Le 30 avril 2023
Cédric Jimenez retrace avec un vrai sens de la dramaturgie les cinq jours de traque post-13 novembre. Une croisade funèbre et antihéroïque d’une extrême pudeur sur un traumatisme hexagonal.
- Réalisateur : Cédric Jimenez
- Acteurs : Sandrine Kiberlain, Jérémie Renier, Jean Dujardin, Anaïs Demoustier, Cédric Kahn, Stéphane Bak, Sofian Khammes, Lyna Khoudri, Annabelle Lengronne, Raphaël Quenard, Sami Outalbali, Jérémy Lopez
- Genre : Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Thriller
- Nationalité : Français
- Distributeur : StudioCanal
- Durée : 1h45mn
- Date télé : 3 novembre 2024 21:10
- Chaîne : France 2
- Date de sortie : 5 octobre 2022
- Festival : Festival de Cannes 2022
L'a vu
Veut le voir
Résumé : Une plongée au cœur de l’antiterrorisme pendant les cinq jours de traque qui ont suivi les attentats du 13 novembre.
Critique : Deux ans après Bac Nord, Cédric Jimenez s’empare du traumatisme de tout un pays, une blessure encore béante que le cinéaste et son scénariste Olivier Demangel ont décidé de traiter sous la forme d’un polar noir dans le sillage du Zero Dark Thirty de Kathryn Bigelow, à l’exception près que Novembre fut conçu dès ses prémices comme un long métrage choral où une mosaïque de personnages est confrontée à l’inénarrable. Jimenez inscrit Novembre dans un certain mouvement de reconstitution cinégenique initié il y a quelques années avec Made in France de Nicolas Boukhrief, traitant déjà de la cellule djihadiste à l’origine des attentats du 13 novembre. Ici, ces attentats ne seront jamais montrés et nos enquêteurs arrivent après la tempête, dans un chaos indescriptible où la caméra tremblante de Jimenez arrive à peine à percevoir ce qui se passe sous nos yeux, au milieu des silhouettes floues et des visages médusés. Le travail de documentation de Jimenez et Demangel demeure en cela admirable dans la manière de nous immerger dans les rouages de l’unité antiterroriste, semblable à un tunnel que l’on croirait sans fin, où nos repères temporels se dilatent de plus en plus, les enquêteurs travaillant nuit et jour pour empêcher une attaque probable. Jimenez n’ignore pas pour autant les nombreuses erreurs et les dysfonctionnements des services de sécurité survenus durant ces cinq jours auprès des bureaux de la NSDAT, car Novembre est aussi un récit de l’incompétence et de la dérive.
- © 2021 RECIFILMS - CHI-FOU-MI PRODUCTIONS - STUDIOCANAL - FRANCE 2 CINEMA - UMEDIA
À l’instar de Kathryn Bigelow qui montrait à travers Zero Dark Thirty comment les États-Unis transformaient la traque de Ben Laden en véritable croisade où l’administration américaine abandonnait ses principes fondamentaux, notamment dans les droits accordés aux prisonniers de guerre, et utilisait tous les moyens à disposition, incluant la torture et la négation de l’humain, pour retrouver l’ennemi public numéro un, Jimenez pointe du doigt, notamment lors d’une scène clé où le personnage de Jean Dujardin ordonne à ses équipes de placer en garde à vue tous les Français ayant eu un comportement suspect les dernières vingt-quatre heures précédant les attentats, les dérives anti-démocratiques qui peuvent découler d’un état d’urgence absolu où le danger peut venir de partout dans un monde en perpétuelle mutation où nos administrations faillibles sont incapables de riposter. Novembre s’émancipe alors du genre du thriller nerveux pour s’élever en objet cathartique contemporain où la promesse d’un actioner bourrin se fait soudain récit de la mémoire collective de cette chasse aux fantômes.
- © 2021 RECIFILMS - CHI-FOU-MI PRODUCTIONS - STUDIOCANAL - FRANCE 2 CINEMA - UMEDIA
En définitive, Novembre est un film fleuve d’une extrême âpreté, dépourvu d’artifices et bien loin de la pyrotechnie et l’hémoglobine mis en avant durant sa promotion. Jimenez préfère s’attarder sur des fragments d’humanité de ses antihéros disséminés ici et là, ces petits moments de dérochement qui font de Novembre un grand thriller humaniste se concentrant presque exclusivement sur ses personnages. Il montre comment leurs actions influent le cours de l’enquête autant que leurs convictions morales. On ressort de Novembre lessivés, happé de la première à la dernière minute par ce cataclysme que l’on croyait derrière nous mais dont une sonnerie de téléphone ou une sirène d’ambulance parviennent encore à heurter nos âmes meurtries.
– Sélection officielle Cannes 2022 : hors compétition
La chronique vous a plu ? Achetez l'œuvre chez nos partenaires !
Galerie photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.