Midi-minuit - La chronique BD

Hommage au cinéma méconnu et avant-gardiste d’une époque révolue, aux héros des pellicules de l’ombre, aux spectateurs connaisseurs, Midi-Minuit est une BD qui voudrait être un de ces films italiens mêlant policier comique, horreur fantastique et soupçon érotique. D’entrée, c’est par un éloge des salles obscures qui continuent de projeter des films oubliés à des heures impossibles, ces petits cinémas indépendants qui font vivre les passions du grand écran. Ce prologue met très vite dans l’ambiance, donnant envie de voir ces films évoqués, et cette envie se poursuit tout au long de l’histoire, car les affiches rutilantes, les synopsis alléchants et les critiques dithyrambiques s’enchaînent. De fait, la trame policière se révèle secondaire, sans réel suspense, le tueur n’apparaissant pas particulièrement inquiétant, car seule compte l’aura du réalisateur, son travail acharné et inachevé, son témoignage d’une époque fantastique et d’une épopée artistique.

© Dupuis

Si Doug Headline a su produire un scénario pétri de passion, Massimo Semerano l’a coulé dans une Italie gorgée de romantisme naïf, de douce nostalgie et de personnages charmants. Curieusement, le duo frenchy navigue au milieu des intrigues et des assassinats avec nonchalance, humour et impatience, mais avec l’unique dessein de parler de cinéma, de faire des références et des liens. Son dessin est imprégné du passé, photographies, affiches ou extraits véritables venant s’insérer, comme une BD qui se serait égaré d’époque. Pas de grands discours style roman graphique, pas de planches spectaculaires ou de dégradations des âmes style polar moderne, mais plutôt une virée tranquille dans un passé idéalisé.

© Dupuis

Suintant la passion cinématographique, Midi-Minuit s’assimile bien à une de ces séances tardives, un peu désuètes mais terriblement intéressantes, qui en font une œuvre originale, avant-gardiste et dont l’essence doit être décelée plutôt que visible au premier coup d’œil.