La caja negra

Trois personnages, trois générations, et autant de façons de vivre une relation filiale. Un premier long métrage prometteur.

Luis Ortega signe son premier long métrage avec La caja negra, un film tourné avec patience en numérique pendant près dun an et demi, avec des acteurs non professionnels. Le jeune réalisateur  (vingt ans a l'époque du tournage) a suivi pas à pas Dolores Fonzi (qui interprète Dorotea) dans sa relation avec Eugenia Bassi (la grand-mère). Cette derniere a 99 ans lorsque le réalisateur la rencontre et décide d'en faire la grand-mère de son histoire. On le comprend : beau visage ciselé, diction désuète et théâtrale, cette femme-là a du panache. Mais il faut vite tourner car elle va bientôt mourir et elle perd de plus en plus la tête. Du coup, place à l'improvisation : Dolores visite tous les jours la vieille dame et s'occupe d'elle.  Pendant ce temps, la caméra s'est faite le témoin d'une situation réelle, même si cette réalite n'a existé que grâce au film. Une mise en abîme intéressante puisque le personnage de Dorotea est précisement celui qui dans la fiction réunit, écoute, tempère et aime inconditionnellement aussi bien cette vieille femme charismatique que cet homme étrange qu'est son père. Un père d'abord absent au sens propre puisquil est en prison, puis au sens figuré. Autant la grand-mère est bavarde, à la fois dure, prévenante, égoïste et drôle, volubile et vivante, autant le père est muet, vide et finalement absent à lui-même. Ce contraste est un habile procédé narratif. Peu à peu, le père sortira de sa boîte noire - la caja negra - métaphore de l’âme, de la solitude et de l’enfermement. La vieille dame pourra laisser sa petite-fille et partir tranquille. Luis Ortega étonne par sa maturité et sa finesse. On attend avec impatience le prochain film...