La légèreté du pachyderme
Le 13 avril 2025
Un traumatisme ? Rien de tel que quelques cartons pour vous remettre. Un film simpliste et répugnant, victime du star-system comme du manque de point de vue de son metteur en scène. Jodie, réveille-toi !


- Réalisateur : Neil Jordan
- Acteurs : Jodie Foster, Jane Adams, Nicky Katt, Terrence Howard, Naveen Andrews, Mary Steenburgen, Larry Fessenden, Zoë Kravitz
- Genre : Drame, Thriller, Nanar
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Warner Bros. France
- Durée : 2h02mn
- Date télé : 7 septembre 2021 20:50
- Chaîne : TCM Cinéma
- Titre original : The Brave One
- Date de sortie : 26 septembre 2007

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Résumé : Animatrice de radio new-yorkaise, Erica Bain peine à se remettre de l’agression qui a coûté la vie à son fiancé. Traumatisée, elle se met à hanter les rues, la nuit, à la recherche des hommes qu’elle tient pour responsables de son malheur, et se transforme peu à peu en justicière. Si le public se passionne pour ses exploits anonymes, la police, elle, est sur les dents. Traquée par un détective obstiné, Erica s’interroge : sa croisade vengeresse est-elle vraiment la bonne solution ?
Critique : Autant vous prévenir tout de suite : il nous est impossible de parler de ce film sans révéler sa fin. Pour celles et ceux qui n’en veulent rien savoir, ne surtout pas lire la fin de l’article !
L’auto-justice et la vengeance ne sont pas des sujets inintéressants. Ils peuvent même se révéler passionnants pour ce qu’ils révèlent de la noirceur des tréfonds de l’âme humaine. Encore faut-il pour cela les manier avec précaution, les interroger, n’en point faire un spectacle, et considérer les spectateurs comme une masse gorgée de pop-corn, prête à payer dix euros pour se repaître de violence gratuite.
Ce qui manque ici à Neil Jordan, cinéaste inégal, parfois inspiré, rarement très fin, c’est un point de vue. Il semble bien embarrassé devant une Erica Bain qui, de paisible animatrice radio au bord du mariage, se transforme en monstre assoiffé de sang (les réminiscences d’Entretien avec un vampire ?). Alors il fait n’importe quoi, à grands coups d’esbroufe.
Passons sur les heureux hasards qui mettent systématiquement son héroïne en présence de salauds (on se marre beaucoup durant ce film, truffé d’incohérences et de dialogues crétins) pour déplorer l’extrême violence des scènes, saisies par une caméra complaisante et hystérique. Tout respire la vacuité dans ce projet qui ne se donne jamais les moyens de ses ambitions et s’adonne en permanence aux joies du simplisme (figurez-vous qu’à New York, depuis le 11 septembre, les gens ont peur). En outre, les auteurs se targuent de faire preuve d’originalité en confiant une histoire de vengeance à une femme. Ouah, quelle audace ! La mariée était en noir, Kill Bill 1 et 2 (choix purement subjectifs, parmi une pléthore d’autres à disposition), ça leur dit quelque chose ? Ce n’est pas ce genre de réflexion qui va faire reculer le sexisme.
Pour finir, on aimerait bien dire à Jodie Foster, qu’on aime beaucoup et depuis longtemps, qu’on lui saurait gré de réapprendre à lire des scripts. Cela lui permettrait peut-être de faire des choix un peu plus intéressants que ceux qui la cantonnent aux rôles d’action women redresseuses de tort, condamnées à flinguer des types pour sauver des filles (Panic Room, Flight Plan). Totalement cadenassée dans son personnage et son professionnalisme, l’actrice devient la caricature d’elle-même, croyant sans doute bien faire et poser d’importantes questions quand elle ne fait que servir le star-system et une morale répugnante. Car n’est-ce pas pour ne pas voir une star très populaire finir en taule qu’Erica Bain s’en sort, cautionnant ainsi le crime, plus efficace qu’une thérapie et que la justice (où sont passés Les accusés ?) ? À moins que ce ne soit pour signifier que décidément, Bien et Mal sont étroitement liés dans ce bas monde. Nous, entre ricanements et dégoût, on se sauve de la salle en courant, absolument consternés.