Rob Reiner
- Acteurs : John Cusack, Kiefer Sutherland, Richard Dreyfuss, Corey Feldman, River Phoenix, Jerry O’Connell, Wil Wheaton, William Bronder
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Gaumont Columbia Tristar Films
- Durée : 1h25mn
- Date télé : 24 février 2023 21:00
- Chaîne : France 5
- Date de sortie : 25 février 1987
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Résumé : Un événement peu ordinaire va marquer la vie du jeune Gordie Lachance. Au cours de l’été 1959, un adolescent a disparu mystérieusement dans l’Oregon. Gordie et ses inséparables copains, Chris, Teddy et Vern, savent qu’il est mort pour avoir approché de trop près la voie ferrée, un train l’a heurté. Son corps gît au fond des bois. C’est le frère de Vern qui l’a découvert. Les enfants décident de s’attribuer le scoop et partent pour la grande forêt de Castle Rock. Cette aventure va rester pour Gordie et ses trois amis la plus étrange et exaltante de leur vie.
Critique : Aujourd’hui, la célèbre chanson de Ben E. King, Stand by me, résonne dans nos oreilles comme l’écho de l’amitié et de l’aventure : elle a été remise au goût du jour par le film éponyme de Rob Reiner adapté d’une nouvelle de Stephen King, The Body, issue de ses fameux récits des Différentes saisons, et en est même devenue son emblème.
- © Sony Pictures
Ce n’est pas sur le nom de Stephen King que la promotion du film se bâtit. Le romancier, adapté à outrance dans les années 80, revenait des succès consécutifs de Shining, Creepshow, Dead Zone, Christine... En fait, pour la première fois dans la carrière de l’auteur, le cinéma s’intéressait à l’autre versant de son œuvre, loin de l’artillerie fantastique qui caractérisait ses premiers périples cinématographiques. Pourtant, dès sa sortie aux États-Unis, en 1986, Stand by Me peut se vanter d’être un succès critique majeur, mais également une belle réussite commerciale. En effet, le film de l’inconnu Rob Reiner (un projet musical culte, Spinal Tap, et une comédie ado Garçon choc pour nana chic à son actif) rapporte plus de cinquante deux millions de dollars de recettes, alors qu’il n’en a fallu que huit pour le réaliser. Une belle réussite, même à l’international. En France, par exemple, 530 000 personnes ont suivi les péripéties de ses quatre gamins à sa sortie, en 1987. Un score qui peut sembler fade face à ceux des grosses productions, mais pourtant ne déméritait pas au vu de sa faible distribution. En effet, Stand by Me, distribué alors par Warne -Columbia, resta sur Paris, plus de trente quatre semaines à l’affiche !
- © Sony Pictures
Stand by Me est, en 1987, un film sans star, ni effets spéciaux, un OVNI naturaliste dans la production adolescente de l’époque, de surcroît imprégné du décor de l’Amérique de la fin des années 50. Même si les thèmes (ceux de l’amitié virile, de l’aventure entre potes, et du récit initiatique) peuvent évoquer Les Goonies, Stand by Me se démarque en se situant sur une autre sphère, celle du cinéma intimiste dit d’auteur ; il se fait le reflet de la sensibilité d’un auteur à part entière, Stephen King en proie à la mélancolie d’une jeunesse qui n’est plus, la sienne, avec de nombreux éléments autobiographiques qui lui tenait à cœur, comme la mort d’un adolescent qui se fait l’écho de celle d’un proche happé par une locomotive alors qu’il était tout jeune. Exit donc les aventures exotiques et rocambolesques des productions Amblin et de ses ersatz (Explorers de Joe Dante, déjà avec River Phoenix) ; avec Stand be Me, Rob Reiner dévoile une œuvre toute en subtilité, plus lente, ancrée dans un décor automnal, qui délivre une authentique réflexion sur l’amitié, à l’âge difficile de la pré-adolescence, alors que les quatre jeunes gens, dont un futur écrivain (tiens...), ne correspondent pas au moule des durs, répondant davantage à des schémas hétéroclites de jeunes en détresse. Récit initiatique initié par la mort, puisque les qiatre ados partent en quête du cadavre d’un jeune du village, fauché par un train à quelques heures de marche de leur patelin, Stand by Me est la première confrontation de la jeunesse au deuil. La mort devient une obsession, source de trouble, de tristesse et de fascination macabre. Gordie Lachance (formidable Wil Wheton), l’adolescent autour de qui tourne principalement l’intrigue, est lui-même endeuillé par la mort de son frère.
Ce voyage de mômes, les poches vides, le long de voies ferrées dans des paysages d’une Amérique mythique, est moins l’occasion de péripéties, que l’objet des doutes et grandes interrogations inhérents à cet âge. Sur la route menant au cadavre (The Body, titre de la nouvelle, donc), ils se retrouvent face à leurs propres démons, confrontés à eux-mêmes aux questions existentielles qui vont forger leur personnalité en devenir.
- © Sony Pictures
Avec le talent du grand artisan jongleur, qui lui permet d’éviter de s’enliser dans le pathos (l’humour n’est jamais occulté), Rob Reiner délivre un beau film imprégné d’un sentiment de nostalgie prégnant. Il y a en effet dans Stand by Me, un autre acteur de taille : le temps. Ce temps qui ne parvient pas à soulager les plaies du cœur ou de l’esprit, qui déchire parfois les destins, et qui construit à sa guise les destinées de chacun. Le film démontre son intemporalité en exerçant toujours ce même pouvoir d’empathie. Face aux thèmes abordés, difficile de ne pas penser au décès brutal de River Phoenix, survenu environ sept ans après ; la bouille malicieuse, le regard téméraire et dégourdi, Phoenix était l’une des révélations de l’année 1987, à l’affiche de deux films sortis le même jour ce 25 février, Stand by Me, bien sûr, mais aussi The Mosquito Coast, de Peter Weir, aux côtés de Harrison Ford.
Malgré le succès, Stand by Me ne reçut qu’une seule nomination aux Oscars : celle du meilleur scénario adapté. Et, il en repartit pourtant bredouille. Toutefois, aujourd’hui, le film de Rob Reiner demeure dans le cœur de tout cinéphiles comme un magnifique objet de culte. Comme quoi, il ne suffit pas d’une statuette en or pour rendre une œuvre éternelle.
Quant à Rob Reiner, après un passage par le conte merveilleux (le comique Princess Bride) et une redéfinition des codes de la comédie romantique (Quand Harry rencontre Sally), il retrouva le King pour l’adaptation forcenée d’un autre morceau de bravoure de l’œuvre du romancier... Misery. On est alors en 1990 ; cela sera son dernier film d’envergure.
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