Le 13 août 2016
Siodmak réunit tous les codes du noir dans ce polar bien mené.
- Réalisateur : Robert Siodmak
- Acteurs : Richard Conte, Shelley Winters, Victor Mature, Debra Paget, Fred Clark
- Genre : Drame, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Noir et blanc
- Nationalité : Américain
- Durée : 1h35mn
- Box-office : 397.320 entrées France / 108.457 entrées Paris Périphérie
- Titre original : Cry of the City
- Date de sortie : 17 mars 1950
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– Année de production : 1948
Résumé : Martin Rome, gangster, est arrêté par son ami d’enfance et policier, le lieutenant Candella qui l’accuse du meurtre d’une riche new-yorkaise. Parvenant à s’échapper, Martin Rome assassine son avocat véreux et se retrouve poursuivi par le lieutenant Candella.
Siodmak réunit tous les codes du noir dans ce polar bien mené.
Notre avis : Tourné après Les tueurs et Criss cross, La proie, assez lointaine évocation du titre original Cry of City, se situe dans cette série de films noirs impeccablement réalisés par Robert Siodmak pendant sa période américaine. Moins réussi sans doute, il demeure néanmoins un solide polar urbain, tourné en grande partie en extérieurs, dans le quartier « Little Italy ». Le scénario, écrit par Ben Hecht et Richard Murphy, oppose un policier raide et un gangster séduisant : on retrouve la fascination pour le mal et l’interrogation morale propres au genre, avec un déséquilibre évident tant la part belle est faite au personnage interprété pat l’excellent Richard Conte. C’est son itinéraire qu’on suit, avec un début saisissant dans lequel il est presque mort, jusqu’à la fin où il l’est réellement : on reconnaît un effet tragique, le film n’étant jamais que la réalisation d’une promesse posée dans les premières minutes. Tragique, certes, auquel le scénario ajoute une dimension religieuse inévitable dans un milieu d’origine italienne, sans que ce soit trop lourd. Là encore, c’est dès le début, comme un programme, que cette thématique apparaît, à travers un prêtre au chevet de Martin Rome, mais aussi dans la manière de filmer l’hôpital qui le fait ressembler à une église. Et c’est dans une « vraie » église que se terminera La proie, bouclant une thématique prégnante jusque dans l’impossible rédemption de Martin.
Mais le film joue aussi sur l’aspect quasi-documentaire : peu de spectaculaire et de violence, mais une approche pas à pas, dans un milieu décrit avec un réalisme pointilleux. On appréciera par exemple l’évasion de Martin, modèle de rigueur et de suspens filmée presque en temps réel. Certes, les codes du noir sont présents : ombres portées, éclairages inspirés de l’expressionnisme, et Siodmak sait les utiliser dans de belles séquences nocturnes. Sa capacité à dilater le temps ou au contraire à épurer une séquence (la mort de Martin et sa violence sèche) crée un rythme propre à rehausser une intrigue par ailleurs parfois convenue, voir en particulier le frère tenté par la délinquance, ou la trop jolie Debra Paget, au rôle inexistant. En revanche, l’avocat véreux, sarcastique à souhait, la mère italienne déchirée ou, surtout, la remarquable Hope Emerson, aussi massive qu’inquiétante, dessinent une galerie de personnages intéressants qui densifient l’histoire.
Sans aucun doute, le métier de Siodmak parvient à transcender les faiblesses de la narration : nombre de séquences sont ainsi parfaitement maîtrisées et relèvent du pur plaisir comme le massage qui se transforme en étranglement, filmé au plus près. On est d’autant plus surpris et déçu par certaines conventions, mais aussi par la difficulté à faire exister les tourments de Martin, qui restent purement déclaratifs. La complexité du personnage ne fonctionne pas ; en revanche toute la première partie, dans laquelle il se montre roublard et déterminé, met en valeur le jeu très fin de Richard Conte.
Sans égaler les grandes réussites du noir et malgré quelques défaillances, La proie demeure d’un bon niveau et mérite largement d’être vu ; sa vision doloriste du genre, même imparfaite, ses ambiances nocturnes soignées, sa rigueur, en font un film tout à fait recommandable et sans temps morts.
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