Lemon incest
Le 18 mars 2015
La cérémonie a la force des grandes tragédies antiques. Il y a un ver dans le fruit de la famille japonaise.
- Réalisateur : Nagisa Oshima
- Acteurs : Kei Satō, Akiko Koyama, Kenzo Kawarazaki, Atsuo Nakamura
- Genre : Drame
- Nationalité : Japonais
- Editeur vidéo : Carlotta Films
- Durée : 2h03mn
- Titre original : Gishiki
- Date de sortie : 18 octobre 1972
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La cérémonie a la force des grandes tragédies antiques. Il y a un ver dans le fruit de la famille japonaise.
L’argument : Masuo et sa cousine Ritsuko se rendent sur l’île où vit Terumichi, dont un télégramme leur a annoncé la mort prochaine. Tous trois sont parmi les derniers représentants de la vaste et puissante famille Sakurada. Au cours de la traversée, Masuo se souvient...
Notre avis : La cérémonie raconte l’histoire du clan Sakurada du point de vue d’un de ses derniers descendants Masuo. Masuo fait partie de la dernière génération, avec sa cousine Ritsuko et Terumichi. On apprendra au fil du film quel lien de parenté lit ce dernier aux deux premiers. C’est que chez les Sakurada, on ne sait jamais trop si tel ou tel personnage est le fils ou le petit fils d’un autre ou encore la sœur ou le frère d’un "cousin". Les filiations sont brouillées. L’inceste semble régner en maître. Par une série de flashbacks, on remonte le cours de la vie des personnages, rythmés par des cérémonies familiales : mariages, enterrements, anniversaires. Petit à petit on découvre les zones d’ombre de la famille, à commencer par celles du patriarche tout puissant qui tel Saturne dévore ses enfants.
- © Carlotta Films
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La famille Sakurada est monstrueuse car elle repose sur l’abus et le mensonge. Dans ces conditions il est difficile voire impossible de se construire une identité. Les personnages semblent condamnés d’avance. Le film a le parfum vénéneux des récits transgressifs. Oshima parvient à nous faire ressentir le poids d’un destin. On est complètement absorbé par l’histoire qu’il nous raconte. Il instille une sorte de folie qui nous scotche devant le spectacle. On sait que tout cela ne peut pas finir bien. Evidemment comme toujours chez Oshima le film est politique. Chaque flashback permet de faire le point sur un événement historique du Japon. Le premier souvenir évoque le discours de l’empereur Hiro Hito qui renonce à sa nature divine le 1er janvier 1946. En fait la destruction de la famille traditionnelle japonaise mise en oeuvre par Oshima va de pair avec une remise en question de toute la structure de la société japonaise. Le passé impérialiste est évoqué. Masuo est obsédé par l’idée que les anciens aient été des criminels de guerre. Le ferment de la révolte est semé. Les flashbacks suivants confirment l’esprit de contestation de la jeunesse. On éprouve à même le corps le vertige de cette jeunesse plongée en plein nihilisme.
- © Carlotta Films
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Sans dévoiler entièrement la fin du film, on peut tout de même signaler qu’elle évoque un événement marquant survenu quelques temps auparavant. Le grand écrivain japonais Mishima se donne la mort de façon rituelle (par sepukku) le 25 novembre 1970 (le film est sorti en 1971). Il y avait chez Mishima un fantasme du suicide. Ça le fascinait. C’est sans doute toute l’histoire d’une génération qui se cristallise dans ce geste. Oshima sentait parfaitement l’époque. Avec La cérémonie il a su tirer une histoire universelle d’un contexte historique particulier. Son film a la grandeur des classiques de la tragédie grecque.
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