Le 27 juin 2018
Alliage de force et de finesse, ce spectacle révolté, survolté, de la scène contemporaine congolaise, met la claque au public parisien. Il fend toutes les frontières pour éclater dans les coeurs. Le coup de foudre de la saison !
- Genre : Opéra, ballet & danse
- Plus d'informations : https://lavillette.com/
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Résumé : Danseur inclassable, perçu au Congo comme un « fou qui voyage », DeLaVallet Bidiefono décide un jour de créer sa propre compagnie : Baninga. Il lui construit un lieu à une heure de route de Brazzaville. Dix ans plus tard, en décembre 2015, naît l’espace Baning’Art. Alors naturellement, il a eu envie d’en faire un spectacle. Avec l’auteur, metteur en scène et comédien Dieudonné Niangouna, figure de proue de la nouvelle scène congolaise, ils aiment appeler leurs créations « Monstres » en hommage aux hommes et femmes qui s’opposent avec une résistance toute poétique aux dictatures en place.
Notre avis : Émergeant d’un brouillard nocturne, le premier danseur esquisse des figures au ralenti pour s’évanouir dans les brumes. On craint quelques minutes d’assister à l’adaptation afro d’une mièvrerie parisienne, puis tout bascule. La scène s’allume, des silhouettes se dessinent et les danseurs se présentent tour à tour en courant vers le public tandis que basse et batteries (deux) se mettent en branle du haut d’un échafaudage. A partir de ce moment, le spectacle ne touche plus terre. Les textes, la chorégraphie, l’accompagnement rythmique, fusionnent en un tout brut et sophistiqué. On se soulève de son siège pour danser aussi, on se sent pousser des ailes en les regardant. Le batteur chante tel un haute-contre, une pièce qu’aurait pu composer Purcell, puis on est happé par du hardfunk dans une manifestation à Brazzaville qui tourne au combat de rue ou vire à la transe de boîte de nuit. Le metteur en scène évite gracieusement tous les clichés tribaux de l’Afrique traditionnelle permettant une lecture contemporaine de ce monstre, puisque c’est ainsi qu’il nomme sa création.
- Christophe Pean
Une comédienne dénonce poétiquement l’oppression de la personne humaine sur le tempo des percussions. Quasiment nue, elle se farine, se verse de la bière sur la tête puis scande son désespoir, slam son martyr rageur contre le pouvoir tyrannique. Elle adresse ses mots à ce qui reste d’humain dans tout système politique totalitaire, si il en reste, et aux éternels merveilleux perdants qui s’y opposent. Rien d’une diatribe contre l’Europe qui, on le sait, organise pourtant son confort financier sur la débâcle sociale africaine, mais plutôt une attitude de principe. Celle de toute libération arrachée aux fumiers, quelque soit le continent, la couleur de peau, l’époque.
- Christophe Pean
Le combat contre l’asservissement est la valeur suprême de la noblesse de la pensée humaine. Ce spectacle le fait descendre dans les corps. Les danseurs sont brillants. L’essoufflement n’éteint jamais sur leurs visages ces larges sourires optimistes. Les chairs toniques dégagent une puissance surnaturelle. On scrute l’épaisseur d’un bras, d’un ventre, d’une musculature, l’ondulation de la colonne vertébrale dans la lumière rasante.
- Christophe Pean
Tous ensemble, ils sautent énergiquement pour se dresser dans ce combat. Élévation vers la liberté qui même si elle ne dure que le temps d’un saut n’est pas un divertissement au regard des atrocités réelles du terrain (tueries, viols et incendies des domiciles, des écoles et des hôpitaux) commises par des agents de l’Etat, en complicité avec les milices locales.
Un spectacle qui ne compte pas pour rien, qui compte, qui compte énormément même dans cette programmation ouverte et intelligente du théâtre de la ville.
En toute fin, un homme s’habille de lourdes ailes de métal. Si leur poids condamne l’envol, cette armure de coléoptère de bronze est comme la danse, elle est la fine et sublime protection qu’offre l’art contre les corruptions du monde.
A voir, à lire, à applaudir debout avec tous les visages pâles, en sifflant de tous ses poumons en signe de ralliement !
Chorégraphie DeLaVallet Bidiefono
Dramaturgie Aurélia Ivan
Danseurs DeLaVallet Bidiefono, Destin Bidiefono, Fiston Bidiefono, Rébecca Chaillon, Ella Ganga, Marie-Bède Koubemba, Cognès Mayoukou, Aïper Moundou, Lousinhia Simon
Musiciens Francis Lassus, Armel Malonga, Raphaël Otchakowski (distribution sous réserve)
Galerie Photos
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