Le 10 novembre 2020
La première incursion de Christophe Honoré dans le cinéma pour enfants est une vraie réussite, qui restitue l’implacable réalisme des textes écrits par la comtesse de Ségur, tout en organisant des expérimentations visuelles réjouissantes.
- Réalisateur : Christophe Honoré
- Acteurs : Muriel Robin, Anaïs Demoustier, Golshifteh Farahani
- Genre : Comédie, Film pour enfants
- Nationalité : Français
- Distributeur : Gaumont Distribution
- Durée : 1h46min
- Date télé : 26 février 2022 20:40
- Chaîne : OCS Max
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Critique : Les agitations d’une petite turbulente animent la caméra de Christophe Honoré d’une vie intense, décuplent sa créativité, dès l’enchaînement des premiers plans. Pour son premier film destiné aux enfants, le réalisateur adapte deux textes de la trilogie écrite par la comtesse de Ségur avec un bonheur constant, au plus près de son héroïne, saisissant sa frénésie de bêtises par une caméra instable. Honoré organise de magnifiques trouvailles visuelles, comme cet écureuil d’animation, au regard inquiet, qui terminera d’abord en cage, puis les deux pattes brisées parce qu’il a voulu fuir son malheur. L’écueil de l’académisme est constamment évité grâce à une variété de tons et de plans. Le rythme ralentit parfois pour accompagner une procession irrévérencieuse qui finit par insulter une défunte poupée, ou pour saisir la tristesse d’une enfant momentanément punie de sa soudaine cruauté, que le metteur en scène n’édulcore jamais (le massacre des poissons du bocal en constitue la preuve la plus tangible).
Si la vie se déchaîne, c’est qu’elle semble anticiper les vrais drames à venir : d’abord l’angoisse de quitter la propriété familiale, puis les tragédies consécutives au voyage vers l’Amérique, qui laisseront Sophie orpheline. La deuxième partie du long métrage, dans des couleurs beaucoup plus sombres, reprend la trame des Petites Filles Modèles, de l’accident subi par Madame de Rosbourg et sa petite fille Marguerite à la maltraitance infligée par l’horrible Fédora Fichini, que Muriel Robin incarne avec un cynisme glaçant, trouvant là un de ses meilleurs rôles. A rebours du confort dans lequel elle vivait et de l’indulgence dont elle bénéficiait, l’héroïne entreprend de résister à cette adversité faite femme, tout en cheminant dans son deuil, un motif récurrent du cinéma de Christophe Honoré (qu’on se souvienne des films Les Chansons d’amour ou Homme au bain).
Les variations musicales proposées par Alex Beaupain, fidèle compagnon artistique du metteur en scène, habillent d’une manière très convaincante cette œuvre hautement recommandable, qui restitue avec une grande intelligence l’âpreté des récits écrits par la comtesse de Ségur et n’abandonne jamais sa volonté initiale : travailler sur la matière même de l’image.
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