Le 26 juin 2017
Un couple glamour, des détails soignés, de fabuleux seconds rôles pour ce film souvent agréable mais terriblement daté.
- Réalisateur : René Clair
- Acteurs : Jean Desailly, Gérard Philipe, Michèle Morgan, Pierre Dux, Yves Robert
- Genre : Comédie, Drame, Romance
- Nationalité : Français, Italien
- Editeur vidéo : TF1 Vidéo
- Durée : 1h43mn
- Date de sortie : 26 octobre 1955
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– Sortie DVD : le 20 juin 2017
– Prix Louis-Delluc 1955
Résumé : Sûr de son charme, un soldat en garnison parie avec ses camarades qu’il est capable de séduire la première femme qui passe, avant les grandes manœuvres. Il met son plan en œuvre et tombe amoureux de la jeune modiste choisie au hasard.
Notre avis : On a un peu oublié aujourd’hui René Clair, qui fut un temps LE grand cinéaste français ; on parle régulièrement de le réévaluer, après la malédiction de la Nouvelle Vague qui en fit l’un des parfaits représentants de la « Qualité française », mais si à peu près tout le monde est d’accord sur ses premiers films ou sur sa période américaine, Les grandes manœuvres est un parfait exemple de tout ce que vomissait Truffaut. Plus de cinquante ans après ces diatribes, on peut sans doute juger plus sereinement cette œuvre de prestige, interprétée par une pléiade de comédiens qui en font une partie du sel : outre les protagonistes, Michèle Morgan et Gérard Philipe, on voit défiler Yves Robert, Jean Desailly, Pierre Dux, Dany Carrel, Judith Magre, ou encore le fameux Daniel Sorano, alors célèbre pour son Cyrano, et même la débutante Brigitte Bardot. Autant dire que c’est le ban et l’arrière-ban du théâtre et du cinéma français des années 50 qui se trouve réuni pour célébrer l’élégance et le charme. L’élégance, en effet, transpire à chaque image : des décors aux costumes, des dialogues à la diction, elle irrigue le film et lui donne un caractère désuet, certes agréable, mais qui à notre sens limite l’adhésion et la profondeur. On est dans le propret, le sage, l’aseptisé beaucoup plus que dans la fièvre – Madame de …, auquel on pense fugitivement et qui est à peu près contemporain, est autrement plus passionné et plus tragique. Ainsi des murs et des pavés immaculés, de la boutique de modiste quasiment décor de théâtre : c’est du studio dont l’artifice revendiqué ne masque pas la fadeur.
Soyons modéré : il y a de belles choses dans Les grandes manœuvres. La fin en particulier, avec le suspense sur l’ouverture des volets, repose sur une idée émouvante et forte ; de même le goût du détail soigné ou les petits ajouts comiques (les deux femmes se saluant avant de remarquer qu’elles ont un chapeau identique) donnent-ils un peu de corps à cette histoire d’amour bavarde et convenue. C’était d’ailleurs la force du cinéma de ce temps que de savoir utiliser les seconds rôles (on oserait presque dire les figurants) à leur meilleur, donnant presque à chacun « son » moment. Dans ce cadre, reconnaissons-le, c’est un régal : les sœurs commères ou le colonel lâche fonctionnent comme des types délectables.
Mais on s’avoue peu sensible aux atermoiements amoureux de Michèle Morgan et de Gérard Philipe, dont le jeu limité peine à traduire la violente passion. Et que dire de la morale simpliste (en gros, on est puni par où l’on a péché), à la fois prévisible et très datée ? Que dire encore de ces éclairages certes soignés, mais constamment fabriqués pour simplement mettre en lumière les vedettes ? De ces rebondissements poussifs ? De cette diction impeccable qui annihile toute émotion ?
Les grandes manœuvres est un témoignage, celui du « grand film de prestige », impeccable et propre sur lui. On peut en aimer même le caractère guindé fondé sur l’artifice. On peut aussi se dire que tout cela a vieilli, que la pompe académique guette à tout instant. Si l’on est bien luné, on partagera les affres d’Armand et les inquiétudes de Marie-Louise. Pour notre part et malgré les qualités objectives du film (on est loin d’une œuvre bâclée), il nous paraît prisonnier de conventions un brin poussiéreuses et au total assez froid.
Les suppléments :
Outre la bande-annonce d’époque, le DVD propose la désormais rituelle conversation entre Guillemette Odicino et Eric Libiot (16mn), vive et agréable. Ils sont bien d’accord pour louer le film, sa mise en scène et son élégance et même si l’on n’est pas entièrement d’accord avec eux, ils ont le mérite d’argumenter avec précision.
L’image :
Conforme à l’esthétique du film, la copie est propre, lisse et colorée, débarrassée de toute scorie. De très rares instabilités.
Le son :
La piste mono a conservé le charme des ans avec une légère acidité, mais des dialogues limpides et une présence musicale très claire. De la belle ouvrage.
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