Lourdes - la critique

Sur un sujet casse-cou, Jessica Hausner signe un drame sensible, mais trop figé et distant pour atteindre la grâce

L’argument : Christine a passé la majeure partie de sa vie immobilisée dans un fauteuil roulant. Elle se rend à Lourdes, site de pèlerinage légendaire au coeur des Pyrénées, afin de sortir de son isolement. Elle se réveille un matin apparemment guérie par un miracle. Le leader du groupe de pèlerins, un séduisant membre de l’Ordre de Malte, commence à s’intéresser à elle. Alors que sa guérison suscite jalousie et admiration, Christine tente de profiter de sa nouvelle chance.

Notre avis : Le regain d’intérêt suscité par la foi ou l’engagement religieux a donné lieu à des films qui travaillent souvent, quels que soient leurs sujets respectifs, à une même distance formelle. Corollaire de ce choix : les dialogues y servent principalement de support aux conflits opposant les personnages, parfois au détriment d’une mise en scène qui, derrière l’argument de l’épure, trahit malgré elle une frilosité à aborder de front des questions supposées trop délicates. Il faut le talent d’un Beauvois pour filmer avec retenue la vie monastique (dans Des hommes et des dieux) tout en contournant le piège de l’impersonnalité, revers inévitable d’une trop grande prudence.
De ce point de vue, il faut avouer que Lourdes peine d’abord à trouver un équilibre. Ici, le conflit entre les personnages, que l’on devine passionnel et intérieur, est filmé en plans moyens et le plus souvent fixes, au risque de figer l’émotion réelle des acteurs. Sur un sujet casse-cou (Christine est atteinte d’une sclérose en plaques), Jessica Hausner a choisi de faire une oeuvre statique, où les rares mouvements de caméra ne font que conforter l’immobilisme latent, si bien qu’elle peine à embrasser son sujet et prive parfois d’intérêt une intrigue au demeurant originale et prêtant à l’émotion.

Si Lourdes s’en tient à son sujet, c’est néanmoins avec une modestie séduisante. Le scénario a la bonne idée de faire jouer, dans un contexte original, un trio amoureux bien campé (excellente idée d’opposer la rigueur du jeu de Testud au charme angélique et volage de Seydoux). La progression dramatique est efficace, et la séquence finale ménage une belle conclusion en atténuant la rigueur du drame par l’élégance et la légèreté trompeuse d’une soirée dansante. Elégance qui caractérise très bien ce film un peu long, lui-même figé par l’incertitude qu’il voudrait nous communiquer, mais qui demeure une découverte intéressante en cette fin juillet où les géants se disputent généralement les têtes d’affiche.