Le 25 mai 2019
Le film des frères Dardenne est une grande œuvre inconfortable, qui évoque le thème de la radicalisation religieuse, à travers un jeune garçon résolu.
- Réalisateur : Jean-Pierre & Luc Dardenne
- Acteurs : Olivier Bonnaud, Myriem Akheddiou, Idir Ben Addi, Victoria Bluck, Claire Bodson
- Genre : Drame, Teen movie, Drame social
- Distributeur : Diaphana Distribution
- Durée : 1h24min
- Date télé : 13 novembre 2023 21:00
- Chaîne : OCS Pulp
- Date de sortie : 22 mai 2019
- Festival : Festival de Cannes 2019
Résumé : En Belgique, aujourd’hui, le destin du Jeune Ahmed, treize ans, pris entre les idéaux de pureté de son imam et les appels de la vie.
Critique : Le nouveau film des frères Dardenne investit une thématique d’une brûlante actualité, tout en la reliant à une construction archétypale, inhérente à leur cinéma : la mise en scène de personnages entêtés, tenaces jusqu’à l’obsession. C’est donc à la très délicate question de la radicalisation religieuse que s’attaque cette histoire, sans que ne s’exprime, à aucun moment, la volonté de construire une œuvre à thèse. La force de ce puissant long métrage est de ne jamais induire une quelconque forme de causalité, qui aurait évidemment lesté le propos d’intentions pédagogiques ou maladroitement humanistes et l’erreur serait de dénouer le sens, lorsque les réalisateurs affichent une vraie perplexité, l’illustrent même par l’exemple.
Le parcours du jeune Ahmed est à la fois l’itinéraire d’un têtu et d’un prosélyte rigoriste. La caméra qui, selon la manière Dardenne, colle à son personnage du début à la fin, décompose ses journées en autant de prières murmurées, de gestes empreints d’une grande dévotion, d’ablutions répétées. L’adolescent dont la physionomie marmoréenne impressionne est aussi un contempteur des pratiques familiales, qui s’éloignent, selon lui, du chemin qui mène à Allah. L’incrimination des femmes y apparaît comme un fil conducteur : toutefois, des admonestations lancées au visage de sa sœur jusqu’à la méfiance exprimée vis-à-vis de la jeune Louise, les réactions successives ne se dissocient pas d’un déchirement : ainsi, le jeune adolescent tente de concilier son désir d’une jeune fille avec la foi qui l’anime, en contractualisant aussitôt leur relation naissante sous le signe de l’Islam. Sait-il que cette demande est vouée à l’échec ? Ou croit-il sincèrement que Louise se convertira ?
Ces atermoiements insufflent à ce film un surcroît de tension, de la même manière que le comportement d’Ahmed, sans cesse modelé par sa radicalisation (au-delà même de ce que souhaite l’imam auquel il doit ses convictions), s’apparente à une vraie taqîya. Condamné suite à sa tentative de meurtre sur son enseignante "apostate", cerné d’éducateurs et de policiers, le jeune garçon attend constamment son heure, le moment où il pourra à nouveau frapper, chaque outil devenant une arme potentiellement létale (un stylo biseauté et dissimulé dans une chaussette, par exemple). La capacité de conformisation du personnage ne semble pas détectée par qui que ce soit, pas même par la psychologue dont les propos semblent résonner (ou raisonner) dans le vide. En fait, la simplicité du stratagème se déploie envers et contre toutes les précautions qui seront prises : portiques de sécurité, fouilles au corps, exiguïté carcérale. Le film nous suggère même que ces modalités de surveillance catalysent l’idée d’une vengeance, d’un crime à finir.
Seul le hasard malencontreux d’une chute empêchera le jeune homme d’aller jusqu’au terme de son intention. Mais a-t-il vraiment renoncé ? Jusqu’au bout, lorsque son ancienne victime se penche sur lui pour venir à son secours, on le croirait capable de la tuer. Même rampant, même handicapé. Ahmed qui crie "maman", exprime peut-être des remords. Ou pas. Il n’est pas certain que, là encore, sa situation périlleuse ne le dissuade de parvenir à ses fins.
- Copyright Diaphana Distribution, 2019
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nani 5 juillet 2019
Le jeune Ahmed - la critique du film
Rien compris à cette critique
Ce qui se conçoit bien , s’énonce clairement etc
Jérémy Gallet 6 juillet 2019
Le jeune Ahmed - la critique du film
Merci bien, j’avertis Boileau.