Portrait de l’artiste en faussaire
Le 14 juin 2006
L’histoire improbable et vraie d’un faussaire de génie, à dévorer comme un bon polar.


- Auteur : Luigi Guarnieri
- Editeur : Actes Sud
- Genre : Polar, Roman & fiction
- Nationalité : Italienne
Peintre médiocre, auteur de toiles relativement académiques, Hans Meegeren, né aux Pays-Bas en 1889, avait tout pour sombrer dans l’oubli. Si ce n’est que pour se venger du monde de l’art, il décide un jour de mettre sur le marché un faux indiscernable. Redécouvert quelques décennies plus tôt, Vermeer, dont un nombre indéterminé de toiles a pu être perdu au cours des siècles, lui semble la cible idéale. Avec une patience et une minutie qui frisent le génie, il crée donc un nouveau Vermeer, habilement mis en circulation et aussitôt porté aux nues par les experts... Le plus incroyable ? Il renouvellera cet exploit à plusieurs reprises avant que les circonstances ne l’obligent à révéler son rôle de faussaire... L’affaire défraya la chronique au lendemain de la deuxième guerre mondiale, et se solda par l’un des plus retentissants procès de l’histoire de l’art.
Volontiers didactique - l’auteur n’hésite pas à reproduire quasi intégralement la célébrissime page de la Recherche du temps perdu consacré à la mort du romancier Bergotte face à une toile de Vermeer -, on ne cachera pas qu’une large part du très grand intérêt de ce livre tient à sa matière idéalement romanesque. Pour autant, Luigi Guarnieri compose les pièces de ce puzzle hallucinant avec une remarquable dextérité. Cette histoire vraie se dévore comme un polar dont les personnages seraient le maître de Delft, Marcel Proust, ou Goering - acquisiteur d’un des faux pendant la guerre ! Au passage, l’auteur égrène quelques justes questions sur l’art et le regard ; capables de bouleverser les foules, les meilleurs faux de Van Meggeren ne sont-ils pas à leur façon des chefs-d’oeuvre ?
Et c’est au terme d’une impeccable démonstration que Luigi Guarnieri assène cette troublante conclusion : si Van Meggeren ne s’était pas dénoncé, ses oeuvres seraient probablement aujourd’hui encore regardées comme des pièces maîtresses de la carrière de Vermeer... De quoi se promener avec un œil neuf dans les musées !
Luigi Guarnieri, La double vie de Vermeer (La doppia vita di Vermeer, traduit de l’italien par Marguerite Pozzoli), Actes Sud, 2006, 228 pages, 19,80 €
sibir 23 mai 2010
La double vie de Vermeer - Luigi Guarnieri - la critique du livre
Ce livre est extraordinaire. Non seulement on y apprend presque tout ce que l’on peut apprendre sur la vie du vrai Vermeer. Il manque un peu d’histoire sur sa généalogie. Il faut voir un autre livre.
Mais on apprend beaucoup sur sa façon de peindre. Mais aussi, sur comment font les faussaires. Pourquoi le héros se lance dans cette activité et l’histoire délirante qui le fait attraper. C’est incroyable. Je ne veux pas déflorer, mais je vous incite fortement à le lire.
J’ajoute juste que cette histoire, avec un dirigeant nazi, m’a également fait pensé à un livre peu connu de Joseph Kessel ; les mains du miracle. J’en parle un peu ici : http://moscou67.wordpress.com/2010/02/27/une-execution-ordinaire/
Merci