Le 20 octobre 2024
Bien qu’assurément Kate Winslet trouve ici l’un de ses meilleurs rôles de sa carrière, la mise en scène trop classique et trop sage nuit quelque peu à l’intérêt du récit.
- Réalisateur : Ellen Kuras
- Acteurs : Marion Cotillard, Kate Winslet, Patrick Mille, Andrea Riseborough , Alexander Skarsgård, Andy Samberg, Noémie Merlant, Zita Hanrot, Josh O’Connor, Vincent Colombe
- Genre : Drame, Biopic, Film de guerre
- Nationalité : Britannique
- Distributeur : Société nouvelle de distribution (SND)
- Durée : 1h57mn
- Titre original : Lee
- Date de sortie : 9 octobre 2024
- Festival : Festival de Deauville 2024
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Résumé : L’incroyable vie de Lee Miller, ex-modèle pour Vogue et muse de Man Ray, devenue l’une des premières femmes photographes de guerre. Partie sur le front et prête à tout pour témoigner des horreurs de la Seconde Guerre mondiale, elle a, par son courage et son refus des conventions, changé la façon de voir le monde.
Critique : La guerre est bruyante et agressive, la photographe court à travers les champs de la mort jusqu’au moment où une bombe explose près d’elle, comme une prise de conscience que son existence doit être mise au service de l’information. Et pourtant, Lee Miller ne pratiquera pas une photographie toujours vertueuse, occupée sans doute plus de sa carrière que d’éthique. Car cette photographe n’a pas toujours pris des clichés pris sur le vif en plein combats. Elle a construit des images pour rendre compte d’une réalité réinventée, qu’il s’agisse de corps féminins, de victimes de tourtes sortes ou de réécriture de l’actualité.
Lee Miller offre un rôle à la mesure de la comédienne, Kate Winslet. L’actrice accepte d’être filmée dans un corps qui vieillit et se départit de l’image idéale de la féminité : elle n’hésite pas à se grimer pour paraître plus vieille et plus abîmée par l’alcool et le tabac. Cette manière d’investir le personnage de Lee atteste d’un jeu qui ne triche pas avec les émotions et l’ambition de témoigner d’un parcours de vie aussi exemplaire que questionnant. Le long-métrage d’Ellen Kuras assume véritablement l’objectif d’un biopic consensuel et démagogique, au bénéfice d’un récit contrasté où toute la personnalité complexe de son héroïne est envisagée. La réalisatrice, qui s’essaye dans une première œuvre au cinéma après une carrière reconnue dans la direction photographique ou la réalisation pour le petit écran, tente d’éviter les poncifs d’une mise en scène trop romanesque, dans une certaine limite pourtant.
- Copyright SKY UK
Car paradoxalement l’intérêt du film pêche par une photographie trop démonstrative et une mise en scène trop lisse. Kate Winslet s’évertue à donner à voir toute une palette de la complexité de Lee Miller, là où la conduite d’acteur cède à la facilité linéaire et au classicisme. L’une des scènes particulièrement emblématique, où elle se fait photographier au domicile de Hitler après avoir découvert les atrocités qu’il a commises dans les camps de la mort, manque cruellement d’audace et de courage. La couleur verte qui inonde les images, dans le but grossier de plonger le spectateur dans une période ancienne, accentue le sentiment d’une vision infiniment trop sage, faisant même douter de la sincérité de la réalisatrice à ne pas forcer les sentiments du spectateur.
On ne peut s’empêcher pendant tout le long-métrage de regretter que ce ne soit pas une Agnieszka Holland qui se soit pas emparée du sujet absolument passionnant et d’utilité publique. Lee Miller remet sur le devant des consciences la barbarie nazie, dans un contexte politique général où le populisme fait gravement pencher le risque d’un retour au pouvoir de l’autoritarisme et du nationalisme. On perçoit avec effroi combien la vérité de la tuerie nazie a été longue à admettre en Europe, en dépit des dénonciations poétiques d’un Paul Eluard, dont le fameux poème Liberté rédigé dans un recueil clandestin en pleine occupation allemande en France, est cité à deux reprises.
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Lee Miller passe quelque peu à côté de ses nobles intentions. Pourtant, les interprètes n’hésitent pas à donner de leur personne dans l’incarnation des personnalités qui ont contribué à mieux faire connaître les horreurs commises par les nazis et, à leur façon, à lutter contre l’Occupation. Mais les décors sonnent faux, les couleurs faussent les perceptions, allant hélas contre les intentions généreuses d’Ellen Kuras. Ce qui est certain, c’est qu’après un tel film, d’autres suivront pour le grand écran et c’est heureux.
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