Le chant de l’amer
Le 13 mars 2016
Un documentaire poignant sur le contournement en chansons et enchanté d’une loi absurde. Salutaire.
- Réalisateur : Ayat Najafi
- Acteurs : Élise Caron, Sara Najafi
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français, Allemand
- Durée : 1h31 mn
- Date de sortie : 16 mars 2016
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Un documentaire poignant sur le contournement en chansons et enchanté d’une loi absurde. Salutaire.
L’argument : En Iran, depuis la révolution de 1979, les femmes n’ont plus le droit de chanter en public en tant que solistes. Une jeune compositrice, Sara Najafi, avec l’aide de trois artistes venues de France (Elise Caron, Jeanne Cherhal et Emel Mathlouthi), va braver censure et tabous pour tenter d’organiser un concert de chanteuses solo.
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Notre avis :
C’est l’histoire d’un concert et c’est l’histoire d’un combat. Depuis la révolution, en Iran, la musique est synonyme de péché et donc de clandestinité. Plus particulièrement, on s’en doute, quand ce sont des femmes qui sont à l’origine du chant. Une loi absurde prévoit en effet que les femmes iraniennes n’aient pas le droit de chanter en public en solo. Les hommes, si. Les femmes, non. Interdites de concert, tant que durera le règne de la censure. C’est donc la bataille de David contre Goliath que de tenter d’organiser un concert de voix féminines en Iran. C’est cette lutte qu’a entrepris la chanteuse Sara Najafi, filmée pour l’occasion par son frère, le documentariste Ayat Najafi.
Le film réside dans cette démonstration : Le geste le plus simple chez nous devient un combat de plusieurs années en Iran. Le choc culturel a ainsi lieu sur l’écran et dans la salle. Quand on aperçoit les chanteuses Jeanne Cherhal et Elise Caron débarquer en Iran et réaliser en même temps que nous, spectateurs, l’ampleur du désastre culturel que représente cette interdiction. Quand le concert mis en place durant des mois menace d’être annulé deux jours avant la représentation. Quand il faut sans relâche recourir à mille stratagèmes pour que cette performance, devenue exceptionnelle par la force des choses, soit possible. Les femmes n’ont pas le droit de chanter seules ? Ajoutons des hommes en voix de fond, qui feront plus sur scène office de figurants pour tromper le régime qu’autre chose.
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No land’s song. Ce titre pourrait se traduire littéralement par « la chanson d’aucun pays ». Cette petite musique, c’est celle de la liberté, du droit inaliénable des peuples à la révolte. Trois cent personnes ont pu assister à cette représentation. C’est peu mais symboliquement, le geste est si fort qu’ils auraient pu être des milliers. Faire entendre un chant rare est une gageure. C’est l’occasion de voir un spectacle devenu unique. D’ailleurs, lorsque qu’une célèbre chanteuse iranienne entonne un air, un des guitaristes se met à pleurer. Surprise, elle déclare avec humour : « Nous sommes si misérables qu’on fait pleurer tout le monde. » Quelle meilleure façon de semer l’espoir que d’user du verbe plutôt que de la détresse ? Le chant est érigé, encore, comme un rempart à la barbarie.
Le seul petit reproche qu’on pourrait faire à No land’s song c’est de régler avec moins de brio que son illustre ainé Jafar Panahi la question de la mise en scène documentaire dans un pays aussi répressif que l’Iran. Le cadre est souvent maladroit, le format numérique nuit sans conteste à la beauté des images. Mais le documentaire pas menteur nous livre un propos si essentiel que ces défauts s’effacent la plupart du temps.
On ressort de No land’s song non pas abattu mais empli d’un espoir nouveau. Ce film est un porte-voix. Celui d’une génération entière qui refuse de se laisser dicter son comportement par un régime totalitaire. Le documentaire d’Ayat Najafi n’est pour l’instant pas visible dans son pays natal, mais faisons confiance aux objecteurs de conscience locaux et à l’internet mondial pour que les iraniens, premiers concernés, puissent le découvrir malgré tout.
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