Les voyages immobiles
Le 1er avril 2009
L’errance à travers l’Europe. Un beau road movie qui confirme la singularité du talent de l’auteur de Voyages.
- Réalisateur : Emmanuel Finkiel
- Genre : Drame, Documentaire, Road movie
- Nationalité : Français
- Distributeur : Dulac Distribution
- Durée : 1h35mn
- Date de sortie : 1er avril 2009
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Résumé : Trois histoires se télescopent. Un père kurde et son jeune fils sont les passagers clandestins d’un train de marchandises qui les conduit en Grande-Bretagne ; un jeune cadre français supervise la délocalisation d’une usine en Hongrie ; une étudiante amoureusement blessée filme la misère humaine avec sa caméra numérique et fait escale à Budapest où elle est hébergée par une jeune Polonaise.
Critique : D’Emmanuel Finkiel, nous avions gardé le souvenir d’un délicat court-métrage sur le thème de la Shoah, Madame Jacques sur la Croisette (1995), qui sera suivi par le bouleversant Voyages, César du meilleur premier film et Prix Louis Delluc en 1999. Dans ce premier long métrage, nous contemplions l’errance de plusieurs personnages dont une vieille femme exilée et déracinée dans un Israël qui ne correspondait pas à ses attentes.
- Copyright Sophie Dulac Distribution
C’est dans cette même veine que se situe Nulle part terre promise, auréolé du Prix Jean Vigo 2008. Avec moins d’émotion contenue et davantage de sécheresse dans le style, il aborde le thème de la difficile communication entre les peuples d’Europe et l’illusion de la liberté de déplacement au sein de l’espace Schengen. Sur le fond, l’œuvre se rattache à tout un courant du cinéma européen qui va de Dirty Pretty Things de Stephen Frears (sur l’exploitation des clandestins) au récent Dernier maquis de Rabah Ameur-Zaïmeche (sur la manipulation religieuse au cœur de la sphère productive). Ici, le cinéaste montre, par petites touches, le dualisme entre l’Europe de l’opulence et celle de la désaffiliation : c’est le plan d’un immigré urinant dans un coin du wagon, plus d’un demi-siècle après les humiliations des convois de la mort ; c’est le travelling révélant le désarroi du jeune ingénieur dans la nouvelle usine qu’il visite, peu après avoir côtoyé la pauvreté du quartier dans lequel il loge.
- Copyright Sophie Dulac Distribution
Mais Finkiel se garde bien de céder aux sirènes du film à thèse et du misérabilisme, et sa belle mosaïque, toute de non-dits et d’ellipses, est d’une belle sobriété : en attestent l’oppressante fouille des policiers dans la gare ou la magnifique séquence finale dans le train. Avec une économie de moyens et de dialogues, Finkiel excelle à peindre l’anomie de ces nouveaux voyageurs, ainsi que le chassé-croisé du facteur travail, qui va de l’Ouest vers l’Est, et du facteur capital (les machines) qui suit le trajet inverse. Le travail sur la bande-son et le montage est admirable et hisse le réalisateur au niveau du Haneke de Code inconnu ou du Kieślowski de La double vie de Véronique, autres artistes mêlant préoccupations sociales et propos introspectifs.
D’aucuns reprocheront au réalisateur d’enfoncer des portes ouvertes ou de donner dans l’exercice de style consensuel, mais ce serait méjuger la cohérence et la force du résultat final, plus que du matériau scénaristique initial.
– Prix Jean Vigo 2008
– Shanghai International Film Festival 2009 : Meilleure photo
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