Le 12 février 2022
Un polar pessimiste, qui emprunte ses codes aux films noirs américains, mais anticipe aussi les grandes œuvres métaphysiques que seront Le Samouraï ou Le Cercle rouge.
- Réalisateur : Jean-Pierre Melville
- Acteurs : Michel Piccoli, Jean Desailly, Serge Reggiani, Jean-Paul Belmondo, Philippe Nahon, Marcel Cuvelier, René Lefèvre
- Genre : Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Thriller, Noir et blanc, Policier
- Nationalité : Français, Italien
- Distributeur : Dulac Distribution, Lux Compagnie Cinématographique de France
- Durée : 1h48mn
- Date télé : 15 juin 2024 23:00
- Chaîne : OCS Géants
- Reprise: 13 mai 2015
- Date de sortie : 8 décembre 1963
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Résumé : À sa sortie de prison, Maurice Faugel apprend le meurtre de sa femme et, consumé par le désespoir, tue le receleur chez qui il logeait avant de lui voler ses bijoux. Puis, il prépare un casse avec son complice Rémy et demande l’aide de Silien pour le matériel. Ce dernier, appelé le doulos, est craint par tous car on le prend pour un indicateur de la police.
Critique : Adapté du roman de Pierre Lesou, Le Doulos est un polar stylisé, qui s’habille d’ombre et de lumière, dès le premier plan où un superbe travelling suit Serge Reggiani, bandit solitaire qui va bientôt se faire justice en tuant un receleur, avant de lui voler son butin et de le planquer sous la terre. Si l’œuvre de Melville emprunte tous les codes du film policier à l’ancienne - atmosphères tamisées, commissariat avec flics en costumes, traîtrises en tout genre, cigarettes frimeuses, femmes aux ordres, club de jazz faussement huppé... -, son long métrage anticipe, par bien des aspects, les futurs chefs-d’œuvre que seront Le cercle rouge ou Le samouraï, avec une manière très melvillienne de mettre en scène la solitude, à travers des personnages qui semblent quasi métaphysiques : ainsi, qui est vraiment Silien, dit "le Doulos" ? Pourquoi agit-il avec aussi peu de scrupules, soit avec la police, soit avec les malfrats ? L’absence de déterminisme construit la figure d’un personnage complètement opaque et intrinsèquement novateur. Melville refuse les ressorts d’un psychologisme à la française, issu d’une tradition aussi littéraire que cinématographique.
La brutalité sans cause dont le héros est capable, dans une scène glaçante où, après avoir joué la séduction, celui-ci moleste Thérèse, avant de l’attacher au radiateur, renvoie à une distance cynique dont se souviendra un réalisateur comme Quentin Tarantino. L’incarnation tout à fait saisissante que Jean-Paul Belmondo donne à son interprétation, lui permet de jouer sur une gamme de sentiments variés, la forfanterie s’alliant globalement à la goujaterie : ainsi, mentionnera-t-on cette séquence où, avec un aplomb redoutable, Silien avoue à Fabienne, la femme d’un autre truand, Nuttheccio, qu’il veut coucher avec elle. La tonalité audacieuse de cette déclaration, dans le cinéma du début des années 60, va de pair avec ce qu’incarne Belmondo depuis A bout de souffle : le risque et l’aisance, qui se combinent dans ce polar aux tonalités pessimistes, les trahisons succédant aux coups bas. L’issue de ces affrontements entre marginaux dessine, comme dans les futurs films du réalisateur, un univers profondément pessimiste parce que fataliste, la mort successive des protagonistes, à la fin de l’histoire, n’étant que la conclusion logique d’un monde clos sur lui-même, voué à la violence.
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