Le 10 mai 2023
Dans son nouveau film, Bruno Podalydès parvient à proposer une critique savoureuse et drôle de notre société moderne connectée, sans jamais tomber dans la vulgarité et le sarcasme.
- Réalisateur : Bruno Podalydès
- Acteurs : Sandrine Kiberlain, Denis Podalydès, Jean-Noël Brouté, Philippe Uchan, Michel Vuillermoz, Isabelle Candelier, Bruno Podalydès, Luàna Bajrami, Yann Frisch
- Genre : Comédie
- Nationalité : Français
- Distributeur : UGC Distribution
- Durée : 1h32mn
- Date télé : 10 mai 2023 20:55
- Chaîne : Arte
- Date de sortie : 16 juin 2021
- Festival : Festival de Cannes 2020
L'a vu
Veut le voir
Résumé : Alexandre, chômeur déclassé, a deux mois pour prouver à sa femme qu’il peut s’occuper de ses deux jeunes enfants et être autonome financièrement. Problème : The Box, la start-up très friendly qui veut l’embaucher à l’essai a pour dogme : « Pas d’enfant ! », et Séverine, sa future supérieure, est une « tueuse » au caractère éruptif. Pour obtenir ce poste, Alexandre doit donc mentir... La rencontre avec Arcimboldo, « entrepreneur de lui-même » et roi des petits boulots sur applis, aidera-t-elle cet homme vaillant et déboussolé à surmonter tous ces défis ?
Critique : Rarement on aura vu un générique de début de film aussi exaltant et savoureux. Car Denis Podalydès plante le décor de son nouveau long métrage Les 2 Alfred, avec une délicieuse reprise du tube de Daho "Le Grand Sommeil". Pour une fois, le cinéaste laisse s’écouler la chanson quasiment jusqu’à son terme, pour notre plus grand plaisir. Le ton est donné. Celui d’un cinquantenaire, père de deux jeunes enfants, au chômage, et qui ne correspond plus vraiment au modèle de travail dominant des startups, où l’on n’a pas de bureau à soi, où l’on joue au baby-foot, où il n’existe pas de hiérarchie, ni de discriminations apparentes, sauf qu’in fine, ce qui compte, c’est le cash que font rentrer les collaborateurs. Car la force de cette comédie grinçante et le ravissement qu’elle engendre se situe dans le contre-pied que Podalydès inflige à tous ces modèles néo-managériaux modernes, qui cautionnent le franglais à tout va, les tapes sur l’épaule, et surtout la parfaite illusion que le monde d’avant, à l’époque où l’industrie fonctionnait encore et où l’informatique n’avait pas pris une telle place dans les bureaux, n’avait rien compris aux modalités d’organisation du travail.
- ©Anne-Francoise Brillot-Why Not Productions
Denis Podalydès, qui est tout autant comédien, réalisateur que poète, peut se permettre de se moquer de ce nouveau monde. Certes, on pourrait lui faire le reproche d’être un peu réactionnaire, mais il se trompe si peu sur l’appréciation de cet univers, qui fait miroiter une façon de travailler débarrassée des carcans de l’ancien monde. Pour autant, la discrimination et la souffrance au travail perdurent. Podalydès décrit une entreprise où l’on a le droit de fixer soi-même son salaire et ses vacances, sous réserve de bosser vingt-quatre heures sur vingt-quatre tout de même. En revanche, on n’a pas le droit d’avoir des enfants. Le héros principal qui débarque dans la start-up, sans d’ailleurs bien comprendre ce qu’on attend de lui derrière le barbarisme anglais qui modélise sa fonction, doit alors user de mille et une pirouettes pour cacher l’existence de ses progénitures.
- ©Anne-Francoise Brillot-Why Not Productions
Il y a beaucoup de poésie et de joie dans ce long-métrage. Le cinéaste refuse les cris de dénonciation. Il use de dialogues savoureux très drôles, de comiques de situation à la manière d’une scène de théâtre. En réalité, s’il inscrit son récit dans le modernisme branché où les vocables anglais, les systèmes d’intelligence artificielle, les ordinateurs ultra-performants et les drones en constituent les personnages principaux, il déroule avec une jolie sagesse les invariants moraux et psychologiques qui font humanité. Podalydès convoque la solidarité, l’échange, la débrouille, l’éducation comme axes fondamentaux de ce qui crée le ciment d’une société. On assiste donc à un spectacle délicat et d’une formidable intelligence, où le réalisateur conteur nous enjoint de nous méfier des ficelles toutes faites de la modernité, à cette époque particulièrement, où la Covid-19 a donné le sentiment que le vivre et le travail ensemble pouvaient se satisfaire de réunions en visio.
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.