Les grands mythes des années 80
Le 30 septembre 2024
Boudé par la critique et le public lors de sa sortie en salles, La porte du paradis est un chef-d’œuvre mésestimé du cinéma américain, grande fresque lyrique et spectaculaire qui valut à Michael Cimino sa réputation de réalisateur maudit.
- Réalisateur : Michael Cimino
- Acteurs : Isabelle Huppert, Kris Kristofferson , Christopher Walken, Mickey Rourke, John Hurt, Willem Dafoe, Joseph Cotten, Sam Waterston, Brad Dourif, Jeff Bridges
- Genre : Drame, Aventures, Western
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Carlotta Films
- Durée : 3h36mn
- Reprise: 27 février 2013
- Titre original : Heaven's Gate
- Date de sortie : 22 mai 1981
- Festival : Festival de Cannes 1981
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Résumé : En 1870, une nouvelle promotion de Harvard célèbre avec faste et panache la promesse d’un avenir radieux. Vingt ans plus tard dans le Wyoming, les chemins de deux de ses meneurs se croisent à nouveau. Désormais shérif du comté de Johnson, James Averill voit son autorité contestée par l’association des éleveurs de bétail, dont fait partie son ancien ami Billy, devenu un homme cynique et lâche. L’association stigmatise les immigrants européens venus en nombre s’installer sur ces terres vierges. Appuyés en secret par le gouvernement fédéral, les éleveurs ont établi une liste noire d’immigrants à abattre pour l’exemple. Esseulé, le shérif Averill se dresse contre ce massacre programmé, mettant en danger sa propre vie ainsi que celle de la femme qu’il aime, une prostituée étrangère nommée Ella…
Critique : À sa sortie en 1980, La porte du paradis fut un échec critique et public retentissant, entraînant la faillite de United Artists, la société de production et de distribution montée par Charlie Chaplin et D.W. Griffith. Michael Cimino, tout juste auréolé du succès de Voyage au bout de l’enfer (cinq Oscars dont ceux du meilleur film et du meilleur réalisateur), voulait alors s’attaquer à un épisode sombre et méconnu de l’histoire américaine : la persécution, à la fin du XIXe siècle, d’immigrés pauvres issus d’Europe centrale dans l’ouest des États-Unis. Un peu comme il l’avait fait dans Voyage au bout de l’enfer, Cimino le cinéaste son récit sur une période joyeuse, pleine d’insouciance et d’espoir ; un temps où tous les rêves sont permis.
- © 2013 Metro-Goldwyn-Mayer Studios Inc. Tous droits réservés.
Nous sommes en 1870 et Harvard fête une nouvelle promotion. Les élèves célèbrent la fin de leur scolarité et le futur prometteur qui s’annonce à eux. La cérémonie se termine, l’histoire fait un bond en avant de vingt ans. À l’allégresse collective s’est substituée la crasse et la boue de l’Ouest américain. Le contraste est saisissant. Fini de rêver : l’Amérique, la vraie, c’est celle-ci. Celle des illusions perdues, de la violence et de l’individualisme. Au milieu de cette mélancolie, le bordel où travaille Ella Watson (Isabelle Huppert), entouré de paysages somptueux et solaires, apparaît comme un véritable paradis. Un havre de paix où James Averill (Kris Kristofferson), à l’instar des autres habitants du comté de Johnson, vient trouver un peu de réconfort. Car malgré son pessimisme ambiant, La porte du paradis relate également une histoire d’amour, celle qui lie Averill, Ella et Nathan Champion (Christopher Walken). Un triangle amoureux – motif déjà présent dans Voyage au bout de l’enfer – dont Ella ne parvient pas à s’extraire, elle qui hésite entre un homme qui semble l’aimer bien plus qu’elle ne l’aime lui (Walken), et un autre dont elle est profondément éprise mais qui hésite à s’engager (Kristofferson).
- © 2013 Metro-Goldwyn-Mayer Studios Inc. Tous droits réservés.
Outre sa sublime photographie et sa bande-son nostalgique, La porte du paradis interpelle également par le talent de metteur en scène de Michael Cimino, capable de tourner en plan-séquence de longues scènes profondément touchantes comme d’orchestrer des fusillades avec une maestria que John Ford n’aurait pas reniée. Le film est d’ailleurs rempli de séquences enivrantes, dotées d’une beauté plastique et d’une puissance émotionnelle qui confèrent à cet anti-western une dimension poétique. Seule (petite) faute de parcours : le personnage de John Hurt, bouffon alcoolique et cynique dont la séquence d’introduction laissait présager un rôle de premier plan, s’avère au final totalement anecdotique.
- © 2013 Metro-Goldwyn-Mayer Studios Inc. Tous droits réservés.
Avec La porte du paradis, Michael Cimino dépeint une Amérique brutale, intolérante et prête à tout pour défendre ses intérêts, rappelant au passage que la violence a toujours été omniprésente dans la construction du pays. Le réalisateur établit d’ailleurs un parallèle avec le sort des Indiens, autre minorité massacrée au nom de la toute puissance yankee, auquel il greffe une dimension sociale puisque ici, les riches (éleveurs de bétail) massacrent les pauvres (immigrés). Un portrait peu glorieux qui a, sans aucun doute, contribué à faire de La porte du paradis l’un des plus gros échecs cinématographiques de tous les temps.
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