Coming out, comme ils disent en anglais
Le 13 juillet 2024
Une déclaration d’amour à la jeunesse homosexuelle dans un film qui témoigne d’une bienveillance toute nouvelle de Hollywood à l’égard des LGBTQ.
- Réalisateur : Greg Berlanti
- Acteurs : Jennifer Garner, Josh Duhamel, Nick Robinson, Logan Miller, Alexandra Shipp, Katherine Langford , Jorge Lendeborg Jr.
- Genre : Comédie, Drame, Comédie dramatique, Romance, LGBTQIA+
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Twentieth Century Fox France
- Durée : 1h50mn
- Date de sortie : 27 juin 2018
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Résumé : On mérite tous une première grande histoire d’amour. Pourtant pour Simon, c’est compliqué. Il a une vie normale, dans une famille qu’il adore et entouré d’amis extraordinaires, mais il garde pour lui un grand secret : personne ne sait qu’il est gay et il ne connaît pas l’identité de son premier coup de cœur, avec qui il communique en ligne. Alors que son secret est menacé d’être révélé, la vie de Simon bascule dans une aventure aussi drôle que bouleversante... Ses amis prendront alors une place essentielle pour l’aider à changer sa vie et découvrir le premier amour.
Critique : Hollywood vient de faire son coming out. Félicitations, même s’il était tout de même grand temps ! Alors que l’atmosphère gay friendly semble être devenue autant de rigueur qu’un dress code aux Oscars, ce n’était pas pour autant que de grands studios comme la Fox allaient se décider à faire des homosexuels les héros de leurs grosses productions. Et pendant que les amourettes hétérosexuelles peuplaient une majorité écrasante du paysage audiovisuel, les LGBTQ attendaient de se sentir enfin concernés par un personnage à leur image, loin des clichés véhiculés par une industrie qui n’y connaissait visiblement rien et qui, en plus, ne cherchait pas à comprendre les besoins d’une communauté en quête de représentations positives et réalistes.
Ce n’est donc pas pour rien qu’un réalisateur ouvertement homosexuel comme Xavier Dolan (par ailleurs doubleur de Nick Robinson pour la version québécoise du film) a tenu à réagir sur Instagram en apprenant la sortie de Love, Simon au cinéma, déclarant notamment "Ne parlons pas du film en lui-même, mais concentrons-nous sur son existence".
Il a toutes les raisons d’avoir conscience des progrès du septième art en la matière : si le vote de la loi Taubira en France a révélé aux politiques que les lesbiennes, gays, bisexuels et transsexuels étaient des électeurs comme les autres, à caresser donc dans le sens du poil, la société a compris qu’ils étaient avant tout des consommateurs ! L’industrie cinématographique étant un commerce comme un autre, qui a très bien compris que le client est roi au nom du sacro-saint box-office, il était donc temps de donner aux LGBTQ ce qu’ils méritaient.
- © 2017 Twentieth Century Fox
Place donc à Simon, un adolescent comme les autres, qui aime traîner avec ses amis, écouter de la musique et manger des Oréo, en cachant à tout son entourage son orientation sexuelle par peur du rejet. Alors qu’il entretient une relation épistolaire anonyme avec un camarade de lycée, il est victime d’un maître-chanteur qui va peu à peu l’obliger à sortir du placard.
Loin de n’être que le portrait d’un jeune homme qui va devoir s’assumer, le film expose l’absurdité de la "norme" pour tous en posant des questions cruciales qui soulèvent les dérives d’une société dans laquelle l’hétérosexualité s’impose comme une règle. Avec des séquences qui marquent, la jeunesse d’aujourd’hui s’interroge sur ses obligations, sa liberté sexuelle et sa place dans une société dans laquelle elle ne se retrouve pas. Love, Simon ne s’attarde pas seulement sur le cheminement qui amène un jeune garçon à s’assumer aux yeux de tous, mais aussi sur les difficultés pour les adolescents à faire des choix parfois contraires aux attentes de leurs parents.
A cela s’ajoutent de nouvelles menaces sur des personnes fragiles qui se cherchent encore, comme les réseaux sociaux, dont le film nous présente les pires dérives. Difficile de protéger sa vie privée et donc ses petits secrets inavouables quand n’importe qui peut les partager avec des gens que cela ne concerne pas. La jeunesse d’aujourd’hui doit relever de nouveaux défis alors que leurs propres parents n’ont pas encore le recul suffisant sur les dérives d’Internet, ce qui complique encore plus une quête d’identité déjà délicate à cet âge.
- © Twentieth Century Fox France
Fort heureusement, un film comme Love, Simon existe maintenant et montre que la bienveillance n’a pas encore disparu. Pour une fois, le coming out n’est pas représenté comme une étape désastreuse dans la vie d’un jeune gay, qui n’est pas non plus ici un marginal mal-aimé ou un solitaire qui a peur des coups. Simon est bien entouré et mène une existence privilégiée auprès d’une famille aimante et d’amis biens dans leurs baskets et leur époque. Alors certes, tout le monde n’a pas la chance de grandir dans un environnement aussi positif, ce qui gâche un peu le réalisme d’un film dont la simple existence fait du bien. Le lycée est aussi propret que celui de High School Musical, les professeurs prennent partie pour défendre leurs élèves en omettant d’éventuelles œillères et les parents sont tellement à l’écoute et compréhensifs qu’on imagine mal que, quelque part, puisse exister des personnes que l’homosexualité dérange. Si Love, Simon ne s’inscrit pas non plus dans un monde parallèle, il aurait pu tout de même faire état des difficultés que tous les lycéens rencontrent tôt ou tard avant d’avoir atteint l’âge adulte.
- © Twentieth Century Fox France
Il n’y avait également nul besoin de brasser certains des pires clichés sur les homosexuels, entre le gay outé du lycée, caricature efféminée qui n’a de cesse de s’intéresser à sa coiffure et à ses ongles ou en dépeignant la vie de Simon qui s’imagine s’assumer totalement à l’université, dans sa chambre pleine de rainbow flag et de photos de couples gays qui s’embrassent, avant de se rendre en classe en dansant sur du Whitney Houston. Ces scènes qui prêtent à sourire gâchent surtout le message et montrent que Hollywood a encore un long chemin à parcourir.
Joliment interprété et porteur d’un message d’amour positif et espérons-le communicatif, Love, Simon est peut-être le premier d’une longue lignée de films où les LGBTQ ont enfin une place et surtout une visibilité, à l’image d’une société où la "norme" revendiquée par certains ne veut rien dire. Si l’on considère qu’un jour, elle a eu quelque chose à faire dans la quête du bonheur, arguons que le film ne peut certes pas faire de mal, mais surtout beaucoup de bien.
Alors que le film a connu un succès considérable aux États-Unis et provoqué le coming out de beaucoup de jeunes gays, enthousiasmés par l’atmosphère chaleureuse du film, laissons le mot de la fin à Xavier Dolan : "Je suis heureux de la façon dont les choses ont évolué, et malgré la solitude que tu ressens quand tu es un adolescent qui fait son coming out, je me suis senti soutenu. J’ai été chanceux. Mais la plupart des jeunes ne le sont pas. Love, Simon est un grand pas pour eux, et pour nous. Merci à tous les artistes et personnes impliquées". On aurait pas dit mieux !
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