Le 10 novembre 2023
Le premier long métrage en tant que réalisateur de Patrick Bouchitey est une adaptation picaresque de Bukowski, qui tord le cou avec bonheur au politiquement correct.
- Réalisateur : Patrick Bouchitey
- Acteurs : Jackie Berroyer, Jean-François Stévenin, Patrick Bouchitey, Jean-Pierre Castaldi, Patrick Fierry, Roland Blanche, Jean-Pierre Bisson, Marie Mergey, Laura Favali, Consuelo de Haviland
- Genre : Comédie dramatique, Noir et blanc, Buddy movie
- Nationalité : Français
- Distributeur : Malavida Films
- Durée : 1h30mn
- Reprise: 15 novembre 2023
- Âge : Interdit aux moins de 16 ans
- Date de sortie : 22 mai 1991
- Festival : Cinémathèque de Nice, Festival de Cannes 1991
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– Reprise en version restaurée : 15 novembre 2023
Résumé : Les tribulations de Simon et Dédé, deux amis paumés et soudés l’un à l’autre par une quête d’oubli et d’exaltation. La nuit, désinhibés par l’alcool et électrisés par Jimi Hendrix et le rock des années 1960, ils enchaînent les rencontres insolites et déjantées jusqu’à un soir de pleine lune...
Critique : Avant Lune froide, Patrick Bouchitey était surtout connu comme acteur, moniteur de colo harcelé par Dewaere dans La meilleure façon de marcher, pote en vadrouille dans Le plein de super de Cavalier, ou prêtre illuminé dans La vie est un long fleuve tranquille. Lune froide était déjà un court métrage qu’il avait réalisé en 1988, et qui avait obtenu un César. En compétition officielle à Cannes en 1991, Lune froide le long en est une déclinaison en quatre-vingt-dix minutes, dans lequel le court est incrusté sous forme de flashback. Coécrit avec Jackie Berroyer, le scénario est adapté de deux nouvelles de Charles Bukowski. D’emblée, Patrick Bouchitey nous emmène sur la piste du conte picaresque, narrant le quotidien irréaliste de deux losers à la fois pathétiques et sympathiques, interprétés par lui-même (Dédé) et Jean-François Stévenin (Simon). Les deux compères, pieds nickelés aux allures d’éternels ados alors qu’ils ont atteint la quarantaine, passent leur vie entre des bistrots sordides de Bretagne, les coups d’un soir foireux et le squat dans une caravane stationnée dans la villa de la sœur et du beau-frère de Dédé (Laura Favali et Jean-Pierre Bisson).
- Jean-François Stévenin et Patrick Bouchitey dans "Lune froide"
- © Malavida
Quelque part entre Laurel et Hardy et les vitelloni, les deux compères ne comptent pas faire d’effort pour intégrer les normes sociales. Mais si Dédé se réjouit de sa vie émaillée de blagues de potache et d’embrouilles, Simon peine à cacher un réel mal-être. Lune froide séduit par sa poésie à la fois légère et sombre, qui culmine dans une séquence quasiment surréaliste où le malaise s’installe à travers une passion nécrophile. C’est ce qui avait d’ailleurs valu au film une interdiction au moins de seize ans à sa sortie (ce qui est toujours le cas à l’occasion de sa reprise dans les salles en version restaurée à l’initiative du distributeur Malavida en 2023). À la fois classique dans sa forme et audacieux dans son refus d’une stricte narration linéaire, Lune froide est au carrefour de plusieurs tendances du cinéma français, et l’on songe aussi bien aux Valseuses de Blier qu’aux univers décalés de Rozier ou, bien sûr, Jean-François Stévenin.
- Patrick Bouchitey dans "Lune froide"
- © Malavida
Certes, les ayatollahs du néoféminisme ne manqueront pas de déplorer la tonalité « viriliste » de ce buddy movie et de regretter l’image de la femme qui y est donnée. C’est oublier que les deux protagonistes sont bien plus fragiles qu’ils n’en ont l’air et que la subversion a souvent donné quelques-uns des plus beaux objets du septième art, de L’âge d’or à La grande bouffe. Lune froide n’atteint pas ses sommets, peut-être en raison d’un travail visuel pas assez élaboré, et du jeu de comédien un peu pénible de Bouchitey. Pour autant, il s’agit d’une réussite encore trop méconnue du cinéma français des années 90, qu’il convient de (re) découvrir. Et il est dommage que le réalisateur n’ait par la suite signé qu’un seul autre long métrage, à savoir le thriller Imposture, moins percutant.
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