Rouge colère
Le 13 novembre 2008
Rabah Ameur-Zaïmeche dresse un portrait très juste d’ouvriers immigrés au sein d’une usine où l’islam est autant sujet d’enthousiasme que de discorde. Un film résolument actuel.


- Réalisateur : Rabah Ameur-Zaimeche
- Acteurs : Abel Jafri, Christian Milia-Darmezin, Rabah Ameur-Zaimeche
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Français
- Distributeur : Dulac Distribution
- Durée : 1h33mn
- Date de sortie : 22 octobre 2008
- Festival : Festival de Cannes 2008
Résumé : Mao, patron d’une usine de triage de palettes, décide de faire construire une mosquée pour ses ouvriers en grande majorité d’origine maghrébine. L’enthousiasme sera de courte durée car la mosquée sera la source de discordes appuyées entre le patron et les ouvriers en demande d’amélioration de leurs conditions de travail.
Critique : Le dernier Rabah Ameur-Zaïmeche (Wesh wesh) mêle politique religion et précarité sociale au sein d’une usine. Avec une précision documentaire, il détaille les rapports de force et d’(in)égalités qui règnent, alors que, partant d’une bonne intention, le patron ouvre une mosquée pour que ses ouvriers puissent respecter le culte musulman. Ce qui devait être un moteur de fraternisation, provoque le scandale : l’imam a été désigné d’office. Or, selon la loi coranique, il doit être choisi par l’assemblée des fidèles. Cet événement est la source de l’escalade des revendications et révoltes de ses salariés. De manière frappante, Ameur-Zaïmeche place sur un pied d’égalité tous les personnages qu’il filme. Le patron n’est pas diabolisé, la cause ouvrière n’est pas montrée comme entièrement juste et rationnelle. Ce sont des hommes avant tout qui essaient de concilier, à leur manière, travail, politique et religion. Le réalisateur aborde des thèmes très actuels à l’heure où le religieux connaît une ambivalence accrue dans la société : alors que le mot « laïcité » est sur toutes les lèvres, la religion n’a jamais autant été facteur d’identification de l’homme.
Les ouvriers empilent des palettes rouges - couleur de la révolution. Ils construisent leur rempart contre un monde où l’injustice règne : leur maquis. Mais, malgré les difficultés de la vie et les révoltes, on assiste à des moments d’apaisement comme lorsqu’un ouvrier grimpe au sommet d’une pile de palettes et se découvre des qualités de muezzin. Un instant de plénitude, de spiritualité avec l’environnement et non en lutte. Les palettes deviennent minaret.
On est admiratif du travail de retranscription des difficultés de vie des travailleurs immigrés, sans que le cinéaste ne s’apitoie jamais sur leur sort. Il nous plonge minutieusement dans l’univers du monde prolétaire, mais n’entre pas dans un discours politique engagé. Il s’agit de montrer des hommes avec leurs espoirs, qui se battent pour les voir un jour se concrétiser. C’est ce qui fait la beauté et la force de Dernier maquis : pas de démagogie, juste un témoignage.
Norman06 29 avril 2009
Dernier maquis - Rabah Ameur-Zaimeche - critique
Le cinéma de Rabah Ameur Zaïmèche se situe dans un No man’s Land cinématographique, dans sa volonté d’éviter tant le propos et le style consensuels d’un Abdellatif Kechiche (qui lui est supérieur) que le pompiérisme fumeux d’un Nicolas Klotz. L’extrême économie de moyens et l’épure de ce drame sert habilement le propos, et l’on appréciera les quelques digressions dont cette insolite séquence avec un ragonnet mystérieusement trouvé dans l’atelier. Au final, voici un film ambitieux qui ne laissera pas indifférent même si ses intentions ne sont pas toujours claires