Notre avis : Juli Zeh nous embarque dans la psyché tourmentée de Henning, relecteur pour une maison d’édition, mais surtout mari et père de deux enfants. Au bord du burn-out, incapable de gérer simultanément ses vies professionnelles et personnelles, notre héros malheureux a un réflexe de survie : il emmène sa famille passer les vacances de Noël sur l’île de Lanzarote. Pourquoi cette île ? Mystère… il l’a apparemment découverte sur Internet et il y voit un paradis terrestre (palmier, plage noir car île volcanique, maison avec piscine, famille riche épanouie…) où il pourrait peut-être reprendre sa vie en main.
Le roman s’ouvre sur Henning, le premier jour de l’an, qui enfourche le vélo entrée de gamme, appartenant à l’agence de location locale, pour gravir le sommet de la montagne de l’île. Seul, pour une fois. Ce défi qu’il s’est fixé, en ce premier jour d’une année vierge, est une tentative de nouveau départ. Au fur et à mesure qu’il gravit les pentes, Henning souffre, transpire, peste… sur le vélo, sur sa condition physique, puis de fil en aiguille sur les origines de sa mauvaise forme : pas assez de temps pour soi, des enfants exigeants, une femme volontaire, un temps partiel qui dans les faits est un temps plein…
Le paysage défile, se révèle lentement, tandis qu’Henning s’acharne à gravir cette côte qui n’en finit pas. Des flash-backs de sa vie quotidienne se mêlent à ses récriminations, se cristallisent dans des scènes où le protagoniste est assaili par des crises d’angoisse (d’origine inconnue) qui le paralysent, le laissant exténué, dans la crainte d’une prochaine survenue.
Finalement, Henning arrive sur la place centrale du plus haut village de la montagne. Exténué, il s’effondre. Mais il n’a pris ni argent, ni à boire, ni à manger. Contraint de demander de l’aide, il cherche du regard autour de lui. Et mû par une force qui le dépasse, il remonte sur son vélo pour gravir encore quelques kilomètres et parvenir à une maison d’artiste. Une certitude de déjà-vu l’habite et grâce à un flash-back extrêmement dense et détaillé (la deuxième moitié du roman), sa mémoire lui révèle un épisode marquant de sa petite enfance. On n’en dévoilera pas davantage que la quatrième de couverture (qui en révèle déjà beaucoup), pour vous laisser découvrir par vous-même le reste de ce récit haletant.