L’usage du monde
Le 23 juillet 2003
Comment bien voyager. Avec des guides comme Van Gogh ou Baudelaire, difficile de se planter.
- Auteur : Alain de Botton
- Editeur : Mercure de France
- Genre : Essai
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Voyager : un art qui s’apprend. Sur la route, bien sûr, qui reste la meilleure des écoles, mais aussi dans les livres et les musées. C’est là qu’Alain de Botton a trouvé ses guides. Il en convoque une dizaine dans son dernier bouquin, un ouvrage inclassable comme le sont souvent ceux que l’on range, pour faire simple, dans la catégorie "littérature de voyage". Le jeune auteur suisse installé à Londres raconte certes une poignée de ses périples : la Barbade, Barcelone, Amsterdam ou encore la Provence. Mais l’intérêt de L’art du voyage n’est pas là : il se trouve dans la façon dont l’écrivain éclaire ses propres expériences à la lumière de ses guides, dont le choix, autre grand mérite, évite de tomber dans la facilité. Ici, pas de Bruce Chatwin, de Nicolas Bouvier, de Cees Nooteboom et autres Ella Maillart : mais Huysmans, Baudelaire, Hopper, Flaubert, von Humboldt, Van Gogh, Wordsworth, Burke, Job, Ruskin et de Maistre. Avec lesquels de Botton s’arrête, décortique, interroge chacun des temps du voyage.
Ainsi la volonté d’aller voir ailleurs (Baudelaire : "N’importe où ! N’importe où !"). Ou la difficulté à saisir toute la richesse d’un endroit lorsque l’on s’y trouve (de Botton : "Il me semble que l’on puisse mieux habiter un lieu quand on n’est pas confronté à la difficulté supplémentaire de devoir y être"). Ou encore l’impression de vivre à la mauvaise place (Flaubert : "J’étais né pour être empereur de Cochinchine, pour fumer des pipes de 36 toises, pour avoir 6000 femmes et 1400 bardaches"). De Botton s’arrête aussi sur les lieux du voyage, sur ces "instants privilégiés" qu’offre la nature et qui nous relèvent "si nous sommes à terre" (Wordsworth). Sur la façon dont la peinture peut modifier notre perception d’un paysage (lumineux chapitre sur Van Gogh). Sur la peinture tout court et l’écriture, qui n’ont pas leurs pareils pour nous "apprendre à regarder", ainsi que l’enseignait John Ruskin.
Alain de Botton boucle son voyage avec Xavier de Maistre qui, à la fin du 18e siècle, quelques années avant qu’Alexander von Humboldt et sa formidable curiosité ne s’embarquent pour l’Amérique du Sud, faisait, lui, le tour de sa chambre. L’évidence même : le voyage n’est qu’un état d’esprit, qu’une simple question d’attitude. Au-delà de son érudition et des pistes originales qu’il propose, de Botton réussit ainsi à poser des mots justes (même si le ton est parfois un peu académique) sur la magie du voyage, ainsi que sur celle que dégagent les livres des plus grands écrivains-voyageurs.
Alain de Botton, L’art du voyage (Art of travel, traduction de l’anglais par Jean-Pierre Aoustin), Mercure de France, coll. "Bibliothèque étrangère", 2003, 300 pages, 20 €
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