1997. Un homme déambule dans Budapest, sur les traces de son passé. André Lorant, soixante-sept ans, de retour dans le pays de sa jeunesse. Un pays qui l’a doublement trahi. Etoile jaune, étoile rouge. "Inerte, obtus, hébété", il arpente les rues. Trop d’émotion tue l’émotion. Ce n’est qu’au retour en France, assis à son bureau donnant sur les Invalides, que les sentiments d’André Lorant se décantent, que les anecdotes jaillissent, que les fantômes d’autrefois reprennent vie sous sa plume.

Il était une fois un petit garçon dont les grands-parents avaient troqué leur patronyme de Löwenstein contre celui de Lorant. Il jouait du piano et avait fait sa première communion. Sa famille se croyait à l’abri. Vingt-six ans de souvenirs refont surface, sans chronologie, mémoires en zigzag d’une enfance protégée, d’une adolescence pétrifiée par la mort du père, la chasse aux juifs et la ruine financière. Avec pour seules consolations la musique et la littérature, ses deux anges gardiens. Puis vient le temps où l’on pense pouvoir souffler, mais c’est l’enclume du stalinisme qui s’abat sur le jeune universitaire taxé de bourgeois. C’en est trop, il prend la route de l’exil.

Au bout de ce labyrinthe de réminiscences, tendre et vigoureux portrait d’une époque disparue corps et biens, l’auteur, apaisé, tend la main au jeune homme qu’il était, dans un geste de réconciliation avec son passé. Semblant lui dire : Rejoins-moi. Terminons la route ensemble. Même si nous aurons toujours mal à la Hongrie.