Le 8 octobre 2017
Porté par des interprètes plus que convaincants, ce film traitant des relations entre pouvoir et machisme dégage une réelle grâce malgré un rythme inégal.
- Réalisateur : Tonie Marshall
- Acteurs : Emmanuelle Devos, Anne Azoulay, Richard Berry, Sami Frey, John Lynch, Suzanne Clément, Benjamin Biolay, Francine Bergé
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Français
- Distributeur : Pyramide Distribution
- Durée : 1h50mn
- Date télé : 5 mars 2022 20:40
- Chaîne : OCS Max
- Date de sortie : 11 octobre 2017
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Résumé : Emmanuelle Blachey est une ingénieure brillante et volontaire, qui a gravi les échelons de son entreprise, le géant français de l’énergie, jusqu’au comité exécutif. Un jour, un réseau de femmes d’influence lui propose de l’aider à prendre la tête d’une entreprise du CAC 40. Elle serait la première femme à occuper une telle fonction. Mais dans des sphères encore largement dominées par les hommes, les obstacles d’ordre professionnel et intime se multiplient. La conquête s’annonçait exaltante, mais c’est d’une guerre qu’il s’agit.
Critique : Après le très improbable Tu veux ou tu veux pas réunissant Sophie Marceau et Patrick Bruel, Tonie Marshall revient avec un sujet plus sérieux sans être pesant et renoue avec ce dont elle parle le mieux : les femmes. Ce n’est que justice puisqu’une brochette d’actrices agréablement mises en scène dans Vénus Beauté (institut) lui vaut d’être depuis 2000 la seule représentante du sexe dit faible à détenir le César du (de la) Meilleur(e) Réalisateur(trice).
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C’est donc d’un point de vue exclusivement féminin que Tonie Marshall décrit cette difficile ascension à des postes à haute responsabilité au sein du grand patronat. Elle aurait pu installer son propos dans l’univers de la presse, de la politique ou de tout autre domaine où atteindre le plus haut sommet de la pyramide managériale constitue la récompense suprême tout comme elle aurait pu opposer des hommes à des hommes ou des femmes à des femmes, puisqu’il semble bien que le goût du pouvoir soit universel et propre à toutes les espèces vivantes.
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Aidée de Raphaëlle Bacqué, journaliste politique au journal le Monde, la réalisatrice prend le temps de rencontrer un bon nombre de femmes occupant des postes importants dans de grandes entreprises, ce qui lui permet de disséquer ce monde fermé avec réalisme et d’apporter une bonne dose d’authenticité à son récit. Plantant son décor dans d’immenses bureaux dépouillés aux larges baies vitrées donnant sur les tours de la Défense, elle choisit de laisser de côté stratégies financières et problèmes de rentabilité pour ne se concentrer que sur la psychologie de ses personnages qui, tour à tour, faiblissent et se ressaisissent, allégeant d’une humanité salvatrice ce monde de violence contrôlée. La première partie, entièrement centrée sur un casting féminin, s’arrête sur les composantes de ce groupe d’influence dont l’insistance et l’ambition parviennent à déstabiliser cette ingénieure pourtant déjà rompue à l’exercice du pouvoir tant il est culturellement peu habituel qu’une femme puisse accéder à de si hautes sphères. Adrienne (Francine Bergé dont les cheveux blancs et le maintien longiligne confirment une autorité naturelle) qui a connu les premiers pas de la libération féminine, militante convaincue, assistée de Véra (Suzanne Clément parfaite entre doute et détermination) et de Claire, issues des générations suivantes mais néanmoins bien décidées à ne rien céder ne la lâchera pas. Femmes énergiques et positives, jamais revanchardes et en aucun cas geignardes, elles illustrent avec force cette ségrégation hommes/femmes héréditaire et inconsciente, finalement inscrite dans le système. Sous prétexte d’étoffer à tout prix les caractères de ses héroïnes, Tonie Marshall (également scénariste) se perd dans quelques redondances qui font patiner le scénario qu’une écriture vagabonde ne parvient pas à relancer.
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Pour pénétrer au cœur de l’action, il faut attendre l’arrivée de Jean Baumel, ce rival carnassier au machisme odieusement bienveillant qui nous laisse entre admiration et répulsion, auquel Richard Berry se fait un malin plaisir (partagé) de prêter ses traits. Trahisons, passe-droits, chausse-trappes déboulent donnant brusquement à ce récit jusqu’alors ronronnant gentiment sur la cause féminine un petit air de polar aux relents machistes démultipliés. Les joutes verbales entre ce stratège aguerri et cette prétendante aux bouleversements de l’ordre établi nous réjouit par ses dialogues ciselés juste à point.
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Le plus bel atout de ce film reste la performance impeccable d’Emmanuelle Devos. Colonne vertébrale du récit, elle se moule à la perfection dans le maintien et la gestuelle de ces femmes à poigne, tout en cultivant humanité et sensibilité. Par touches discrètes, le scénario nous révèle pudiquement que sa soif de pouvoir ne correspond pas seulement au goût de l’autorité et de la domination comme le lui reproche son père, ancien universitaire très critique envers le monde des affaires (Sami Frey tout en émotion et dont la complicité avec Emmanuelle Devos est palpable) mais constitue avant tout un hommage à une mère qui n’a jamais réussi à trouver sa place dans la société.
Evitant l’écueil du cynisme et de la victimisation, Tonie Marshall signe une comédie élégante et gaie à l’image de la chanson de fin interprétée par deux sympathiques « machos ».
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